KING, RICHARD, médecin, explorateur de l’arctique, ethnologue et écrivain, né probablement en 1810 à Londres, fils de Richard King ; épousa en 1857 Elizabeth Lumley dont il eut au moins un fils ; décédé à Londres le 4 février 1876.

Richard King entra à l’école St Paul de Londres en 1820 et, en 1824, il commença un apprentissage de sept ans chez un apothicaire. La Society of Apothecaries lui accorda le permis d’exercer sa profession en 1832. On pense qu’il reçut son doctorat en médecine de l’University of St Andrews, dans le comté de Fife, en Écosse ; mais les dossiers de cette période sont incomplets et cette hypothèse ne peut pas être prouvée. C’est comme chirurgien et naturaliste que King prit part en 1833 à l’expédition par voie de terre entreprise dans l’arctique par le capitaine George Back, pour tenter de retrouver le capitaine John Ross*, qui était parti quatre ans auparavant à la découverte d’un passage au nord-ouest.

Bien qu’il ne fût que commandant en second, King fut en grande partie responsable du succès de l’expédition. Les deux hommes arrivèrent évidemment à s’entendre durant leurs explorations, encore que Back compliquât inutilement la tâche de King qui devait recueillir des spécimens d’histoire naturelle. En route vers le Nord-Ouest, King avait la responsabilité du gros de l’expédition et de l’essentiel du matériel, tandis que Back prenait les devants dans un canot léger, se hâtant pour préparer l’exploration de la rivière Great Fish (aujourd’hui, la rivière Back). Après son retour, Back se dépêcha de repartir pour l’Angleterre et, une fois encore, confia la responsabilité de la majorité de l’expédition à King, en lui laissant des instructions à peu près impossibles à respecter.

Back, bien entendu, rédigea un récit officiel de l’expédition. King y contribua en écrivant des appendices sur la botanique et la météorologie. En plus, King publia son propre compte rendu et, à bien des points de vue, son ouvrage est supérieur à celui de Back. King fit preuve de plus de compréhension à l’égard des Indiens et, bien que sa tâche fût beaucoup plus pénible que celle de Back, il n’exagéra pas, lui, les difficultés de l’expédition. Il différa d’opinion avec Back sur certains éléments géographiques importants, et il laissa clairement entendre qu’à son avis l’entreprise aurait pu être mieux dirigée et plus fructueuse ; il en était à tel point persuadé qu’il avait décidé, « encore campé sur les rivages polaires, de reprendre les recherches à l’endroit même où s’étaient arrêtés les efforts du capitaine Back ». Pendant 22 ans, King s’efforça de trouver l’appui nécessaire à ce projet. Il échoua chaque fois, surtout parce que Back fit jouer contre lui des influences plus fortes que celles qui l’appuyaient.

D’après King, le travail géographique le plus important était de terminer le relevé de la côte nord de l’Amérique du Nord afin de déterminer si un passage au nord-ouest était vraiment praticable. En 1836, il proposa de résoudre le problème posé par l’isthme de Booth, que John Ross avait porté sur sa carte en se fiant simplement aux dires des Inuits. Si l’isthme existait, pensait King – on put constater plus tard qu’il avait raison – cela signifiait que les terres situées au nord de cet isthme, baptisées par Ross du nom de North Somerset (aujourd’hui île de Somerset), faisaient partie de la côte nord et que partant la péninsule de Booth était le point situé le plus au nord-est du continent – et non pas celle de Melville.

Après s’être heurté au refus du ministre des Colonies, King lança une souscription publique afin de réunir les £1 000 dont il avait besoin. Les réactions furent favorables jusqu’au moment où l’amirauté décida de renvoyer Back, à bord du Terror, jusqu’à la côte nord-ouest de la baie d’Hudson, avec mission de se rendre à travers les terres jusqu’à la baie de Booth et d’explorer en bateau les régions inconnues. En même temps, la Hudson’s Bay Company refusa son appui à King et envoya plutôt deux de ses hommes, Peter Warren Dease* et Thomas Simpson, afin d’explorer les deux autres secteurs inconnus de la côte nord situés l’un en Alaska l’autre entre la baie du Couronnement et la rivière Back. King estimait que c’était à son initiative que l’on devait les deux expéditions.

La tentative de Back fut un échec, et il revint après avoir passé l’hiver cerné dans la baie d’Hudson. Accompagnés de petits groupes, comme l’avait prôné King, et de quelques-uns de ces mêmes hommes qu’il aurait aimé emmener avec lui, Dease et Simpson remportèrent un succès complet.

En 1842, King soumit de nouveau son projet en insistant toujours sur l’importance de la côte située entre la rivière Back et la presqu’île de Melville. Avec une expédition peu nombreuse et en canot, il voulait se diriger vers le nord en partant de la rivière Back, et en longeant la côte est de la baie de Chantrey. Si Booth était une île, ils arriveraient rapidement au détroit de Fury et d’Hecla ; en le traversant, ils pourraient compléter rapidement le tracé de la côte nord du continent. Mais si l’isthme existait, il se proposait de suivre la terre ferme jusqu’à sa limite nord, afin de voir comment elle était reliée aux terres situées à l’est et, si elle en était séparée par un chenal d’une largeur suffisante, il aurait enfin trouvé une solution au « grand problème d’un passage praticable de l’Atlantique au Pacifique ». Une fois de plus, on refusa sa requête.

Lorsque, en 1845, King entendit parler pour la première fois de l’expédition que projetait sir John Franklin*, il insista pour qu’on envoyât un groupe d’hommes par voie de terre afin de les aider. En 1847, comme on était toujours sans nouvelles de Franklin, King fut l’un des premiers à donner l’alarme pour assurer la sécurité de l’expédition. À l’époque, il n’avait pas entièrement compris les instructions de Franklin (elles n’avaient pas été rendues publiques), mais il déclara sans hésiter qu’on retrouverait l’expédition « dans la partie ouest de North Somerset ». Selon l’historien R. J. Cyriax, il arriva à cette déduction exacte en partant de prémisses fort discutables. À mesure qu’on put se procurer des renseignements plus précis, il réitéra ses affirmations plus vigoureusement encore, insistant avec la véhémence qui lui était propre sur le fait que l’on ne pourrait rejoindre les hommes disparus qu’en passant par la rivière Back. En 1847, il offrit de diriger une expédition pour s’y rendre et de guider les hommes de Franklin vers des bases de ravitaillements qu’il voulait voir établies en 1848. On refusa son offre. En 1848, l’amirauté envoya trois expéditions de secours et, par la suite, bien d’autres suivirent jusqu’à ce qu’on eût parcouru presque tout l’arctique, sauf l’endroit où King avait déclaré qu’on trouverait l’expédition. De tous les spécialistes de l’arctique, seuls sir Edward Belcher, Frederick William Beechey* et lady Franklin [Jane Griffin] prêtaient attention aux dires de King. En 1850, lady Franklin envoya William Kennedy*, à bord de son bateau, le Prince Albert, pour faire des recherches près de l’embouchure de la rivière Back, mais il ne suivit pas exactement les ordres reçus et n’atteignit pas l’objectif de son voyage. Finalement, en 1854, John Rae* apprit inopinément des Inuits de la baie de Pelly qu’un grand nombre d’hommes blancs étaient morts non loin de là, à l’ouest, près de l’embouchure de la rivière Back.

Pendant tout ce temps, King avait insisté avec opiniâtreté et véhémence, répétant que c’était affaire de logique aussi bien que de vie ou de mort, et qu’il fallait donc entreprendre des recherches à l’endroit précis de la tragédie. Les autorités rejetèrent ses opinions et ses projets, mais les journaux de l’époque les approuvèrent cependant avec enthousiasme. Son appel au public – conduite indigne d’un homme de son rang – ne fit qu’augmenter l’animosité qu’avaient à son égard l’amirauté, la Royal Geographical Society et la Hudson’s Bay Company. En 1855, King expliqua en détail sa position inébranlable dans un livre intitulé The Franklin expedition from first to last et, faisant montre d’un humour sarcastique souvent fort déplaisant, il n’y épargna aucun de ses adversaires. En 1856, il offrit pour la cinquième fois de descendre le cours de la rivière Back afin, cette fois, de chercher les documents de l’expédition de Franklin. Un peu plus tard cette année-là, il répéta son offre dans un projet conjoint avec Bedford Pim*. Ce ne fut toutefois qu’en 1859 que sir Francis Leopold McClintock* fut envoyé par lady Franklin, à ses propres frais, pour se livrer à d’ultimes recherches. Il explora la région voulue et c’est lui qui ramena en Angleterre le seul document trouvé de même que d’autres vestiges qui prouvaient le sort tragique de l’expédition. Si l’on avait accepté l’une des nombreuses propositions de King, on aurait probablement retrouvé d’autres documents. Toutefois, même si l’amirauté avait agi dès sa première offre, en 1847, il est peu probable qu’on ait pu sauver un seul des membres de l’expédition de Franklin. On a été jusqu’à insinuer que c’était peut-être en partie l’insistance même de King qui avait poussé les autorités à ne pas entreprendre de recherches dans la région dont il avait parlé.

La seule mention presque officielle qu’on puisse découvrir des efforts persistants de King et de la justesse de ses vues se trouve dans une référence obscure de la troisième édition révisée de l’œuvre de M’Clintock, The fate of Sir John Franklin : the voyage of the « Fox » [...], en 1869 (la première édition date de 1859). Sir Roderick Murchison, président de la Royal Geographical Society, qui préface ce livre, observe dans une note : « Au nombre des publications récentes, il n’est que justice [...] de mentionner que le Dr King a suggéré et a toujours maintenu qu’il fallait rechercher les navigateurs disparus à – ou près de – l’embouchure de la rivière Back. »

Bien que la mémoire de King soit surtout associée à l’expédition qu’il fit par voie de terre avec Back de 1833 à 1835 et à la polémique qu’il suscita au sujet des recherches de Franklin, il n’en mena pas moins une vie active et utile dans le domaine de la médecine et dans des travaux d’érudition. En 1842, il lança un prospectus qui permit la fondation de l’Ethnological Society of London, dont il fut le premier secrétaire. Lorsque la société fusionna, en 1871, avec l’Anthropological Society of Great Britain and Ireland, King faisait encore partie du conseil d’administration. Il écrivit de nombreux articles d’ethnologie et de médecine qui ont une grande valeur. Il publia deux petits livres, l’un sur le choléra, l’autre sur les causes de mortalité chez les enfants mort-nés. Ce furent des œuvres importantes à l’époque et il reçut un certain nombre de nominations et de marques d’estime dans le monde médical.

Alan Cooke

George Back, Narrative of the Arctic land expedition to the mouth of the Great Fish River, and along the shores of the Arctic Ocean, in the years 1833, 1834, and 1835 (Londres, 1836).— Richard King, Narrative of a journey to the shores of the Arctic Ocean, in 1833, 1834, and 1835, under the command of Capt. Back (2 vol., Londres, 1836) ; The Franklin expedition from first to last (Londres, 1855) ; On the industrial arts of the Esquimaux, Journal of the Ethnological Society of London, I (1848) : 277–300 ; On the intellectual character of the Esquimaux, Journal of the Ethnological Society of London, I (1848) : 127–152 ; On the unexplored coast of North America, London, Edinburgh, and Dublin Philosophical Magazine and Journal of Science, 3e sér., XX (1842) : 488–494.— F. L. M’Clintock, Fate of Sir John Franklin : the voyage of the « Fox » in the Arctic seas [...] (Ire éd., Londres, 1859 ; 3e éd., Londres, 1869), vii–xviii.

DNB : La biographie de Richard King contient de nombreuses inexactitudes ; on l’a confondu avec un homonyme qui fut assistant-chirurgien à bord du Resolute, lors de l’expédition de Horatio Thomas Austin* en 1850–1851, et qui reçut la médaille polaire.— R. J. Cyriax, Sir John Franklin’s last Arctic expedition, [...] a chapter in the history of the Royal Navy (Londres, 1939).— F. J. Woodward, Portrait of Jane : a life of Lady Franklin (Londres, 1951).— R. J. Cyriax, Sir James Clark Ross and the Franklin expedition, Polar Record (Cambridge, Angl.), III (1942) : 528–540. La présente biographie s’appuie également sur des renseignements fournis à l’auteur par M. Hugh Wallace et puisés dans la correspondance personnelle de ce dernier. [a. c.]

Comment écrire la référence bibliographique de cette biographie

Alan Cooke, « KING, RICHARD », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 10, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 11 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/king_richard_10F.html.

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Auteur de l'article:    Alan Cooke
Titre de l'article:    KING, RICHARD
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 10
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1972
Année de la révision:    2020
Date de consultation:    11 nov. 2024