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RIGALI, MICHELE, statuaire et ornemaniste, né vraisemblablement le 26 mai 1841 en Toscane (Italie) ; en 1859, il épousa dans l’État de New York Mary Ann Putnam, et ils eurent au moins cinq enfants ; décédé le 5 juin 1910 à Québec.

On ignore à peu près tout sur Michele Rigali avant son arrivée à Québec. Originaire de la Toscane, Rigali émigre dans sa jeunesse aux États-Unis. En 1859, il se marie dans l’État de New York avec Mary Ann Putnam, et aux alentours de cette date, il s’enrôle dans l’armée américaine. Vers 1865, il embrasse le métier de statuaire, puis immigre au Canada et s’installe définitivement à Québec.

La présence de Rigali à Québec est signalée pour la première fois en 1868 dans l’annuaire de la ville, où il est désigné comme statuaire, domicilié au 148 de la rue Saint-Vallier, dans le quartier Saint-Roch. Au cours de la décennie suivante, il demeure sur la rue Saint-Joseph, dans le même quartier. De la fin de mai au début d’août 1874, Rigali fait paraître dans le Courrier du Canada un avis qui informe les « Messieurs du Clergé tant de la ville que ceux de la campagne, qu’il a constamment en mains, et qu’il exécute sur commande toute sorte d’Ornements pour Églises, plafonds, ainsi que Statues Blanches, en Couleurs et Dorées, de toute grandeur et de tous les goûts [...] il possède des modèles de tous genres, exemptant par là aux parties, la peine de payer pour les faire sculpter. »

Toujours en 1874, Rigali reçoit de la fabrique de Sainte-Agathe de Lotbinière un paiement de 350 $ pour des ouvrages non identifiés qui compteraient parmi ses premiers travaux réalisés au Québec. L’année suivante, il s’associe pour six ans avec son compatriote Lorenzo Nardi, sous la raison sociale de Rigali et Compagnie, fabricants et marchands statuaires. L’année 1877 devait sans doute lancer définitivement la carrière du sculpteur, avec la présentation de ses travaux au pavillon de l’industrie, à l’occasion de l’Exposition provinciale de Québec. En effet, ses ouvrages en plâtre sont fort remarqués comme en témoignent la publication d’un long et très élogieux article dans l’Événement du 27 septembre et, surtout, l’obtention de deux premiers prix dans la catégorie « meilleur dessin modèle en argile ou plâtre, ou sculpture pour les fins d’architecture ». Selon l’Événement, le fini soigné et digne de mention de certaines statues fait croire à du marbre et les ornements se posent sur le bois par un procédé tout à fait nouveau que Rigali a introduit au pays, résistent à toutes les températures et ont l’apparence de sculptures sur bois. Le 7 juin 1878, Rigali conclut un marché avec Joseph Richard, commerçant de Saint-Roch, pour la fabrication et la finition, à partir de deux modèles différents, de 600 statues de la « bonne Sainte Anne, en plâtre de Québec », qui doivent être livrées à la fin du mois de juillet.

Au début des années 1880, Rigali quitte le quartier Saint-Roch pour la haute ville. Jusqu’à la fin de sa vie, il aura sa résidence et son atelier-boutique sur la rue Saint-Jean, d’abord aux 110–112 de 1882 à 1890, ensuite aux 132–134 de 1891 à 1910. Il s’associe tour à tour avec Michel Guay, de Percé, entrepreneur d’églises et autres édifices, toujours sous le nom de Rigali et Compagnie (1881–1883), puis avec l’un ou l’autre de ses fils établis à Québec, sous le nom de Rigali et Fils : d’abord avec Levi (1883–1886), puis Michael (1886–1887), Johnny (1887–1893), et peut-être de nouveau avec Michael (1895–1897). La déclaration signée avec Michael le 17 juin 1886 précise que le père s’occupe des affaires extérieures et des contrats, tandis que le fils est responsable des affaires internes ainsi que de la fabrication proprement dite des statues et ornements.

Durant la décennie 1880, l’entreprise de Rigali remplit des commandes tant en ornementation qu’en statuaire pour diverses églises paroissiales : Saint-David-de-Lauberivière (1884), Saint-Jean et Saint-Laurent, île d’Orléans (1885), Sainte-Anne-de-Beaupré et Notre-Dame-de-la-Garde, à Québec (1886). Toutefois, ses contrats les plus importants restent sans contredit l’ensemble statuaire de la façade de l’église Saint-Jean-Baptiste de Québec, réalisé entre 1883 et 1885, ainsi qu’une partie de l’ornementation intérieure du palais de justice de cette ville, exécutée en 1887. À l’automne de 1885, les journalistes sont invités à visiter, à l’atelier des Rigali, « statuaires d’une réputation bien établie », l’exposition des 17 statues en ciment gris destinées à l’église Saint-Jean-Baptiste, « véritables œuvres d’art ». Le Journal de Québec du 17 octobre rapporte que « l’exécution de ces statues ne laisse rien à désirer au double point de vue de l’art et de la solidité, qui est comparable à celle que donnerait le granit, ou le marbre ». Sans aucun doute, cet ensemble statuaire constitue non seulement l’un des plus grands ensembles destinés à l’extérieur d’un édifice conçus au Québec durant cette période, mais également l’une des réalisations majeures dans la carrière de l’artiste, avec la décoration du palais de justice de Québec. L’Électeur du 26 avril 1887 ne tarit pas d’éloges à l’égard des ornementations en plâtre « faites de main de maître [...] bien supérieures à celles de l’hôtel du parlement [...] et qui font le plus grand honneur à son talent comme artiste ».

Au tournant de la décennie, Rigali commence à s’annoncer intensivement dans les journaux et périodiques de Québec, d’abord dans l’annuaire Cherrier, en 1889, ensuite et surtout dans l’Électeur et le Courrier du Canada, à compter de 1891, et enfin dans la Semaine commerciale en 1895. Ces avis publicitaires tout comme l’entête de son papier d’affaires, où il précise que sa maison a été fondée en 1865, mentionnent qu’il possède l’« assortiment de statues religieuses le plus beau et le plus complet de la Puissance » et qu’il a toujours de nouveaux modèles en cours d’exécution. Le statuaire offre alors le plus vaste choix de modèles de toutes les dimensions : Sacré-Cœur de Jésus, Sainte Vierge, saint Joseph, apôtres, saints, saintes, anges, crucifix, crèches de Noël, ainsi qu’un éventail de supports et d’ornements. Rigali vante aussi la grande variété de ses matériaux (plâtre, « plastique », ciment pour extérieur) et la qualité de ses revêtements (blancs, dorés ou décorés « à l’européenne »). Il informe sa clientèle qu’il a ajouté á ses spécialités la décoration des statues et des ornementations et que, pour ce faire, il a engagé un peintre décorateur européen. Rigali affirme avec insistance que ses statues décorées, entièrement exécutées chez lui, ont la même qualité que les statues européennes et qu’elles se vendent 40 % « meilleur marché » que celles importées d’Europe et 20°% de moins que celles fabriquées dans le dominion. À la fin de mars 1894, le statuaire mise en outre sur sa spécialité « des enduits et ornements de plâtre pour intérieur » et sur son expérience dans la décoration de plus de 40 églises et bureaux publics. Toutefois, comme on le constate à la lecture de ses réclames, la concurrence qui règne alors dans le domaine de la sculpture religieuse, et particulièrement dans celui de la statuaire, est très forte. Non seulement y a-t-il compétition entre les sculpteurs sur bois et les statuaires mouleurs locaux, mais les uns et les autres doivent affronter ensemble l’arrivée massive des importations des manufactures étrangères.

Au cours des années 1890, Rigali remplit de nombreuses commandes pour diverses paroisses du sud et de l’est du Québec. Dans le domaine de l’ornementation, il exécute des contrats, entre autres pour les églises Saint-François-Xavier, à Chicoutimi (1890), Notre- Dame-de-Foy, à Sainte-Foy (1890), Saint-Jean-Baptiste, à Québec (1890), Saint-Médard, à Warwick (1891), Saint-Alexandre, à Kamouraska (1894), pour une église de Cornwall, en Ontario (1895), pour la chapelle de la villa Manrèse (1896) et celle des Franciscaines missionnaires de Marie, à Québec (1899). Selon le Courrier du Canada du 17 juillet 1894, il se distingue par « un goût riche, une grande sureté d’exécution, un soin minutieux dans le choix de ses matériaux, enfin tout ce qui est de nature à rendre un ouvrage à la fois agréable à l’œil et résistable au temps ». Dans le domaine de la statuaire, Rigali livre diverses pièces, notamment aux églises de Saint-Apollinaire (1893), Sainte-Anne-de-Beaupré (1893), Saint-Jean-Baptiste, à Québec (1895), Sainte-Pétronille, île d’Orléans (1896) et Sainte-Julie (à Laurierville) (1897), sans compter la décoration en 1894 de trois statues en bois sculptées par Louis Jobin* pour l’église de Saint-Michel.

En 1901, les fils de Rigali, Johnny et Frank, s’associent comme peintres décorateurs, tandis que Michèle forme, en 1902, pour un an, une société avec George Simpkin, commis, à titre de fabricants de plâtre décoratif et de marbre artificiel, établis aux 114–116 de la rue Saint-Jean. Durant cette décennie, Rigali continue à fournir statues et ornements à diverses paroisses du Québec : vers 1900, à Sainte-Luce et à Saint-Thuribe ; en 1901, à Saint-François, île d’Orléans ; en 1902, à Saint-Calixte de Plessisville et à Saint-Casimir ; en 1903, à Saint-Augustin de Saint-Augustin-de-Des maures ; en 1908, à Saint-Édouard, et, enfin, en 1910, à Saint-Théophile et à Saint-Joseph (d’Alma).

Rigali décède le 5 juin 1910 des suites d’une pneumonie contractée lors d’un voyage d’affaires dans Charlevoix. Les obsèques ont lieu trois jours plus tard à l’église St Patrick, en présence de presque tous les membres de la colonie italienne de Québec, de nombreux dignitaires, échevins, architectes et sculpteurs. Comme le démontre la présence de certaines personnes à ses obsèques ou à quelques transactions effectuées devant notaire, Rigali n’était pas isolé du milieu artistique de la capitale. Il entretenait des relations professionnelles non seulement avec des artistes étrangers comme Lorenzo Nardi et l’Américain Victor Putnam, mais également avec des architectes et sculpteurs locaux renommés tels que François-Xavier Berlinguet*, Joseph-Pierre Ouellet*, Georges-Émile Tanguay*, Laurent Moisan, Alfred Carbonneau et Louis Jobin. Par testament, Rigali nommait son fils Frank exécuteur testamentaire et lui léguait tous ses biens meubles et immeubles ; ce dernier devait poursuivre les activités de l’entreprise familiale, qui disparaîtrait cependant à son décès en 1912. Dans les décennies suivantes, d’autres maisons italiennes, comme celles d’Angelo Barsetti et de Luigi Bastiani, prendraient la relève dans le domaine de la statuaire et de l’ornementation en plâtre à Québec.

À l’instar de ses compatriotes statuaires ou peintres établis au Québec durant la deuxième moitié du xixe siècle, Michèle Rigali est tombé dans l’oubli après son décès. Sa carrière et sa production sont demeurées jusqu’à maintenant relativement méconnues, notamment à cause des préjugés entretenus par les historiens de l’art Marius Barbeau* et Gérard Morisset*. Ces derniers voyaient en l’usage grandissant du plâtre dans la statuaire et le décor des églises, à partir du milieu du xixe siècle, une rupture dans l’évolution de la sculpture québécoise, le début d’une décadence artistique et la fin d’une longue tradition artisanale et française, celle de la sculpture sur bois. Toutefois, ils ne tenaient pas compte de l’évolution du goût et des besoins de la société québécoise de la deuxième moitié du xixe et du début du xxe siècle. En effet, dans le domaine de l’art religieux, les maisons italiennes, comme celle de Rigali à Québec ou celles de Carlo Catelli, Thomas (Tommaso) Carli, G. Baccerini ou A. Giannotti à Montréal, fabriquaient et mettaient en vente des modèles originaux, variés, nouveaux, populaires, solides et peu coûteux. Très en demande, leur production en plâtre pour l’intérieur et en ciment pour l’extérieur était accessible à des coûts moindres que les œuvres sculptées en bois. Profitant d’un prestige et d’un engouement peu communs, leurs ouvrages finirent par se répandre dans toute la province : pratiquement toutes les églises ou communautés possédaient l’un ou l’autre modèle signés par Carli ou Rigali. Leurs œuvres ont ainsi exercé une influence déterminante, au point de vue de la présentation visuelle, sur la production des sculpteurs sur bois du Québec, notamment Louis Jobin, Jean-Baptiste Côté et Olindo Gratton* qui, devant leur succès, ont dû s’adapter et répondre à leur tour aux besoins nouveaux de leur clientèle. La production commerciale, voire conventionnelle, des maisons italiennes répondait donc au goût de l’époque et s’inscrivait dans certains courants internationaux, principalement l’imagerie munichoise ou saint-sulpicienne diffusée à grande échelle en Occident. Elle témoigne d’un important changement de goût et de mentalité dans la société québécoise de l’époque.

Mario Béland

La carrière de Michele Rigali a été reconstituée principalement à l’aide des archives paroissiales, des minutiers de notaires, surtout ceux de J.-A. Charlebois, G.-P. Châteauvert, Louis Leclerc, E. G. Meredith, G.-A. Paradis, L.-P. Sirois et Cyrille Tessier aux AC de Québec, d’É.-J. Angers (CN1-292) et de L.-P. Falardeau (CN1-301) aux ANQ-Q, des Reg. de déclarations et dissolutions de sociétés (T11-1), aux ANQ-Q, et des journaux de la ville de Québec, notamment l’Action catholique, 6, 8 juin 1910, le Courrier du Canada, 1874–1897, l’Électeur, 1882–1894, l’Événement, 1877, le Journal de Québec, 1877–1886, le Nouvelliste, oct. 1885, le Quebec Chronicle, 7, 9 juin 1910, la Semaine commerciale, janv. 1895, et le Soleil, 7–8 juin 1910.

Une liste détaillée de tous les actes et articles consultés nous a été fournie par l’auteur et fait partie du dossier Rigali, conservé au DBC.

AC, Québec, État civil, Catholiques, St Patrick’s Church (Québec), 13 déc. 1906, 8 juin 1910.— BE, Québec, Index aux immeubles ; Index aux noms.— Québec, Ministère des Affaires culturelles, Centre de documentation, Dossiers de paroisses.— La Semaine commerciale, 16 août 1895.— Annuaires, Québec, 1868–1910 ; Québec, prov. de, 1910–1911.— Marius Barbeau, Louis Jobin, statuaire (Montréal, 1968).— Mario Béland, « Louis Jobin (1845–1928) et le marché de la sculpture au Québec » (thèse de ph.d., univ. Laval, 1991) ; Louis Jobin, maître sculpteur ([Québec et Montréal], 1986).— Danielle Blanchet et Sylvie Thivierge, Inventaire des marchés de construction des actes notariés de la ville de Québec, 1871–1899 (Ottawa, 1982).— J. R. Porter et Jean Bélisle, la Sculpture ancienne au Québec ; trois siècles d’art religieux et profane (Montréal, 1986).— G.-A. Roy et Andrée Ruel, le Patrimoine religieux de l’île d’Orléans (Québec, 1982).

Bibliographie générale

Comment écrire la référence bibliographique de cette biographie

Mario Béland, « RIGALI, MICHELE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 19 mars 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/rigali_michele_13F.html.

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Auteur de l'article:    Mario Béland
Titre de l'article:    RIGALI, MICHELE
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 13
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1994
Année de la révision:    1994
Date de consultation:    19 mars 2024