ROWELL, SARAH ALICE (Wright), réformatrice sociale et rédactrice, née le 4 décembre 1862 dans le canton de London, Haut-Canada, fille de Joseph Rowell et de Nancy Green ; le 26 juin 1884, elle épousa à London South (London, Ontario) Benjamin Gordon Hobson Wright, et ils eurent quatre fils ; décédée le 26 juin 1930 à London.
Sarah Alice Rowell fut fortement influencée dans sa jeunesse par son père, fermier de Cumberland, en Angleterre, prédicateur laïque méthodiste et dirigeant du mouvement de tempérance, ainsi que par sa grand-mère maternelle, femme vive et intelligente qui excellait dans l’art de la conversation et vivait avec eux. À l’école de village d’Arva, Sarah Alice (que sa famille appelait Sazie) se fit rapidement remarquer par ses talents de peintre et d’auteure de romans. Elle s’établit dans la ville de London avec sa famille vers 1883 et, en 1884, épousa Benjamin Gordon Hobson Wright, natif du canton de London qui était alors en affaires à Columbus, en Ohio. Après avoir emménagé dans cette ville, elle résolut de servir le Christ et accepta d’abord pour mission de travailler auprès des enfants noirs. En 1886, cependant, les difficultés économiques forcèrent les Wright à revenir à London, où Gordon entra dans l’industrie chapelière (il ouvrirait plus tard sa propre compagnie de chapeaux). Les Wright devinrent membres de la congrégation Queen’s Avenue et, par après, de la First Church (Metropolitan). En agissant encore une fois conformément à ses convictions religieuses, Sarah Alice afficha cette forte personnalité dont fait état le biographe de son jeune frère Newton Wesley*, avocat et militant méthodiste.
Mme Wright mit sa formidable énergie et son talent au service de trois organisations étroitement liées par leurs programmes et par leurs membres : la Lord’s Day Alliance (dont elle fut vice-présidente), la Missionary Society of the Methodist Church of Canada et l’Union chrétienne de tempérance des femmes. Pour prouver sa volonté de se consacrer au travail missionnaire, elle accepta la présidence de la conférence de London de la Woman’s Missionary Society et, durant huit ans, fut corédactrice du Missionary Outlook (Toronto) de la Methodist Missionary Society, où elle pouvait donner libre cours à ses sentiments évangéliques et anticatholiques. Son engagement au sein de l’Union chrétienne de tempérance des femmes fut encore plus soutenu.
À compter de 1894, Mme Wright fut, à l’Union chrétienne de tempérance des femmes de London, surintendante du groupe de travail chargé de diffuser de la documentation sur la tempérance et d’en placer notamment dans des endroits publics, tels les salons de barbier. Elle dirigea également le groupe de travail contre les stupéfiants, qui organisait des campagnes contre le tabac, les substances illicites, comme l’opium, et la consommation excessive de médicaments. Elle travailla aussi à divers autres projets, dont la fourniture de boissons non alcoolisées aux foires d’automne. En 1896, elle accepta la présidence de la section de London, l’une des mieux établies de l’union en Ontario (et qui porterait son nom). Elle incarna à ce poste le dévouement des femmes évangéliques qui faisaient partie de l’union : à sa réunion inaugurale du 1er décembre 1896, elle « demanda que le premier geste de ce nouveau régime soit une prière [pour invoquer] la lumière divine ». Elle continua à participer aux exercices de dévotion à tous les échelons de l’union et joua un rôle de premier plan dans les affaires méthodistes à London. En 1906, après les conférences tenues dans cette ville sur les nouvelles approches en matière de critique biblique, qui avaient troublé bien des fidèles, elle consulta le révérend Albert Carman* sur cette « embarrassante question », mais sa foi ne vacilla jamais.
En 1895, son élection au poste de secrétaire aux archives de l’Ontario Woman’s Christian Temperance Union – et donc de responsable des rapports annuels détaillés – avait fait d’elle un membre essentiel du comité directeur de cette association. Entre 1897 et 1905, elle remplit également la fonction de secrétaire correspondante, fonction d’une grande importance puisque, en Ontario, l’union comptait beaucoup sur le courrier pour faire pression auprès des fonctionnaires. On sait aussi grâce au journal de l’union, le Canadian White Ribbon Tidings (London), qu’elle fut une remarquable collectrice de fonds durant toute la dernière décennie du xixe siècle et pendant une bonne période au xxe siècle. À l’Union chrétienne de tempérance des femmes du Canada, Mme Wright occupa les postes de vice-présidente à compter de 1903 et de présidente de 1905 jusqu’à sa mort ; en reconnaissance de ses services, on la nomma membre à vie de l’union (1903), membre honoraire à vie (1909) et « membre à titre commémoratif » (1930). De plus, elle fut vice-présidente de la World’s League Against Alcoholism.
Pour remplacer le défunt Woman’s Journal, ancien périodique de l’Union chrétienne de tempérance des femmes, Mme Wright avait lancé en 1904 le Canadian White Ribbon Tidings avec une autre inconditionnelle de l’union à London, May Rowland Thornley. Bien que la direction de la rédaction ait été contestée par l’Ontario Woman’s Christian Temperance Union et par l’Union chrétienne de tempérance des femmes du Canada, le journal prospéra sous la conduite de Mme Wright, qui s’acquittait tout à la fois des tâches de rédactrice, de correctrice d’épreuves et d’administratrice. Faute de temps, Mme Wright dut toutefois renoncer à produire le journal quand elle devint présidente de l’association nationale, et l’on eut de la difficulté à trouver une remplaçante aux compétences aussi variées. En 1906, le Canadian White Ribbon Tidings devint officiellement le journal de l’union en Ontario et, en 1910, pendant la présidence de Mme Wright, l’Union chrétienne de tempérance des femmes du Canada lança le Canada’s White Ribbon Bulletin (Ottawa) pour y traiter de questions pancanadiennes. Mme Wright reviendrait au Canada’s White Ribbon Tidings dans les années 1920 à titre de rédactrice en chef.
Dans toutes ces fonctions, Mme Wright lutta implacablement contre l’alcool, le tabac et la violence familiale. Excellente oratrice, elle mêlait à ses discours et à ses écrits les arguments féministes et, parfois, nativistes. À l’instar de bien des militants de la tempérance de son époque, elle voyait dans l’alcool une menace si grande qu’il fallait les forces alliées de plusieurs organisations pour en venir à bout. C’est pourquoi elle fit partie de tant de groupes et en appuya un plus grand nombre encore. Suffragette connue, elle insista en 1905, en tant que membre de l’Ontario Woman’s Christian Temperance Union, pour que les femmes remplissant les conditions requises soient admises à voter aux élections municipales. En 1914, elle apporta son soutien à la National Equal Franchise Union, nouvellement fondée, et présenta une allocution au Social Service Congress, à Ottawa ; la tenue de ce congrès, expliquait-elle, confirmait le lien entre le mouvement en faveur du droit de vote des femmes, le mouvement de tempérance et le nouveau mouvement Social Gospel. En novembre 1926, elle fut la conférencière vedette à une réunion publique parrainée par le Women’s Prohibition Committee au Grand Opera House de Peterborough ; la section locale de l’Union chrétienne de tempérance des femmes avait résolu d’assister en masse à cette réunion, pour appuyer sa présidente. En 1929, Mme Wright fut l’une des cinq femmes nommées à un conseil consultatif international de la World’s Woman’s Christian Temperance Union, association dont elle avait été désignée « membre à titre commémoratif mondial » l’année précédente. Tout en œuvrant dans l’organisation du mouvement de tempérance, elle fut vice-présidente du National Council of Women of Canada et du Social Service Council of Canada. Au cours de la Première Guerre mondiale (pendant laquelle au moins un de ses fils combattit à l’étranger), elle fut première vice-présidente de la Western Ontario Red Cross ; en 1918, elle participa à Ottawa à la Women’s War Conference, organisée par son frère Newton Wesley qui était président du Comité de guerre fédéral.
Mme Wright continuerait de travailler avec acharnement et de relever des défis jusqu’à ses derniers jours. En 1927, pendant qu’elle prononçait une conférence en Colombie-Britannique après l’assemblée annuelle de l’Union chrétienne de tempérance des femmes du Canada, son mari, lui aussi militant de la tempérance, mourut subitement à London d’une crise cardiaque. C’est à cette assemblée qu’elle avait déploré la décision de plusieurs gouvernements provinciaux de contrôler la vente des alcools : « Si jamais nous avons eu besoin d’un Dieu qui respecte l’alliance et entende nos prières, c’est bien maintenant, en ce moment où nos espoirs pour le Canada se perdent dans une défaite immense et presque universelle. » D’une persévérance inébranlable, en juin 1930, elle s’adressa à de nombreux auditoires pendant la campagne électorale au Nouveau-Brunswick, où le contrôle des alcools avait été adopté en 1927 ; le 24 juin, elle avait encore de l’énergie pour prononcer une allocution devant la section de l’Union chrétienne de tempérance des femmes d’Ingersoll, en Ontario. Deux jours plus tard, elle était morte. Ses funérailles eurent lieu à London, en l’église Knox United.
Sarah Alice Rowell Wright fut longtemps considérée par la presse comme « l’une des plus brillantes » Canadiennes. Et, de fait, on ne saurait nier qu’elle possédait une vive intelligence, un sens exceptionnel du devoir et des aptitudes marquées pour faire cause commune avec bien des réformateurs qui partageaient ses opinions.
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Sharon Anne Cook, « ROWELL, SARAH ALICE (Wright) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 6 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/rowell_sarah_alice_15F.html.
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Auteur de l'article: | Sharon Anne Cook |
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Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2005 |
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Date de consultation: | 6 déc. 2024 |