Titre original :    Le ténor Rodolphe Plamondon   | Les Quatre Saisons

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PLAMONDON, Rodolphe (baptisé Joseph-Marcel-Rodolphe), ténor, violoncelliste et professeur, né le 17 janvier 1876 à Montréal, fils de Théodore Plamondon et de Virginie Cartier ; le 3 mars 1904, il épousa à Paris Marie Dufriche, mezzo-soprano et pianiste, fille du baryton français Eugène Dufriche, et deux fils et une fille lui survécurent ; décédé le 27 janvier 1940 à Montréal.

Rodolphe Plamondon est issu d’une famille où la musique et la culture occupent une place importante. Son père, notaire de profession et amateur de violon, organise fréquemment des soirées de musique de chambre à la maison. Entre 1888 et 1892, Rodolphe fait des études classiques au petit séminaire de Montréal, probablement sans obtenir son diplôme. En musique, il s’initie au violoncelle (avec Louis Charbonneau) et au solfège (avec Frédéric Pelletier) avant d’entreprendre des études de chant avec le compositeur et chef d’orchestre Guillaume Couture*, qui sera considéré comme le premier grand musicien dans l’histoire de la musique canadienne. Il se produit sporadiquement en tant que chanteur soliste à la cathédrale Saint-Jacques et à l’église du Gesù. En octobre 1895, il part pour l’Europe. Admis en décembre à l’étude du violoncelle au Conservatoire national de musique et de déclamation, succursale de Rennes, en France, il s’installe à Paris quelques mois plus tard. Il obtient ses premiers contrats professionnels de musicien dès l’été de 1896 : il est engagé comme violoncelliste au casino de Paramé (Saint-Malo), puis aux Folies-Parisiennes, à Paris, où il poursuit tout de même ses cours de chant, notamment auprès du ténor Pierre-Émile Engel, élève du légendaire ténor Gilbert-Louis Duprez qui a enseigné à Emma Albani [Lajeunesse*]. On l’entend dans les salons français, où il rencontre les compositeurs Jules Massenet et Reynaldo Hahn. En juin 1897, il chante au Windsor Hall de Londres en compagnie d’une étoile lyrique de la scène internationale, l’Australienne Nellie Melba. Le 31 décembre de la même année, il fait ses débuts à l’église des dominicains de la rue du Faubourg Saint-Honoré, à Paris, au cours d’un concert auquel participent Jean-Baptiste Faure, baryton, et Charles-Marie Widor, organiste. Il se produit de plus en plus aux côtés de grands chanteurs de sa génération, avec entre autres Clara Ellen Butt et Paul-Henri Plançon dans un récital au Royal Albert Hall de Londres le 21 juin 1898. Sa carrière à l’opéra connaît alors un bel essor dans des rôles de soutien, en 1899 à Vichy, en France, par exemple. Revenu à Paris, il trouve un emploi de violoncelliste au casino et est engagé comme ténor soliste à l’église Saint-Roch. En 1904, il épouse la chanteuse et pianiste française Marie Dufriche qui l’accompagne fréquemment dans ses récitals.

Le 2 février 1904, une critique élogieuse d’un concert à la salle Pleyel, à Paris, donne une autre impulsion à la carrière lyrique de Plamondon, à telle enseigne qu’il se voit confier de plus en plus de rôles importants, notamment à Monte-Carlo, où il chante celui de Laërte dans Hamlet d’Ambroise Thomas (en 1905) et celui du prince Sinodal dans le Démon d’Anton Grigorievitch Rubinstein (en 1906). En 1905, au théâtre antique d’Orange, haut lieu européen de manifestations théâtrales et lyriques, il remporte également un succès éclatant dans le rôle d’Iopas (les Troyens à Carthage d’Hector Berlioz) devant un auditoire de 12 000 personnes. On le considère dès lors comme l’un des meilleurs interprètes de Berlioz. Plamondon fait une autre percée considérable lorsque, pour ses débuts à l’Opéra de Paris en avril 1906, il joue le rôle éponyme dans la Damnation de Faust, qu’il tiendra près de 250 fois au cours de sa carrière. Il y chantera également, en 1908, Hippolyte et Aricie de Jean-Philippe Rameau (rôle d’Hippolyte), puis, en 1918, Castor et Pollux, du même compositeur (rôle de Castor). Il devient alors le premier chanteur canadien à se produire dans ce théâtre lyrique important et le deuxième chanteur de la province de Québec, après Albani, à connaître la consécration internationale. Plamondon est soliste invité en France et ailleurs en Europe, notamment par les concerts Colonne et Lamoureux, de même que par la Société des concerts du conservatoire. Il interprète surtout des pièces du répertoire français, mais aussi une œuvre anglaise, The dream of Gerontius d’Edward Elgar.

En 1917, Plamondon a rencontré l’illustre compositeur français Camille Saint-Saëns qu’il accompagne cette année-là en tournée en France. Naissent alors entre eux une belle complicité artistique et un respect mutuel : ensemble, ils donnent le cycle la Cendre rouge. Sous la direction de Saint-Saëns, Plamondon est soliste dans l’oratorio le Déluge. Le compositeur dédie une de ses dernières œuvres au chanteur : le 19 octobre 1924, à Montréal, Plamondon interprétera en effet À saint Blaise. Au cours de sa carrière, Plamondon prend également part à certaines créations : The dream of Gerontius (au palais du Trocadéro à Paris en 1906) et Harmonie du soir, poème de Charles Baudelaire mis en musique par le Canadien Rodolphe Mathieu (sous la direction de Paul Paray, à Paris, aux concerts Lamoureux en 1924).

En 1906, Plamondon a livré deux concerts au Canada, l’un au Monument national de Montréal le 1er octobre, et l’autre à l’Auditorium de Québec le 4 octobre. Il ne reviendra visiter le pays que 14 ans plus tard, avec une solide réputation internationale. Le 20 avril 1920, il fait un récital au Monument national. Le lendemain, Pelletier, alors critique musical au Devoir, écrit : « Cet art ne se définit pas, il existe et le moins initié des auditeurs en subit l’influence sans s’en rendre compte, n’attribuant qu’à la voix les sensations qu’il ressent, sans se douter que d’autres voix plus belles ne feraient que lui rendre ces pièces ennuyeuses. » Pour lui exprimer la fierté que sa province natale éprouve à voir triompher l’un des siens, on donne un banquet en son honneur le 24 avril à l’hôtel Viger. À partir de 1924, Plamondon chante surtout au Canada et donne de nombreux récitals au Québec et en Nouvelle-Angleterre, notamment en compagnie de la basse Ulysse Paquin. En 1930, il fera une tournée pancanadienne avec son fils Lucien, violoncelliste.

Vers 1925, la carrière active de Plamondon tire cependant à sa fin. Il enregistre une douzaine de disques, surtout de mélodies françaises, avec la compagnie Starr. Un concert-bénéfice, « en hommage national à Rodolphe Plamondon » (selon la Presse), a lieu au Monument national le 18 janvier 1926. Au terme du spectacle, auquel participent quelques artistes canadiens, dont Jean-Baptiste Dubois et son quatuor, ainsi que Plamondon lui-même, le ténor reçoit le montant intégral de la recette, soit près de 2 000 $. En 1927 et 1928, il participe, au château Frontenac de Québec, aux festivals du CP. Il s’établit définitivement au Québec en 1928 et se consacre, dans les années 1930, à l’enseignement. Il aurait fondé un studio de chant à Montréal. Il enseigne à l’École supérieure de musique d’Outremont de 1935 jusqu’à sa mort à Montréal le 27 janvier 1940.

La carrière de Rodolphe Plamondon s’articule également autour d’œuvres sacrées du grand répertoire : les Béatitudes de Franck, l’Enfance du Christ de Berlioz, la Messe en si mineur et deux Passions de Bach (saint Jean et saint Matthieu), la Missa solemnis de Beethoven et le Requiem de Verdi. Il chante aussi des pièces que peu ont interprétées, dont, sous la direction de Vincent d’Indy, Euryanthe de Weber (rôle d’Adolar). Il aurait chanté dans la Tétralogie de Wagner en Espagne et, à plusieurs reprises, exécuté les œuvres de compositeurs canadiens comme Alfred Laliberté et Rodolphe Mathieu. Le 19 janvier 1926, dans le Devoir, Pelletier résume bien son art : « C’est de l’art pur de tout le clinquant qu’affectent d’habitude les ténors qui veulent surtout faire montre de leur organe et pour qui les œuvres ne sont que des moyens. Chez lui, c’est tout le contraire et la voix, chaude et enveloppante, n’est que l’instrument asservi au sens de la musique qu’il interprète avec une piété tour à tour émouvante ou sereine. » Les recensions de concerts évoquent la pureté, la clarté et l’expressivité de la voix, un instrument souple excellant dans l’art du mezza-voce et de la diction. Artiste discret et d’allure aristocrate, Plamondon figure en son temps parmi les « personnalités les plus marquantes [du] monde musical », selon le Devoir du 27 septembre 1924. Une rue de Chicoutimi (Saguenay) porterait son nom, ainsi que, à Montréal, une avenue et une station de métro. En 1991, il sera intronisé au Panthéon canadien de l’art lyrique, créé la même année par l’Opéra de Montréal.

Pierre Vachon

Dans les archives de l’Encyclopédie de la musique au Canada (Univ. de Montréal, Div. des arch., P 365), nous avons consulté le dossier sur la famille Plamondon. Outre des références bibliographiques, on y trouve entre autres un exemplaire du programme d’un concert de Rodolphe Plamondon donné le 2 juin 1927, de la correspondance avec Ernest-Gill (Jean-Paul) Plamondon, neveu de l’artiste, ainsi qu’avec Benoît Plamondon, généalogiste de la famille. Cette dernière correspondance renferme des renseignements généalogiques complets, notamment sur les musiciens de la famille. Selon cette documentation, les registres de la paroisse de L’Ancienne-Lorette recèleraient des précisions sur les premiers Plamondon rattachés à la musique.

BAnQ-CAM, CE601-S51, 19 janv. 1876 ; CN601-S492.— FD, Notre-Dame (Montréal), 30 janv. 1940.— Le Devoir, 29 janv. 1940.— Gazette (Montréal), 29 janv. 1940.— Le Passe-Temps (Montréal), 5 déc. 1914 ; 11 sept. 1915 ; 12 août 1916 ; 14 juill., 11 août 1917.— La Presse, 29 janv. 1940.— Gustave Comte, « Rodolphe Plamondon : esquisse biographique », la Musique (Québec), 2 (1920) : 135–137, 151–153, 167–170.— Romain Gour, « Rodolphe Plamondon, ténor classique (1876–1940) », Qui ? (Montréal), 5 (1953–1954) : 57–80.— Historica Canada, « l’Encyclopédie canadienne » : www.encyclopediecanadienne.ca/fr (consulté le 18 août 2015).— Lanaudière – Sol de musique, « Joliette en musique » : soldemusique.connexion-lanaudiere.ca/sol/h6_joliette_4.htm (consulté le 26 août 2015).— Georges Pioch, « “Hippolyte et Aricie” à l’Opéra », Musica (Paris), 7 (1908) : 85, 109.— Jean Saucier, « Rodolphe Plamondon : un artiste canadien-français parmi les chanteurs favoris de l’Europe », la Canadienne : le magazine du Canada français (Montréal), 1 (1920), no 5 : 13.

Bibliographie de la version révisée :
BAnQ conserve du matériel relatif à Rodolphe Plamondon, notamment quelques enregistrements accessibles en ligne dans la section Patrimoine québécois/Audio de sa collection numérique : numerique.banq.qc.ca (consulté le 21 sept. 2018).

Arch. de Paris, « Actes d’état civil », 9e arrondissement, 3 mars 1904, no 232 : archives.paris.fr/s/4/etat-civil-actes/? (consulté le 21 sept. 2018).

Comment écrire la référence bibliographique de cette biographie

Pierre Vachon, « PLAMONDON, RODOLPHE (baptisé Joseph-Marcel-Rodolphe) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 8 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/plamondon_rodolphe_16F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2018
Année de la révision:    2018
Date de consultation:    8 déc. 2024