DALAIRE (Dallaire), OMER-EDMOND (baptisé Edmond-Olivier), éducateur, conférencier agricole, fonctionnaire et auteur, né le 20 mai 1856 à Saint-Jérôme, Bas-Canada, fils d’Abraham Dalaire, instituteur, et de Caroline Fresne ; le 5 septembre 1881, il épousa à Sainte-Scholastique (Mirabel, Québec), Malvina Filiatrault, et ils eurent deux enfants, Marie, qui fut la secrétaire de son père et mourut subitement le même jour que lui, et Abraham, employé à l’école de laiterie de Saint-Hyacinthe, Québec ; décédé le 19 février 1919 à Saint-Hyacinthe et inhumé le 22 à Sainte-Rose (Laval, Québec).
Omer-Edmond Dalaire commence sa carrière d’éducateur en enseignant dans les écoles primaires de sa région natale, d’abord à Sainte-Anne-des-Plaines de 1881 à 1886, puis à Sainte-Rose de 1886 à 1891. Parallèlement à son travail d’instituteur, il en arrive, dès 1884, sur l’invitation d’Édouard-André Barnard*, à prononcer ses toutes premières conférences agricoles, activité qui va principalement contribuer à le faire connaître sur la scène provinciale. L’idée d’accroître la diffusion de l’enseignement agricole au moyen de conférences payées par l’État a été mise de l’avant par Barnard au début des années 1870, et c’est en 1872 qu’avec celui-ci a été lancé le mouvement des conférences, aussi désignées à l’époque sous le nom de causeries agricoles ; le relais sera pris successivement par Jean-Charles Chapais, Dalaire et le docteur Wilfrid Grignon.
En 1891, Dalaire entre au service du département de l’Agriculture et de la Colonisation de la province de Québec en qualité de premier conférencier agricole permanent. L’importance de cette nouvelle fonction tient, entre autres, au fait que, pour la première fois, l’État reconnaît la valeur pédagogique de l’interaction entre conférences et cercles agricoles. D’ailleurs, Dalaire ne négligera pas le deuxième élément de cette interaction puisque, selon Chapais, il aurait contribué à mettre sur pied, tout au long de sa carrière, pas moins de 400 cercles agricoles. Son action en ce domaine est d’ailleurs bien antérieure à son entrée en fonction au département de l’Agriculture et de la Colonisation. Déjà, à partir de 1884, au moment où il enseignait, il a contribué à la formation de huit cercles agricoles dans les comtés de Terrebonne, Deux-Montagnes et Laval. Il aurait également été responsable de la mise sur pied de plusieurs sociétés d’agriculture. Son engagement auprès du gouvernement provincial le conduit à voyager dans toutes les régions du Québec, tantôt comme conseiller, à l’occasion de la création de cercles agricoles, tantôt à titre de conférencier. Après sa première année au département de l’Agriculture et de la Colonisation, il annonce, dans le Journal d’agriculture illustré (Montréal) de janvier 1893, avoir visité, en l’espace de sept mois, pas moins de 92 localités. Le travail de conférencier officiel que Dalaire effectue à plein temps, de 1891 à 1907, constitue pour plusieurs le moment de sa carrière qui a le plus mis en valeur sa personnalité et ses qualités de communicateur. Au dire de son contemporain Chapais, sa facilité d’élocution, sa capacité de vulgarisation et aussi son humour faisaient de lui un homme capable d’entretenir et de captiver un auditoire généralement peu familier avec des notions théoriques ou scientifiques. La fonction de conférencier au département de l’Agriculture disparaîtra graduellement avec la multiplication du nombre des agronomes qui, dans le champ de la diffusion des connaissances agricoles, prendront la relève au cours des années 1910. D’ailleurs, dès 1907, Dalaire exerce d’autres tâches qui l’amènent à reléguer au second plan son activité de conférencier.
Le 1er avril 1907, date importante dans sa carrière, Dalaire accède simultanément au poste de directeur de l’école de laiterie de Saint-Hyacinthe et à celui de secrétaire de la Société d’industrie laitière de la province de Québec, également située à Saint-Hyacinthe. Il remplira ces deux fonctions pendant 12 ans, soit jusqu’à sa retraite en février 1919. En succédant au Français Émile Castel, il devient le troisième secrétaire de la Société d’industrie laitière, fondée le 28 novembre 1882, et le deuxième directeur de l’école de laiterie, mise sur pied dix ans plus tard.
Comme directeur de l’école de laiterie, Dalaire s’emploie à poursuivre les objectifs premiers de cet établissement, qui traduisent les difficultés d’un secteur d’activité en pleine expansion, mais dont les assises sont encore bien fragiles. La formation donnée à l’école de laiterie vise d’abord à établir une certaine uniformité dans les procédés de transformation employés par les fabricants de fromage et de beurre, et aussi à assurer le maintien des normes de qualité des produits laitiers transformés au Québec. Deux ans avant l’accession de Dalaire à la tête de l’établissement, le gouvernement provincial a fait reconstruire l’école pour mieux répondre à l’augmentation de la clientèle. À partir de 1909, l’établissement, dirigé par Dalaire, prend encore plus d’importance dans le secteur de la transformation laitière, car le gouvernement oblige tous les fabricants de fromage et de beurre à obtenir un certificat de compétence de l’école de laiterie. En 1915, la loi devient encore plus rigoureuse, puisque ce sont plutôt des certificats d’essayeurs de lait ou de crème que les fabricants doivent désormais acquérir. Le nombre des élèves croît donc sans cesse. Dans l’avant-dernier rapport qu’il soumet au ministre de l’Agriculture (1917–1918), Dalaire mentionne qu’en général de 300 à 400 élèves environ ont fréquenté l’école annuellement, mais que la plus forte assistance à été enregistrée en 1913 avec 658 inscriptions. L’école confère des certificats d’experts-essayeurs, des diplômes de fabricants de beurre et de fromage, ainsi que des diplômes d’inspecteurs de beurre et de fromage.
Comme secrétaire de la Société d’industrie laitière, Dalaire poursuit essentiellement les mêmes objectifs de diffusion des connaissances agricoles et de développement des activités laitières, mais en s’adressant à un public plus large. Cette organisation intervient de plusieurs façons dans le développement de l’industrie laitière au Québec : elle se charge d’envoyer des inspecteurs dans les fabriques ; elle a mis sur pied, dès 1890, des syndicats de fabricants ; en 1892, pendant la présidence de l’abbé Théophile Montminy*, c’est elle qui a fondé, à Saint-Hyacinthe, l’école de laiterie ; enfin, elle organise des réunions publiques et un congrès annuel. Au nombre des membres de la Société d’industrie laitière, on compte des producteurs, des transformateurs et des distributeurs de produits laitiers.
En plus de ses charges professionnelles, Dalaire s’engage dans un nombre considérable d’autres entreprises, mais toutes reliées au monde agricole. Son action la plus remarquée dans ce domaine est sans doute la création des jardins scolaires. En tant qu’ancien instituteur, et surtout fervent des sciences naturelles, au dire de l’agronome Jean-Charles Magnan, Dalaire défend, à compter de 1904, l’idée de créer des jardins scolaires. Pour lui, l’école de rang est le seul lieu où les cultivateurs peuvent s’initier, encore enfants, aux principes de base de leur métier, d’autant plus que la plupart d’entre eux arrêtent de fréquenter l’école après la cinquième année. À l’occasion des congrès d’institutrices, dont il a la responsabilité à titre d’inspecteur des écoles ménagères, il sait propager l’idée que le jardin scolaire doit servir à inculquer aux élèves « l’amour et l’intérêt pour leur future profession ». Le succès de cette initiative, dont Dalaire demeure en outre le principal organisateur jusqu’à sa retraite, est tel qu’en 1919, dans tout le Québec, environ 18 000 enfants ont chacun leur jardin scolaire. Au début des années 1910, le travail de pédagogue qu’accomplit Dalaire auprès de la classe agricole prend une nouvelle forme lorsqu’il devient directeur des convois d’enseignement. Ces convois, qui constituent un des éléments de la politique de diffusion des connaissances agricoles du gouvernement de Québec, sont organisés avec la collaboration des compagnies de chemin de fer et des conférenciers agricoles. De cette façon, il est possible de parcourir un territoire immense et d’atteindre des communautés rurales qui autrement seraient difficilement accessibles.
Le nom de Dalaire est aussi associé à l’organisation du Mérite agricole, dont il est secrétaire des débuts en 1890 jusqu’en 1901. À la suite d’une demande de Barnard, qui désire voir s’inscrire des concurrents des comtés de Deux-Montagnes et de Laval au premier concours tenu en 1890, Dalaire décide de s’engager activement dans cet organisme ; il parcourt les deux comtés afin de convaincre les agriculteurs de participer à ce concours. Le premier médaillé d’or de l’histoire du Mérite agricole, Charles Laplante, dit Champagne, vient du comté de Deux-Montagnes. De plus, Dalaire collabore au Journal d’agriculture illustré pendant presque toute sa carrière active dans le monde agricole. Les articles qu’il signe font généralement état de ses visites ou des conférences prononcées dans les différents cerclés ou sociétés agricoles de la province. Ses textes abordent également des questions plus pratiques, telles que les marchés agricoles ou les techniques d’élevage et de culture.
Homme d’une activité débordante, Dalaire est aussi secrétaire du Conseil d’agriculture de la province de Québec pendant quatre ans, administrateur de la Société générale des éleveurs d’animaux de race pure de la province de Québec, fondée en 1895, premier secrétaire de la Société pour l’amélioration des chemins de la Puissance de Québec, créée en 1895 (mais il cédera presque aussitôt sa place à Barnard), président de l’Union expérimentale des agriculteurs de la province de Québec, mise sur pied en 1909, et premier secrétaire de la Société coopérative agricole des producteurs de semences de Québec, lancée en décembre 1914. Il participe aussi à la fondation du Syndicat des cultivateurs de la province de Québec en 1892 et, en 1913, à celle du Comptoir coopératif de Montréal. Le 10 janvier 1919, à la toute fin de sa carrière, il est élu président de la Confédération des sociétés coopératives paroissiales de la province de Québec, fondée ce jour-là à Saint-Hyacinthe. Sa présence à ce poste est toutefois très brève, puisqu’il meurt subitement un mois plus tard.
Quelques écrits, des ouvrages spécialisés pour la plupart, contribuent également à mettre en lumière l’importance de l’action de Dalaire dans le développement de l’agriculture québécoise à la fin du xixe siècle. Il a rédigé plusieurs traités agricoles, dont les Mauvaises Herbes dans la province de Québec et différents moyens de les détruire (1904), l’Égouttement du sol : le drainage (Québec [1905]), Comptabilité agricole et domestique à l’usage des écoles primaires et des cultivateurs (Québec, 1906), le Drainage superficiel et souterrain, les Insectes utiles et les Insectes nuisibles, et les Jardins scolaires. En outre, durant les années où il a été rattaché au département de l’Agriculture, Dalaire a signé plusieurs bulletins techniques destinés à la classe agricole.
Afin d’illustrer l’ampleur du travail qu’Omer-Edmond Dalaire a accompli, Chapais signale dans l’hommage qu’il fait de ce dernier dans le trente-neuvième rapport annuel de la Société d’industrie laitière que, pour le remplacer à la tête des deux importants organismes qu’il a dirigés de 1907 jusqu’à sa retraite, le département de l’Agriculture a nommé deux titulaires, soit A.-T. Charron, comme directeur de l’école de laiterie de Saint-Hyacinthe, et Alexandre Dion, comme secrétaire de la Société d’industrie laitière.
AC, Montréal, État civil, Catholiques, Sainte-Rose (Laval, Québec), 22 févr. 1919.— ANQ-M, CE6-13, 22 mai 1856 ; CE6-22, 5 sept. 1881.— Le Courrier de Saint-Hyacinthe (Saint-Hyacinthe, Québec), 22 févr., 1er mars 1919.— La Presse, 11 janv., 20 févr., 13 déc. 1919.— Gilles Bachand, « Aperçu historique de l’école de laiterie », la Liaison (Saint-Hyacinthe), mars 1992 : 3s. ; Une école de laiterie à Saint-Hyacinthe en 1892, pourquoi ? (Saint-Hyacinthe, 1991).— J.-C. Chapais, « Feu Omer-Édouard Dalaire », le Journal d’agriculture (Montréal), 22 (1918–1919) : 197.— DPQ, 150.— Bruno Jean, « les Idéologies éducatives agricoles (1860–1890) et l’Origine de l’agronomie québécoise » (mémoire de m.a., univ. Laval, 1977).— Firmin Létourneau, Histoire de l’agriculture (Canada français) (Montréal, 1959), 220, 233, 254–256, 259, 262, 274s., 300.— J.-C. Magnan, le Monde agricole (Montréal, 1972), 27s.— M.-A. Perron, Un grand éducateur agricole : Édouard-A. Barnard, 1835–1898 ; étude historique sur l’agriculture de 1760 à 1900 ([Montréal], 1955).— J.-B. Roy, Histoire du Mérite agricole (2e éd., mise à jour par André Richard, Québec, 1985), 23s.— Soc. d’industrie laitière et École de laiterie de la prov. de Québec, Rapport (Québec), 1907–1919.
Régis Thibeault, « DALAIRE (Dallaire), OMER-EDMOND (baptisé Edmond-Olivier) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 4 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/dalaire_omer_edmond_14F.html.
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Auteur de l'article: | Régis Thibeault |
Titre de l'article: | DALAIRE (Dallaire), OMER-EDMOND (baptisé Edmond-Olivier) |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1998 |
Année de la révision: | 1998 |
Date de consultation: | 4 déc. 2024 |