EBY, CHARLES SAMUEL, missionnaire méthodiste, auteur et éditeur, né le 3 novembre 1845 à Goderich, Haut-Canada, fils de Jonas Eby et de Hannah Fessant ; le 15 juin 1871, il épousa à Brooklyn (New York) Ellie (Nellie) Keppel, et ils eurent trois filles et trois fils ; décédé le 20 décembre 1925 à Saskatoon.

Charles Samuel Eby était issu d’Allemands établis en Pennsylvanie. Il se convertit à 11 ans au cours d’une assemblée en plein air à Elora, dans le Haut-Canada, où sa famille s’était installée. Vers l’âge de 15 ans, il amorça un apprentissage de deux ans chez un sellier de Guelph, tout en continuant à s’instruire. Il obtint ensuite un brevet d’instituteur, enseigna un an près de Guelph et fut exhorter à l’église wesleyenne de cette localité.

Eby commença à prêcher à 19 ans et, en 1865, l’Église méthodiste wesleyenne en Canada l’autorisa à fréquenter le Victoria College de Cobourg afin de se préparer au ministère. Au bout de deux ans, il se rendit en Europe, où il étudia l’allemand, le français et la théologie. De retour au Victoria College en 1870, il y termina ses études au printemps suivant (un doctorat en théologie lui serait décerné en 1886). Peu après, il devint ministre et épousa Ellie Keppel.

Eby desservit les missions méthodistes allemandes de Preston (Cambridge) et de Paris, en Ontario, de 1871 à 1874, puis celles de Hamilton de 1874 à 1876. Il visita toutes les missions allemandes de la province et prononça de nombreuses allocutions sur ses voyages en Europe afin d’amasser des fonds pour ces tournées. Considéré comme un excellent conférencier et un prédicateur émouvant, il soutenait sans réserve l’évangélisme traditionnel. En 1872, il lança à Preston un bihebdomadaire, Der Canadische Evangelist (l’Évangéliste canadien), et en assura personnellement la survie jusqu’en 1875 malgré des pertes financières. Cependant, ce périodique ne reçut jamais bon accueil, et les campagnes de financement et de propagande menées par Eby en dehors des circuits missionnaires réguliers dérangeaient bien des prédicateurs itinérants.

En 1876, Eby fut affecté au Japon, où l’Église œuvrait depuis 1873 [V. George Cochran*]. Les autorités missionnaires croyaient que son zèle déclencherait un mouvement de ferveur là-bas et ranimerait l’esprit chrétien au Canada. En 1878, après avoir acquis des rudiments de japonais, Eby ouvrit une mission à Kōfu. Au début, les conversions furent rares, mais ses sermons et ses conférences sur la religion et la culture occidentales attiraient des foules nombreuses. En outre, il participait à la formation d’un clergé nippon à Tokyo.

Fervent adepte de l’évangélisation, Eby estimait que les obstacles réels à la diffusion de la civilisation chrétienne étaient le scepticisme et le sécularisme inhérents à la science et à la philosophie modernes de l’Occident. Pour lui, la voie la plus prometteuse consistait à attirer les membres les plus brillants de la classe des samouraïs en présentant le christianisme à la fois comme un système éthique et moral logique et comme une expérience spirituelle. De 1881 à 1883, il publia à Yokohama un mensuel destiné à l’intelligentsia japonaise mais lu surtout par la communauté missionnaire, le Chrysanthemum.

Au début de 1883, une série de conférences sur la théologie et la philosophie occidentales, prononcée par Eby à Tokyo et publiée en anglais (Christianity and humanity) et en japonais, remporta un franc succès. Selon lui, ces conférences amenèrent les autorités nippones à se montrer plus tolérantes envers le christianisme, favorisèrent un renouveau spirituel et permirent à la mission de Kōfu d’atteindre l’autonomie financière. Une autre conférence donnée au début de 1884 parut sous le titre The immediate Christianization of Japan : prospects, plans, results. En congé en 1885–1886, Eby entreprit une épuisante tournée en Amérique du Nord pour promouvoir les missions méthodistes. En 1886, il donna une allocution importante sur la nécessité d’affecter plus de ressources aux missions d’outre-mer ; elle fut publiée à Toronto sous le titre Methodism and the missionary problem. Avant de quitter le Canada, Eby commença à faire campagne pour deux projets auxquels il consacrerait la plus grande part de ses énergies pendant le reste de son séjour au Japon.

Selon Eby, le meilleur moyen de convertir le Japon était de fonder une grande mission vouée à l’éducation et à l’assistance sociale près de l’université impériale de Tokyo, où pourraient avoir lieu des conférences spéciales sur le christianisme. Après diverses modifications dont les buts étaient d’adapter les lieux aux pratiques de l’évangélisme traditionnel et aux offices réguliers et de donner un rôle plus actif aux collaborateurs nippons, le Central Tabernacle ouvrit ses portes en janvier 1891. Tout en le dirigeant, Eby publiait un périodique qui en décrivait les activités, Japan for Christ. Pour réaliser son deuxième projet, Eby, sachant que le conseil des missions au Canada n’avait pas les moyens d’envoyer de nouvelles recrues, réclamait « une troupe supplémentaire de missionnaires autonomes qui travailleraient en harmonie avec la mission et enseigneraient pour payer les dépenses ». Quinze hommes et une femme feraient partie de cette « brigade légère » de soldats du Christ qui œuvrerait au Japon jusqu’au début des années 1890.

La plupart des campagnes d’Eby engendrèrent des différends. Le Central Tabernacle dépensait plus de un huitième du budget des missions japonaises mais exerçait peu d’influence sur l’intelligentsia du pays. En outre, Eby se révéla un piètre administrateur, et ses campagnes indépendantes de financement embarrassaient le conseil des missions. De même, le conseil n’avait aucune autorité sur le groupe des missionnaires autonomes mais craignait de devoir en assumer les dépenses advenant un problème. Eby se souciait peu de l’avis d’autrui. Ses relations avec les autorités méthodistes au Canada et avec le clergé nippon, très nationaliste, étaient souvent tendues. En 1893, épuisé, il revint au Canada. Les controverses entourant la mission au Japon, aggravées par lui-même et ses adeptes, atteignirent alors leur point culminant. À la fin de 1895, Eby et d’autres furent retirés de la mission.

En 1896, Eby accepta l’invitation de l’église méthodiste Homer Street de Vancouver, qui comptait des Japonais et des Chinois parmi ses membres actifs. Trois ans plus tard, il devint ministre d’une autre congrégation diversifiée, celle de l’église Agnes Street à Toronto. Il occupa ensuite divers postes, notamment à Bracebridge de 1903 à 1905 et à Kingston de 1905 à 1907. Puis, durant un an, il fut secrétaire pour l’Asie orientale à l’International Reform Bureau, qui combattait la prostitution et l’usage de l’alcool et de l’opium. En 1908, il accepta l’invitation de l’église congrégationaliste Zion de Toronto. Un an après, il fonda le People’s Institute, Église socialiste prônant la fraternité, l’action sociale et la paix. Après la mort de sa femme en 1912, il vécut chez une de leurs filles à Saskatoon.

Charles Samuel Eby avait des talents exceptionnels, des compétences certaines et beaucoup d’énergie. Il exerça une influence déterminante sur les débuts de la mission méthodiste au Japon et encouragea beaucoup les Canadiens à soutenir les œuvres missionnaires. En outre, il promut vigoureusement l’œcuménisme dans les affaires ecclésiastiques et s’employa à faire reconnaître le Japon comme membre à part entière de la communauté des nations. Comme le disait une nécrologie, c’était un grand érudit, un prédicateur passionné et un missionnaire courageux.

Neil Semple

Les ouvrages de Charles Samuel Eby intitulés Christianity and humanity : a course of lectures delivered in Meiji kuaido, Tokio, Japan, et The immediate Christianization of Japan : prospects, plans, results ont été publiés à Yokohama en 1883 et 1884 respectivement. Eby a aussi rédigé How shall we preach Christ ? ([Yokohama, 1885]), Jikken Shingaku/Experimental theology or, the Methodist standard of preaching, ouvrage qu’il a publié en japonais (Tokyo, 1888), The Forward Movement in Japan : an address to the Methodist Church (Toronto, 1889) et The world problem and the divine solution (Toronto, 1914).

EUC-C, Biog. file ; Fonds 14/2/2, 78.083C ; Fonds 14/2/4, 78.084C, 78.098C ; Fonds 14/3/3, 78.092C.— Christian Guardian, 1871–1908.— G. H. Cornish, Cyclopædia of Methodism in Canada [...] (2 vol., Toronto et Halifax, 1881–1903).— E. E. Eby et J. B. Snyder, A biographical history of early settlers and their descendants in Waterloo Township, with Supplement, E. D. Weber, édit. (Kitchener, Ontario, 1971).— Église méthodiste (Canada, Terre-Neuve, Bermudes), Missionary Soc., Annual report (Toronto), 1884–1895 ; Woman’s Missionary Soc., Annual report (Hamilton, Ontario ; Toronto), 1884–1896.— Église méthodiste du Canada, Missionary Soc., Annual report (Toronto), 1874–1884.— Église méthodiste wesleyenne en Canada, Missionary Soc., Annual report (Toronto), 1871–1874.— A. H. Ion, « Canadian missionaries in Meiji Japan : the Japan Mission of the Methodist Church of Canada (1873–1889) » (mémoire de m.a., McGill Univ., Montréal, 1972).— G. R. P. et Howard Norman, One hundred years in Japan, 1873–1973 (2 vol., texte dactylographié, EUC, Div. of World Outreach, [Toronto], 1981).— Neil Semple, The Lord’s dominion : the history of Canadian Methodism (Montréal et Kingston, Ontario, 1996).

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Neil Semple, « EBY, CHARLES SAMUEL », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 2 oct. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/eby_charles_samuel_15F.html.

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