BAIRD, NICOL HUGH, ingénieur et inventeur, né le 26 août 1796 à Glasgow, Écosse, fils de Hugh Baird et de Margaret Burnthwaite ; le 21 septembre 1831, il épousa à Montréal Mary White, fille d’Andrew White*, et ils eurent quatre fils et quatre filles ; décédé le 18 octobre 1849 à Brattleboro, Vermont.

On sait relativement peu de chose sur les premières années de Nicol Hugh Baird. Vers l’âge de 16 ans, il se rendit en Russie où il resta plusieurs années avec son oncle Charles Baird, qui avait ouvert un atelier de constructions mécaniques à Saint-Pétersbourg (Leningrad). Aux alentours de 1816, il rentra en Écosse où il poursuivit son apprentissage auprès de son père, ingénieur et constructeur de canaux. Après la mort de Hugh Baird, en 1827, Nicol Hugh chercha en vain une situation dans l’armée et un poste d’arpenteur. Au printemps de 1828, muni de lettres de recommandation du duc de Montrose et de Thomas Telford, éminent ingénieur britannique, il s’embarqua pour le Canada.

Grâce à ses références, Baird se trouva vite du travail. En effet, le gouverneur en chef, lord Dalhousie [Ramsay], le reçut le 5 juillet et le dépêcha au canal Rideau dès le lendemain. Huit jours plus tard, à Bytown (Ottawa), les dispositions nécessaires étaient prises pour qu’il remplace John Mactaggart* comme conducteur des travaux du canal. Surveillant exigeant, Baird ne tarda pas à impressionner ses supérieurs par ses dons. Pendant ses quatre années de travail au canal Rideau, il s’intéressa aux problèmes que posait la construction des ponts dans le Haut et le Bas-Canada et dessina le plan d’un « pont suspendu en bois » pour lequel il reçut un brevet en 1831. En septembre 1832, avec l’appui, semble-t-il, du lieutenant-colonel John By, il fut chargé par le gouvernement provincial de faire des levés à l’embouchure de la rivière Trent et de concevoir un pont qui l’enjamberait. En février 1831, son admission à l’Institution of Civil Engineers, dont Telford était le président, avait marqué la reconnaissance en Grande-Bretagne de ses qualités professionnelles.

Réagissant à des pressions locales en faveur de l’amélioration de la navigation dans le district de Newcastle, le lieutenant-gouverneur du Haut-Canada, sir John Colborne*, chargea Baird, au printemps de 1833, d’entreprendre des levés et d’établir des devis pour la construction d’un canal entre la baie de Quinte et la baie Presqu’ile, puis d’un autre entre l’embouchure de la rivière Trent et le lac Rice. En 1835, avec l’aide de Frederick Preston Rubidge*, Baird étudia, dans un rapport, la possibilité de joindre le lac Rice et le lac Simcoe au moyen d’un canal. Ce rapport soulignait non seulement l’utilité pour la région d’une voie navigable qui relierait les lacs Ontario et Huron, mais aussi les avantages commerciaux et militaires d’une telle voie pour l’ensemble de la colonie. Baird eut l’occasion de mettre ses plans à exécution en 1836 : il fut alors employé comme ingénieur-surintendant par les commissaires chargés de l’aménagement de la rivière Trent et par les commissaires responsables des eaux du district de Newcastle.

Les travaux de canalisation furent entrepris sous la surveillance de Baird, mais ils progressèrent lentement en raison de la rébellion de 1837–1838 et des difficultés financières que la province connaissait alors. Finalement, en 1841, suivant la recommandation de Hamilton Hartley Killaly*, le gouvernement conclut qu’il n’était pas nécessaire de construire le canal au complet entre Trent Port (Trenton) et le lac Simcoe. On décida plutôt de recourir à un expédient semblable à celui que Baird avait proposé dans son rapport de 1835 : terminer les travaux qui étaient en bonne voie et relier les lacs Scugog et Rice, compris dans le trajet du canal, par une route conduisant au lac Ontario. Baird supervisa la réalisation de ce plan sous la direction du bureau des Travaux publics de la province, formé en 1841. Il participa sans interruption aux travaux du canal Trent jusqu’en octobre 1843, sauf pendant une brève période en 1842.

Comme bien des ingénieurs de son époque, Baird avait tendance à se disperser et à entreprendre plusieurs tâches à la fois. En janvier 1835, il étudia la possibilité de creuser un canal entre les lacs Saint-Louis et Saint-François, sur le Saint-Laurent. L’année suivante, William Hamilton Merritt* lui offrit de devenir l’ingénieur du canal Welland, mais il demanda un salaire que Merritt jugea excessif. En 1837, la chambre d’Assemblée adopta une loi qui exigeait que deux ingénieurs bien informés étudient le trajet à suivre pour élargir le canal Welland, et Baird ainsi que Killaly furent choisis. Ils rédigèrent ensemble un rapport qui fut présenté à l’Assemblée en février 1838 En outre, Baird participa aux levés et à la construction du port de Windsor (port de Whitby), à l’amélioration du port de Cobourg, à l’arpentage d’une ligne ferroviaire Cobourg-Peterborough, à la construction du phare de Presqu’ile Point et à la rédaction d’un rapport commandé par la Gananoque and Wiltsie Navigation Company [V. John McDonald*]. Il fut ingénieur au canal Chambly pendant une courte période en 1840, mais fut renvoyé en novembre de la même année.

Au début de 1840, le gouverneur Charles Edward Poulett Thomson demanda à Baird de lui livrer, dans un rapport, ses vues sur la navigation intérieure au Canada. Les réseaux du canal Welland et du fleuve Saint-Laurent, affirma Baird, avaient une grande importance pour le commerce canadien. Selon lui, il fallait y installer des écluses aussi grandes que celles du canal Rideau, capables de laisser passer les grands voiliers tout comme les vapeurs de dimensions moyennes qui constituaient la majorité des navires des Grands Lacs. Baird voyait un double avantage à sa proposition. Les voiliers étaient « moins exposés que les vapeurs au monopole des compagnies riches, les seules à pouvoir exploiter la navigation à vapeur » ; ainsi la concurrence entre les deux types de bâtiments réduirait le tarif de transport des marchandises. En même temps, en ouvrant la voie aux gros navires, on permettrait aux bâtiments des Grands Lacs de se rendre aux Antilles et d’en revenir sans rompre charge.

Même s’il avait fait valoir ces opinions, Baird se mit bientôt à chercher un moyen de modifier les bateaux à vapeur pour qu’ils puissent plus facilement franchir les écluses existantes. Il conçut une « roue à aubes de fort diamètre » qu’il fit breveter dans le Haut-Canada en 1842. Cette roue plus étroite que la normale, installée sur chacun des flancs du navire, réduisait la largeur du bâtiment et s’enfonçait plus profondément dans l’eau, assurant plus de vitesse et de stabilité. En 1841, le capitaine qui commandait la flotte britannique des Grands Lacs, Williams Sandom*, avait refusé de mettre l’invention de Baird à l’essai sur un vapeur de la marine. Par contre, son successeur, William Newton Fowell*, se montra intéressé, de sorte qu’en 1845 l’Amirauté accepta que le Mohawk soit modifié à Penetanguishene pour recevoir les roues à aubes de Baird. Ainsi pourvu, le navire put descendre tout le canal Welland et « patrouiller l’ensemble des lacs ».

Comme les contrats de génie se faisaient plus rares à la fin des années 1830 et au début des années 1840, Baird se préoccupa de plus en plus de la reconnaissance accordée aux ingénieurs d’origine britannique dans le Haut et le Bas-Canada et de la concurrence que leur livraient les Américains. En 1840 ou 1841, les commissaires du canal de Cornwall ayant expliqué qu’ils avaient embauché un Américain pour surveiller les travaux parce qu’ils ne connaissaient « aucun ingénieur dans le pays », Baird écrivit avec humeur qu’il ne voulait pas « concéder une once de supériorité à quelque ingénieur des États-Unis ». Ensuite, il rédigea à l’intention de la Montreal Gazette une lettre ouverte dans laquelle il montrait qu’il était pleinement qualifié pour l’emploi.

Au cours de cette période, Baird accumula des dettes considérables, notamment envers George Strange Boulton* et John Redpath*, et se mit apparemment à dos un certain nombre de gens. Même si Killaly le traitait toujours avec amitié et de ses conseils l’aidait à éviter les erreurs, il croyait bon de prévenir Mme Baird de ne pas laisser d’argent ni de biens à son mari. Quand le bureau des Travaux publics confia les travaux du canal Trent à des ingénieurs du district, en 1843, Baird fut délaissé au profit d’un homme moins expérimenté. Parti du district de Newcastle en octobre de la même année, il fut incapable pendant une certaine période de se trouver un emploi à temps plein. En juin 1845, cédant peut-être à des pressions de Killaly, le bureau des Travaux publics le réembaucha pour qu’il trace la route Arthabaska, de Québec à Melbourne, dans le Bas-Canada, et en supervise la construction. Il devait aussi entreprendre la réfection de la route Kennebec, qui reliait Québec à la frontière du Maine. Baird termina les levés dès la fin de l’année et surveilla ces deux chantiers jusqu’à l’été de 1848. L’été suivant, il travailla quelque temps avec un ingénieur américain qui étudiait le trajet de la future ligne de chemin de fer entre Montréal et Burlington, au Vermont. Apparemment, il était sans travail au moment de sa mort, en octobre 1849.

Nicol Hugh Baird se signala avant tout par sa participation à l’aménagement des premiers réseaux de canaux et de routes du Haut et du Bas-Canada. Ses travaux furent le plus souvent d’envergure régionale, mais il eut quand même l’occasion de contribuer au creusage ou à l’amélioration de grandes voies navigables comme les canaux Rideau, Trent et Welland. Jusqu’au début des années 1840, il eut ses entrées chez les gens en place, qui recherchaient et écoutaient, semble-t-il, ses avis en matière de travaux publics. En outre, ce qui importe peut-être davantage, il a laissé des documents abondants et complets qui éclairent de façon exceptionnelle les premières années du génie au Canada.

John Witham

AO, MS 393.— APC, RG 1, L3, 54 : B17/183 ; RG 5, A1 : 59532–59533, 59542, 67405–67408, 103137–103154, 130725–130727 ; RG 11, A2, 94, nos 449, 3344 ; 100 ; A3, 115 : 175 ; RG 43, CII, 1, 2434.— Institution of Civil Engineers (Londres), Minute-book, n.242 (enregistrement de N. H. Baird comme membre, 8 févr. 1831).— H.-C., House of Assembly, App. to the journal, 1836, 1, no 12 ; Journal, app., 1833–1834 : 154–161.— « Mortality schedules of Vermont, no.3 : census of 1850 », Carrie Hollister, compil. (copie dactylographiée, Rutland, Vt., 1948 ; copie à la Vt. Hist. Soc., Montpelier), 7.— The valley of the Trent, introd. de E. C. Guillet, édit. (Toronto, 1957).— Montreal Witness, Weekly Review and Family Newspaper, 5 nov. 1849.— Patents of Canada [...] [18241855] (2 vol., Toronto, 18601865), 1 : 389.

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John Witham, « BAIRD, NICOL HUGH », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 2 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/baird_nicol_hugh_7F.html.

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Auteur de l'article:    John Witham
Titre de l'article:    BAIRD, NICOL HUGH
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 7
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1988
Année de la révision:    1988
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