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TURC DE CASTELVEYRE, LOUIS, dit frère Chrétien, supérieur des Frères hospitaliers de la Croix et de Saint-Joseph, né à Martigues, France, le 25 août 1687, fils de Claude Turc de Castelveyre, viguier, et de Marie Bonnel, décédé à Cap-Français* (Cap-Haïtien), île de Saint-Domingue (île d’Haïti), le 21 mars 1755.

Nous ignorons presque tout de la jeunesse et de la formation de Louis Turc de Castelveyre. Mais le poste de viguier occupé par son père et le titre de maître d’école que Turc se donna à son arrivée en Nouvelle-France permettent de croire qu’il avait reçu une formation et une instruction propres aux jeunes bourgeois de son époque. C’est en 1719 que Louis Turc rencontra François Charon* de La Barre, supérieur de l’Hôpital Général de Montréal, de passage en France, en quête de maîtres d’école pour son œuvre d’éducation en Nouvelle-France. Le supérieur convainquit Turc de l’accompagner et ramena aussi cinq autres maîtres d’école et des ouvriers pour travailler à une manufacture de bas tissés au métier. Le voyage s’effectua à bord de la flûte du roi le Chameau, sur laquelle François Charon mourut, en juillet 1719, après avoir nommé Louis Turc son exécuteur testamentaire.

Arrivé à Montréal, Turc s’agrégea à la communauté de l’Hôpital Général sous le nom de frère Chrétien. Le 17 septembre 1719, Mgr de Saint-Vallier [La Croix*], croyant entrer dans les vues du fondateur Charon, nomma le frère Chrétien supérieur de la communauté. Quelques mois plus tard, le Conseil de Marine approuva cette nomination. Cependant, les autorités de la colonie, le gouverneur Philippe de Rigaud* de Vaudreuil et l’intendant Bégon, doutaient des aptitudes du frère Chrétien à administrer les affaires de l’Hôpital Général ; aussi écrivirent-ils que le supérieur « quoy que homme de vertu [était] peu au fait du gouvernt de cette maison ». Ils souhaitaient même que des responsables étrangers à la communauté fussent nommés mais, puisque les lettres patentes de l’institution hospitalière octroyaient l’entière responsabilité de l’administration aux hospitaliers, le gouverneur et l’intendant furent impuissants à relever le supérieur de ses fonctions administratives.

Durant son supériorat, de 1719 à 1728, Louis Turc connut plusieurs déboires administratifs et financiers et aussi quelques succès. Il avait prononcé ses vœux temporaires de religion le 2 octobre 1722 et, plus heureux que le fondateur, il obtint, en 1723, l’approbation des règles que les frères observaient depuis la fondation de leur communauté. Pour soutenir matériellement l’Hôpital Général, il déploya de sérieux efforts. Ainsi, le 13 décembre 1719, il renouvela l’entente, réalisée le 15 juin précédent par son prédécesseur, avec François Darles et André Souste, en vue d’exploiter une manufacture de bas tissés au métier. Mais en 1722, l’intendant Bégon ordonnait de mettre fin à cette association en raison des querelles stériles qui opposaient les associés. Le frère Chrétien n’avait cependant pas joué un rôle important dans cette affaire, tout occupé à régler d’autres problèmes dûs à l’administration du fondateur. Il avait d’abord entrepris de rembourser les dettes contractées par Charon à l’endroit de plusieurs marchands français, dettes que Turc évaluait à 17 000#. Le supérieur mit aussi sur pied une entreprise commerciale qui opérait à Québec et à Montréal par l’intermédiaire d’agents, espérant réaliser des bénéfices. Il permit ainsi à l’Hôpital Général de réaliser d’intéressants revenus pour les années 1723 et 1724.

Quant aux œuvres d’éducation, le frère Chrétien poursuivit le travail du fondateur. Il recruta, de 1722 à 1724, une quinzaine de maîtres d’école, afin de répondre aux besoins de l’enseignement en Nouvelle-France, dont étaient en partie responsables les Frères hospitaliers. Mais les recrues, qui s’étaient engagées quasi à l’aveuglette, abandonnaient après quelques mois leurs fonctions car « l’hopital général ne leur fourni[ssait] rien pour leur entretien ». Quelques-uns retournaient en France, d’autres s’installaient dans la colonie. Dans l’espoir de remédier à ce manque constant d’enseignants, le frère Chrétien, lors d’un voyage en France en 1723, travailla à la mise sur pied d’une école normale à La Rochelle. Profitant du désir de l’évêque de l’endroit, Mgr Étienne de Champflour, qui, lui aussi, voulait offrir à la jeunesse de sa ville épiscopale des maîtres compétents, il offrit les services de sa communauté. Les hospitaliers de Montréal acceptèrent officiellement ce projet en 1724, espérant pouvoir ainsi former des enseignants en France avant de les faire passer dans la colonie. Pour soutenir cette œuvre commune, Mgr de Champflour présenta une requête afin d’obtenir l’autorisation royale et dota par testament les hospitaliers de Montréal d’une maison avec jardin et dépendances et d’une somme de 12 000#.

Les méthodes d’administration et de financement utilisées par le frère Chrétien confirmaient les doutes que le gouverneur et l’intendant avaient déjà exprimés au sujet de ses aptitudes en matière de gestion. Ainsi pour régler la dette de son prédécesseur, le frère Chrétien avait reçu des hospitaliers 409# 9s. qu’il employa à d’autres fins ; il dut ainsi utiliser pour le règlement de cette dette des sommes prélevées sur les 3 000# de subventions annuelles destinées à l’entretien des maîtres d’école. Ces transferts de fonds rendaient impossible le financement normal de l’œuvre éducative de l’Hôpital Général. Pour l’établissement de l’école normale de La Rochelle, il avait emprunté 40 000# avec l’espoir de se voir remettre cette somme par Mgr de Champflour. Comme l’autorisation de Mgr de Saint-Vallier, permettant l’union de la maison de La Rochelle à celle de Montréal, ne parvint au frère Chrétien qu’après la mort de Mgr de Champflour, le projet échoua et le religieux se retrouvait dans une position financière très précaire. Quant à ses autres affaires en France, d’une part, pour les régler, il utilisa les gratifications royales destinées à l’éducation – subventions que le roi suspendra en 1731 – et, d’autre part, il laissa de nombreux comptes en souffrance. Le total de ses dettes atteignit la somme de 53 968# 9s. 4d.

En 1725, devant l’insistance de ses nombreux créanciers, le frère Chrétien quitta la France pour se rendre dans la colonie française de l’île de Saint-Domingue croyant pouvoir y mettre sur pied plusieurs établissements de pêche. Le roi ordonna alors au gouverneur de Saint-Domingue, Charles-Gaspard de Goussé, chevalier de La Rochalar, de le faire arrêter et de l’envoyer à Québec pour qu’il rendît compte de ses emprunts considérables contractés en France au nom de l’Hôpital Général de Montréal. Le frère Chrétien s’enfuit alors dans la partie espagnole de l’île, où il vécut trois ans. Il fut finalement contraint de revenir en Nouvelle-France où il arriva en juillet 1728. Il se retira chez les récollets de Québec. Le 17 septembre suivant, les hospitaliers le révoquaient comme supérieur de la communauté.

Pour régler ses nombreuses dettes, le frère Chrétien poursuivit en justice les frères hospitaliers, dont il se prétendait créancier pour une somme de 54 776# 8s. 6d. Il réclama aussi d’un de ses agents dans la colonie, Claude Morillonnet, dit Berry, le paiement des marchandises qu’il lui avait fait parvenir de France. De leur côté, 39 de ses créanciers français le poursuivirent devant les tribunaux de la Nouvelle-France pour une somme de 29 938# 9s. 4d. et réclamèrent la subrogation du frère Chrétien en leur faveur dans la poursuite judiciaire contre les hospitaliers et l’agent Morillonnet. Après avoir vérifié toutes les pièces susceptibles de clarifier cet imbroglio financier, le Conseil supérieur reconnut finalement, le 22 avril 1735, les frères hospitaliers débiteurs à l’endroit de leur ancien supérieur de la somme de 24 940# 13s. 9d. Quant à Morillonnet, il avait été condamné, par sentence prononcée le 10 juillet 1731, à payer au frère Chrétien 9 073# 6s. 4d. et à lui remettre des marchandises évaluées à 5 188# 2s. 4d.

Sans qu’il faille attribuer au seul frère Chrétien la responsabilité de la faillite de l’Hôpital Général de Montréal, il n’en demeure pas moins que ces dépenses faites à l’insu des hospitaliers – si on s’en tient au livre de comptes de l’Hôpital Général – aggravèrent la situation financière de cette entreprise déjà chancelante. En 1735, après le règlement de tous les différends qui avaient opposé les hospitaliers et les créanciers français du frère Chrétien, celui-ci réclama des autorités de la Nouvelle-France la permission de retourner à Saint-Domingue où il espérait établir une brasserie vraisemblablement afin de payer les créanciers restants avec les profits réalisés.

Louis Turc de Castelveyre se rendit alors à Cap-Français. Il loua une petite maison où il accueillit quelques orphelins pour les instruire ; par la suite il hébergea quelques vieillards indigents. Encouragé par les jésuites qui desservaient le nord de l’île et soutenu par les aumônes de colons riches, Turc de Castelveyre put après cinq ans acquérir une vaste propriété qu’il nomma « La Providence ». Il augmenta alors le nombre de ses pensionnaires en acceptant d’héberger les émigrés d’Europe. Quand il se vit à la tête d’une œuvre grandissante, Turc de Castelveyre voulut se décharger de toute responsabilité financière et il présenta une requête au Conseil supérieur de Cap-Français, le 12 novembre 1740, demandant qu’on veuille bien nommer des administrateurs à cet hospice et se réservant seulement le droit de s’y dévouer en qualité d’hospitalier. Cette faveur lui fut accordée le 5 mars 1741.

Louis Turc de Castelveyre employa le reste de ses jours à des œuvres charitables jusqu’à sa mort survenue le 21 mars 1755. Moreau de Saint-Méry nous a laissé de ce « Fondateur et premier directeur de La Providence des Hommes » ce portrait : « C’était un homme de cinq pieds et quatre pouces, gros, un peu vouté, les épaules fortes, le nez épaté, sa figure annonçait la douceur et la bonté. »

En collaboration avec Albertine Ferland-Angers

AAQ, 22 A, Copies de lettres expédiées, II : 325.— AN, Col., B, 42, f.44 ; 44, ff.507, 508 ; 45, f.111 ; 46, f.526 ; 48, f.884 ; 50, ff.500–501 ; 51, f.171 ; 57/2, f.627 ; Col., C11A, 39, f.391 ; 40, f.51 ; 47, f.271 ; 107, ff.93ss.— ANQ-M, Greffe de J.-B. Adhémar, 25 août 1719 ; Greffe de J.-C. Raimbault, 17 sept. 1728 ; Greffe de Pierre Raimbault, 22 sept. 1721.— ASGM, Inventaire des biens meubles et immeubles des frères Hospitaliers dits Frères Charon de l’Hôpital Général de Montréal, 4 sept. 1747 ; Recette et dépense de juin 1718 à septembre 1746 ; Registre des vêtures, professions, etc. des Frères Charon, 1701–1748.— ASSM, Cahiers Faillon, 197c (microfilm F1).— Édits ord., I : 389.— M.-L.-É. Moreau de Saint-Méry, Description topographique, physique, civile, politique et historique de la partie française de lisle de Saint-Domingue (2 vol., Philadelphie, 1897 ; Blanche Maurel et Étienne Taillemite, édit., « Bibliothèque d’histoire coloniale », nouv. sér., 3 vol., Paris, 1958) ; Éloges de MTurc de Castelveyre (Paris, 1790).— Massicotte, Inventaire des documents concernant les frères Charon, RAPQ, 1923–1924, 163–201.— P.-G. Roy, Inv. ord. int., I : 183, 229s. ; II : 104.— [É.-M. Faillon], Vie de Madame dYouville fondatrice des Sœurs de la Charité de Villemarie dans lîle de Montréal en Canada (Ville-Marie [Montréal], 1852).— Albertine Ferland-Angers, Mère dYouville (Montréal, 1945).— Amédée Gosselin, Linstruction au Canada, 460.— Lionel Groulx, Lenseignement français au Canada (2 vol., Montréal, 1931–1933), I : 117s.— É.-Z. Massicotte, Les frères Charon, BRH, XXIII (1917) : 150ss.

Bibliographie générale

Comment écrire la référence bibliographique de cette biographie

En collaboration avec Albertine Ferland-Angers, « TURC DE CASTELVEYRE, LOUIS », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 18 mars 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/turc_de_castelveyre_louis_3F.html.

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Permalien: http://www.biographi.ca/fr/bio/turc_de_castelveyre_louis_3F.html
Auteur de l'article:    En collaboration avec Albertine Ferland-Angers
Titre de l'article:    TURC DE CASTELVEYRE, LOUIS
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 3
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1974
Année de la révision:    1974
Date de consultation:    18 mars 2024