HÉBERT, CHARLES-POLYCARPE, épicier, grossiste, né le 20 avril 1834 à Saint-Charles-sur-Richelieu, Bas-Canada, fils d’Amable Hébert, cultivateur, et d’Adélaïde Loiselle ; le 12 janvier 1853, il épousa à Montréal Rose Busseau, et ils eurent trois fils et trois filles, puis le 12 octobre 1881, au même endroit, Marie-Eugénie-Philomène Fournier-Préfontaine, veuve de Charles-Adolphe Cypiol, et de ce mariage ne naquit aucun enfant ; décédé le 17 juillet 1906 à Montréal.

Fils d’un patriote tué à la bataille de Saint-Charles-sur-Richelieu, le 25 novembre 1837, Charles-Polycarpe Hébert connaît une enfance difficile. Il n’aurait fréquenté l’école que de l’âge de sept à dix ans. En 1844, il erre dans les rues de Montréal, où il se déniche un emploi dans une petite épicerie de la rue Notre-Dame, près du carré Chaboillez. Après diverses expériences dans d’autres magasins, il entre en 1857 à titre de commis chez Victor Hudon*, qui se spécialise dans « l’importation et l’exportation d’un large éventail de marchandises ». Le métier de commis est ardu. Les journées sont longues : de six heures du matin à dix heures du soir, quand ce n’est pas minuit, et le travail est peu rémunéré.

En mai 1865, Hébert s’associe avec le fils de Victor Hudon, Joseph, et Ananie-Siméon Hamelin pour faire le commerce d’épicerie, de provisions, de vins et de liqueurs, sous la raison sociale de Joseph Hudon et Compagnie. Hudon reçoit et expédie la marchandise, Hamelin s’occupe de la comptabilité, et Hébert vend et achète dans les encans comme le veut la coutume de l’époque ; un homme de magasin et un commis complètent le personnel.

La compagnie connaît une grande expansion. En 1883, Hamelin prend sa retraite, après avoir accumulé un capital important ; Hudon et Hébert forment alors une nouvelle société avec Léandre Brault, comptable, et Irénée Jarret, commis, sous la raison sociale de Hudon, Hébert et Compagnie ; Hébert profite de l’occasion pour faire entrer ses deux fils, Albert et Zéphirin, à titre de commis dans l’entreprise. La maison continue de prendre de l’expansion et, en 1893, son chiffre d’affaires annuel dépasse 1 250 000 $, ce qui en fait l’une des plus importantes maisons d’épicerie au Canada. Les associés possèdent l’agence exclusive des produits de la H. J. Heinz Company, des eaux-de-vie de la maison Boutelleau et Compagnie et de la distillerie Corby. Ils visitent de nombreuses entreprises du même genre que la leur en Amérique. Le 1er mai de cette année-là, Albert et Zéphirin deviennent associés et, l’année suivante, la firme procède à l’agrandissement et à la modernisation de ses locaux. Léandre Brault, devenu le gendre de Charles-Polycarpe, s’occupe de la comptabilité, tandis qu’Albert, à la direction générale, gère le département des douanes et les achats avec l’assistance de son frère Zéphirin. Au décès de Jarret, en 1896, les cinq associés continuent ensemble le commerce. Dix ans plus tard, le 22 janvier 1906, l’entreprise est constituée en société à responsabilité limitée sous le nom de Hudon, Hébert et Compagnie Limitée, et Hébert en devient président.

Charles-Polycarpe, un homme « grand, bien bâti, [...] d’une intelligence puissante [...] sobre dans son discours », ne vit que pour son commerce et n’éprouve guère d’attraits pour la vie politique. Néanmoins, à mesure que ses fils sont capables d’assumer la bonne marche de l’entreprise, il participe davantage à la vie montréalaise. Avec un groupe d’hommes d’affaires, tels Andrew Allan, Andrew Frederick Gault et Alexander Walker Ogilvie, il a fondé en 1883 la Citizens Gas Company of Montreal. Il est premier vice-président du Bureau de commerce en 1892 et 1893 et vice-président de la Montreal Wholesale Grocers’ Association de 1891 à 1895. Vice-président de la Banque d’épargne de la cité et du district de Montréal de 1898 à 1906, il occupe aussi, à partir de 1898, le poste de président du bureau de direction de l’hôpital Notre-Dame. Il se dévoue jusqu’à la fin de sa vie pour cet établissement, dont il a été l’un des fondateurs en 1880, mettant à sa disposition de fortes sommes d’argent grâce à des souscriptions qu’il recueille personnellement.

Quand il succombe à une tumeur au foie, le 17 juillet 1906, Charles-Polycarpe Hébert laisse une entreprise dont le chiffre d’affaires sera évalué par William Henry Atherton, en 1914, à 5 millions de dollars et qui comptera alors 170 employés et 25 voyageurs. Hébert représente un bon exemple du dynamisme des hommes d’affaires canadiens-français qui ont contribué au développement commercial de Montréal. Avec N. Quintal et Fils, Laporte, Martin et Compagnie, la maison Hudon, Hébert et Compagnie a été un chef de file qui, dans le dernier tiers du xixe siècle, a hissé Montréal au rang de haut lieu du commerce des produits alimentaires au Canada et assuré la prédominance des hommes d’affaires francophones dans ce domaine.

Michèle Brassard et Jean Hamelin

AC, Montréal, Cour supérieure, déclarations de sociétés, 2, no 3256 (1865) ; 10, no 641 (1883) ; 16, nos 1310–1311 (1893) ; 19, no 373 (1896) ; 26, nos 66, 97 (1906) ; État civil, Catholiques, Cimetière Notre-Dame-des-Neiges (Montréal), 20 juill. 1906.— ANQ-M, CE1-51, 12 janv. 1853, 12 oct. 1881 ; CE2-10, 20 avril 1834.— La Presse, 31 mars 1898, 17 juill. 1906.— Le Prix courant (Montréal), [15 nov.] 1904 : 114–116.— Annuaire, Montréal, 1865–1906.— Atherton, Montreal, 3 : 328s.— S. [R.] Bellingham, Some personal recollections of the rebellion of 1837 in Canada (Dublin, 1901 ; réimpr., 1902).— The book of Montreal, a souvenir of Canada’s commercial metropolis, E. J. Chambers, édit. (Montréal, 1903).— Canadian album (Cochrane et Hopkins), 2 : 333.— Ægidius Fauteux, Patriotes de 1837–1838 (Montréal, 1950).— Industries of Canada, city of Montreal, historical and descriptive review, leading firms and moneyed institutions (Montréal, 1886), 104.— Lamothe, Hist. de Montréal, 762s.— Albert LeSage, « Un bienfaiteur de l’hôpital Notre-Dame ; feu M. C. P. Hébert », l’Union médicale du Canada (Montréal), 36 (1907) : 182–184.— T. T. Smyth, The first hundred years : history of the Montreal City and District Savings Bank, 1846–1946 (Montréal, [1946]).— Terrill, Chronology of Montreal.

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Michèle Brassard et Jean Hamelin, « HÉBERT, CHARLES-POLYCARPE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 12 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/hebert_charles_polycarpe_13F.html.

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Auteur de l'article:    Michèle Brassard et Jean Hamelin
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1994
Année de la révision:    1994
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