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LEFEBVRE D’HELLENCOURT, HENRI (baptisé Henri-Marie-Victor Lefebvre, il ajouta d’Hellencourt à son patronyme en 1876), officier, colon, rédacteur en chef et agent consulaire, né le 11 septembre 1862 à Paris, fils d’Henri-Émile Lefebvre, chef du cabinet du préfet de police, et de Louise Kreusler (Kraeuseler) ; le 26 août 1891, il épousa à Montréal Louise-Eugénie Bellard, divorcée de Louis-Ernest-Hilaire-Aimé Renard, et ils n’eurent pas d’enfants ; décédé le 8 mai 1940 à Thouars, France.

Henri Lefebvre d’Hellencourt appartient à une famille de fonctionnaires ; son père terminera sa carrière comme percepteur. Il a deux sœurs, Émilie et Marie, et un frère, Charles. Il fait ses études secondaires et supérieures dans deux établissements français prestigieux : le collège Notre-Dame de Sainte-Croix de Neuilly (Neuilly-sur-Seine) de 1872 à 1879, puis le lycée Henri-IV (classes préparatoires) à Paris de 1879 à 1881. Du 26 octobre 1881 au 1er octobre 1883 (promotion d’Égypte), il fréquente l’école spéciale militaire de Saint-Cyr, d’où il sort avec le grade de sous-lieutenant. Maniant avec élégance la langue française, il connaît aussi l’allemand et l’anglais. Promu lieutenant en 1887, Lefebvre d’Hellencourt réussit le concours écrit de l’École supérieure de guerre, mais échoue à l’oral en avril 1888.

En mai, Louise-Eugénie Bellard, récemment séparée de son mari, vient résider à Tours, où Lefebvre d’Hellencourt est en garnison depuis juillet 1887. Les deux jeunes gens nouent une relation sentimentale qui entraîne une crise familiale chez les Lefebvre d’Hellencourt et conduit le lieutenant à démissionner de l’armée en 1891. Ils émigrent alors à Montréal, où un pasteur méthodiste les marie le 26 août. Le couple se retrouve au Manitoba, à Sainte-Anne-des-Chênes, à la fin du mois d’octobre. La mère d’Henri fait avertir par un prêtre français le curé de la paroisse, Louis-Raymond Giroux, du statut de divorcée de Louise-Eugénie. L’archevêque de Saint-Boniface, Mgr Alexandre-Antonin Taché*, interdit au jeune couple de fréquenter l’église paroissiale en 1892. Cette affaire empêchera vraisemblablement Lefebvre d’Hellencourt de mener une carrière politique. Ce dernier cultive une concession statutaire entre 1894 et 1897, puis s’établit à Winnipeg.

Une crise scolaire secoue alors le Manitoba. À la suite de sa victoire aux élections fédérales de juin 1896, le premier ministre libéral sir Wilfrid Laurier* a négocié avec son homologue provincial Thomas Greenway* le règlement Laurier-Greenway, dénoncé par le nouvel archevêque de Saint-Boniface, Mgr Adélard Langevin*, mais toléré par le pape Léon XIII. Laurier a besoin d’un appui libéral francophone à Winnipeg pour soutenir sa politique de compromis face aux conservateurs de l’hebdomadaire francophone le Manitoba de Saint-Boniface (Winnipeg). Il trouve alors Lefebvre d’Hellencourt, qui le servira pendant toute sa carrière. Lefebvre d’Hellencourt devient le premier rédacteur de l’Écho de Manitoba, hebdomadaire fondé en janvier 1898 par des libéraux francophones et dont le tirage sera en moyenne de 1 400 exemplaires. Doté d’une culture générale et d’entregent, Lefebvre d’Hellencourt comprend rapidement et expose clairement les questions politiques, religieuses et sociales. Il s’emploie à expliquer la politique de Laurier tout en ménageant l’archevêché, qui lance tout de même contre lui un redoutable pamphlétaire, dom Paul Benoit*, et deux jeunes journalistes conservateurs, les frères Noël et Joseph Bernier*. Mais les intrigues menées par les politiciens libéraux, divisés en clans rivaux et avides de s’emparer de l’Écho de Manitoba pour soutenir leurs ambitions, ne sont pas moins dangereuses pour le rédacteur que, de plus, surveille le ministre fédéral libéral de l’Intérieur et surintendant général des Affaires indiennes, le Manitobain Clifford Sifton*. De manière générale, Lefebvre d’Hellencourt se tient au-dessus des clans locaux. Il relève directement de Laurier, ce qui irrite certains politiciens.

Lefebvre d’Hellencourt peut compter sur l’appui moral et financier de Laurier, qui lui écrit le 4 juin 1900, à propos du règlement scolaire : « Je suis avec plus d’intérêt que jamais votre polémique sur cette question dans “L’Echo de Manitoba”. Je ne saurais trop vous dire à quel point j’approuve et j’admire votre manière de la traiter. » Le premier ministre lui propose, le 4 août, « de faire de la politique [sa] carrière ». Lefebvre d’Hellencourt décline l’invitation en raison du statut matrimonial de sa femme. S’il l’avait acceptée, Sifton aurait alors appuyé sa candidature dans la circonscription fédérale de Provencher.

Lefebvre d’Hellencourt aborde des sujets internationaux. Il soutient, par exemple, la position de Laurier sur la défense du Canada relativement à l’impérialisme du secrétaire d’État aux Colonies Joseph Chamberlain lors de la conférence coloniale de 1902 [V. Les relations avec l’Empire britannique] : pour lui, le Canada doit combattre l’impérialisme militariste de Chamberlain et refuser son projet de fédération impériale, qui menacerait l’autonomie des dominions. C’est une attitude en accord avec son passé de Saint-Cyrien, à une époque de forte tension coloniale franco-britannique.

Le journaliste essaie de jouer un rôle quasi diplomatique : en janvier 1902, Lefebvre d’Hellencourt est nommé délégué de l’Alliance française à Winnipeg et crée un cercle littéraire. En décembre, appuyé par Laurier et le consul général de France à Québec, Alfred Kleczkowski, il devient agent consulaire de France à Winnipeg, à la grande fureur des conservateurs et de quelques libéraux. Il y voit un moyen d’augmenter la portée de l’Écho de Manitoba, mais il doit aussi tempérer les querelles idéologiques sur la République radicale qui divisent les immigrés français.

Face au succès des libéraux provinciaux aux élections de 1903 dans les circonscriptions francophones, qu’il attribue à l’influence de l’hebdomadaire, Mgr Langevin décide, en septembre 1903, « d’empêcher la diffusion du journal L’Écho du Manitoba, qui est rédigé dans un très mauvais esprit ». Le clergé se met à l’œuvre pour faire diminuer le lectorat de l’hebdomadaire, qui a régulièrement dénoncé l’intervention de ce même clergé en faveur des conservateurs pendant la campagne. Dom Benoit, alors prêtre de la paroisse Notre-Dame-de-Lourdes, renvoie les numéros du périodique à l’expéditeur au lieu de les distribuer aux abonnés.

Lassé des attaques personnelles venant des conservateurs comme des libéraux, Lefebvre d’Hellencourt a cherché, en vain, à obtenir un poste fédéral en France, comme agent commercial à Paris ou comme agent d’immigration. Il demande aussi à Laurier, en 1902, une place dans un éventuel « journal libéral français à Montréal ». Le premier ministre tient cependant à le garder à Winnipeg pour contrôler les libéraux franco-manitobains et Sifton, dont le rédacteur déplore le peu d’empressement à attirer les francophones dans les Prairies. À la suite de la démission de Sifton, le 28 février 1905, Lefebvre d’Hellencourt reconnaît toutefois que le ministre a beaucoup contribué à développer l’immigration dans l’Ouest.

Devant l’opposition de plus en plus vive du clergé, des conservateurs et des responsables libéraux franco-manitobains (le député provincial Horace Chevrier, le député fédéral Joseph-Ernest Cyr et l’organisateur Joseph-François Prud’homme, qui veulent diriger l’Écho du Manitoba), et face à l’ostracisme social qui frappe son épouse, Lefebvre d’Hellencourt demande à Laurier un poste de rédacteur à Montréal. Il quitte Winnipeg, la rédaction de l’hebdomadaire (dont seulement deux éditions paraîtront après son départ) et son poste d’agent consulaire en juillet 1905, puis fait un bref passage à la rédaction du Temps d’Ottawa, avant de devenir directeur politique du Soleil de Québec à partir du 1er juillet 1906. Le premier ministre libéral de la province de Québec, Lomer Gouin*, contrôle le journal avec Laurier, et, à l’instar du maire de Québec, Georges Garneau*, il apprécie ses écrits. Ce n’est pas le cas d’Henri Bourassa* et des nationalistes, comme le montre l’incident du 5 août 1907, à Québec, dans le quartier Saint-Roch, fief libéral où Bourassa tient une assemblée. Le Soleil prévient la Ligue nationaliste canadienne [V. Olivar Asselin] qu’elle n’y est pas la bienvenue. À la suite de la séance houleuse, Lefebvre d’Hellencourt et Charles-Alleyn Taschereau, avocat et militant nationaliste, échangent quelques horions sur la terrasse du château Frontenac ; un tollé s’ensuit dans la presse canadienne.

Lefebvre d’Hellencourt et sa femme accompagnent Laurier à la Conférence impériale de Londres de 1911 et au couronnement de George V. Pendant la Première Guerre mondiale, l’ancien Saint-Cyrien écrit des articles remarqués sur les opérations militaires. Patriote français, il se montre favorable à la conscription, contrairement à Laurier. Il doit d’ailleurs prendre un mois de congé, en juin 1917, pendant que le premier ministre conservateur, sir Robert Laird Borden, présente le projet de loi concernant le service militaire à la Chambre des communes. Il limite ensuite ses activités à ses chroniques sur la guerre. Il quitte son poste à la fin de 1919. En octobre 1920, avec l’appui de Gouin, Lefebvre d’Hellencourt devient rédacteur au journal libéral la Presse de Montréal, où il restera jusqu’en 1928. Le gouvernement français le nomme chevalier de l’ordre de la Légion d’honneur le 26 juillet.

Victime d’un accident vasculaire cérébral, Henri Lefebvre d’Hellencourt prend sa retraite en 1928 et, le 14 février 1929, embarque avec Louise-Eugénie à New York pour la France sur le paquebot De Grasse. Il retrouve sa mère avec laquelle il s’est réconcilié depuis longtemps. Jusqu’à sa mort en 1940, il partage son temps entre Paris et Thouars, où sa femme a conservé des attaches familiales. À ses talents de journaliste, il joint aussi ceux d’aquarelliste. La carrière étonnante de ce Français a fait de lui un proche de Laurier en politique. Le journaliste représentait une force sur laquelle le premier ministre pouvait compter.

Bernard Pénisson

Henri Lefebvre d’Hellencourt a aussi écrit l’Avenir de Québec : texte d’une conférence donnée le 16 décembre 1913 à l’académie commerciale de Québec ([Québec ?, 1913 ?]) et le Scandale Forget : articles publiés dans le Soleil depuis le 30 décembre 1912 ([Québec ?, 1913 ?]).

AM, GR 1603.— Arch. de la Soc. hist. de Saint-Boniface (Winnipeg), Fonds Corporation archiépiscopale catholique romaine de Saint-Boniface, sér. Alexandre-Antonin Taché ; sér. Louis-Philippe-Adélard Langevin ; Fonds Paul Benoît c.r.i.c.— Arch. de Paris, « Actes d’état civil », 6e arrondissement, 11 juill. 1861, no 470 ; 12 sept. 1862, no 2322 : archives.paris.fr/s/4/etat-civil-actes/? (consulté le 13 janv. 2020).— Arch. départementales, Deux-Sèvres (Niort, France), « Reg. paroissiaux et d’état civil », Saint-Martin-de-Mâcon, 17 avril 1882 : archives-deux-sevres-vienne.fr/archive/resultats/etatcivil/n:100?type=etatcivil (consulté le 13 janv. 2020).— Arch. du ministère des Affaires étrangères (Paris), Corr. consulaire, corr. politique, Montréal, I :18–19 ; Québec, XII : 375 ; Corr. politique, Angleterre, LXXXV : 32 ; XCIX : 179–180 ; Corr. politique et commerciale, dite « Nouvelle série » (1896–1918), Canada NS, XIX : 5–7.— BAC, R7693-0-0 ; R10811-0-X.— BAnQ-CAM, CE601-S103, 26 août 1891.— BAnQ-Q, P1000, S3, D961.— L’Écho du Manitoba (Winnipeg), 1898–1905.— La Presse, 1920–1928.— Le Soleil, 1906–1919.— Bernard Pénisson, « Henri d’Hellencourt et les Métis, 1898–1905 », Cahiers franco-canadiens de l’Ouest (Winnipeg), 2 (1990) : 5–20 ; Henri d’Hellencourt : un journaliste français au Manitoba (1898–1905) (Saint-Boniface [Winnipeg], 1986) ; « Louise d’Hellencourt et Christine de La Salmonière : deux Françaises au Manitoba », Cahiers franco-canadiens de l’Ouest, 12 (2000) : 153–179.— Rumilly, Hist. de la prov. de Québec, vol. 19, 22.

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Bernard Pénisson, « LEFEBVRE D’HELLENCOURT, HENRI (baptisé Henri-Marie-Victor Lefebvre) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 19 mars 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/lefebvre_d_hellencourt_henri_16F.html.

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Auteur de l'article:    Bernard Pénisson
Titre de l'article:    LEFEBVRE D’HELLENCOURT, HENRI (baptisé Henri-Marie-Victor Lefebvre)
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2022
Année de la révision:    2022
Date de consultation:    19 mars 2024