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DOWLING, THOMAS JOSEPH, prêtre catholique et évêque, né le 28 février 1840 à Shanagolden (république d’Irlande), fils de Martin Dowling ; décédé le 6 août 1924 à Hamilton, Ontario.
Thomas Joseph Dowling quitta l’Irlande et s’établit à Hamilton avec sa famille en 1851. Il y fréquenta une « école d’élite », puis le St Michael’s College de Toronto, où il fut l’élève du fameux orateur basilien Michael Joseph Ferguson et excella en rhétorique et en littérature. Le 7 août 1864, après avoir terminé ses études au grand séminaire de Montréal, il reçut l’ordination de Mgr John Farrell* en la cathédrale St Mary de Hamilton. Affecté d’abord, en octobre, dans une grande mission dont le siège se trouvait à Paris, dans le diocèse de Hamilton, il prouva bientôt qu’il avait l’étoffe d’un prêtre-bâtisseur et d’un orateur de marque. Grâce à une tournée de conférences qui le mena notamment à Chicago et en Pennsylvanie, il recueillit assez d’argent pour acquitter la dette de l’église inachevée de Paris.
En 1881, Dowling devint vicaire général. À ce titre, il administra le diocèse de Hamilton entre la mort du successeur de Farrell, Peter Francis Crinnon, en 1882 et la nomination de James Joseph Carbery en 1883. En reconnaissance de son travail, ses collègues du clergé donnèrent un banquet le 29 janvier 1884 à Paris et lui remirent une bourse de 500 $ qu’il s’empressa de verser dans le fonds de construction de son église.
En décembre 1886, Dowling fut nommé évêque de Peterborough ; il succédait à Jean-François Jamot*. Sacré à Hamilton le 1er mai 1887, il définit les orientations qui caractériseraient toutes ses années d’épiscopat : souci du développement matériel de l’Église, disposition à voyager, reconnaissance des besoins des catholiques non anglophones. Bien que son vaste diocèse se soit étendu jusqu’à la frontière manitobaine, il réussit, pendant la très courte période où il le dirigea, à visiter Sudbury, Sault-Sainte-Marie et la région du Lakehead. Les nombreuses communautés francophones de son diocèse eurent des prêtres à demeure et, à Noël et à Pâques, les paroisses comptant un nombre important de fidèles dont la première langue était le néerlandais, l’allemand ou l’italien purent compter sur des prêtres parlant couramment ces langues.
Après la mort de Carbery en décembre 1887, le bruit courut que Dowling serait appelé à lui succéder parce qu’il avait grandi à Hamilton. Fidèle à son tempérament, il nia souhaiter ce poste. Toutefois, quand le Vatican annonça qu’il deviendrait effectivement le quatrième évêque de Hamilton, il admit : « C’est une consolation pour moi de savoir que je ne suis pas étranger au diocèse, que je retourne, en fait, sur les lieux de mon enfance, parmi de bons et estimés amis religieux et laïques. » Il fut muté à Hamilton le 11 janvier 1889 et installé le 2 mai.
À Hamilton, Dowling continua de s’occuper de l’expansion matérielle de l’Église. En moins de deux ans, il organisa la construction de six églises, de trois couvents et de neuf écoles ainsi que l’agrandissement d’un orphelinat. En outre, il montra qu’il était plus proche de son clergé et de ses ouailles que ne l’étaient plusieurs de ses homologues. Au moment de sa nomination, un correspondant avait évoqué « ses égards tout fraternels envers ses compagnons prêtres [...] et le soin parfait avec lequel il s’acquittait de ses charges pastorales ». Dowling se distinguait surtout par ses relations avec les laïques. Très sociable – des photographies montrent un visage épanoui et rond, un front large et des cheveux en bataille –, il écrivait des poèmes et chantait. S’ils n’étaient pas toujours remarquables, ses vers étaient néanmoins originaux. Spontanément, il offrait d’en réciter, souvent sous forme de compliments, à des cérémonies d’adieu, à des anniversaires d’ordination, à des baptêmes et à des mariages. Pour les obsèques de prêtres et de religieuses, il composait des élégies ou des oraisons funèbres. Il chantait régulièrement à des concerts, aussi bien dans des écoles qu’au St Joseph’s Orphanage de Hamilton, et ne manquait jamais de le faire aux célébrations de la Saint-Patrice. Selon des articles de journal, il s’attendait à être invité en pareilles occasions ; s’il ne l’était pas, il exprimait ouvertement sa déception.
Lorsque des immigrants avaient commencé d’arriver en masse, dans les années 1890, Dowling réagit de manière semblable aux évêques d’autres grands centres urbains. Comme Fergus Patrick McEvay* à Toronto, il affirmait que l’Église avait le devoir de desservir les étrangers dans leur langue. Il organisa donc de tels services pour les Allemands, les Italiens et les Polonais. Les besoins les plus faciles à satisfaire furent ceux des Allemands du comté de Waterloo et de la région de Walkerton-Hanover. Dowling remit un celebret au père Louis G. F. H. Funcken, supérieur de la Congregation of the Resurrection à Berlin (Kitchener), et l’envoya en Europe recruter des prêtres germanophones. À long terme, un établissement du diocèse, le St Jerome’s College, tenu par la congrégation, formerait des prêtres nés au Canada et parlant l’allemand. La communauté italienne de Hamilton, en pleine expansion, fut bien servie également : à compter de 1908, elle eut sa paroisse, St Anthony of Padua, à l’extrémité est de la ville. Cinq ans plus tard, Dowling visita les Italiens de Guelph ; il se rendit même chez des membres éminents de leur communauté et conversa avec eux par l’entremise d’un interprète. Dès 1922, la population italienne de cette ville était suffisamment nombreuse pour avoir sa propre paroisse.
Le cas des Polonais présenta plus de difficultés, même si la Congregation of the Resurrection, fondée à l’intention des émigrés polonais en France, avait préparé le terrain. Rivalités entre les résurrectionnistes, craintes de voir se reproduire au Canada le schisme entre catholiques polonais américains, liens traditionnels entre le nationalisme polonais et le catholicisme, opposition de certains prêtres à des paroisses fondées exclusivement sur l’ethnie – voilà autant de problèmes avec lesquels Dowling devait composer. Pourtant, il accéda aux requêtes des communautés polonaises. En 1911, un lot situé à l’intersection des rues Barton et St Ann, à Hamilton, fut mis de côté en prévision de la construction de l’église St Stanislaus. L’inauguration de la paroisse Sacred Heart à Berlin eut lieu un an plus tard. Les efforts de Dowling en vue de desservir les fidèles de rite non latin à Berlin et à Owen Sound furent moins fructueux. Leur trouver des prêtres était difficile, et ceux qui arrivaient ne tardaient pas à repartir en se plaignant de l’hostilité des prêtres de rite latin.
Étant donné ses origines, Dowling s’était toujours intéressé à la politique irlandaise et aux perspectives d’avenir des Irlandais au Canada. Il embrassait sans réserve l’idée d’une identité canadienne distincte, exprimée par Thomas D’Arcy McGee*. À titre de curé de Paris en 1866, il exprima sans équivoque sa position sur les féniens en servant d’aumônier à la milice locale. Il croyait beaucoup aux méthodes de Daniel O’Connell, le chef irlandais qui avait favorisé des solutions constitutionnelles, parlait fréquemment des affaires irlandaises et collaborait à l’Irish Canadian de Toronto. Tout en reconnaissant que les Irlandais étaient dans une meilleure situation au Canada qu’en Irlande, il déconseillait l’« immigration imprévoyante » dans les régions urbaines, à l’instar de John Joseph Lynch*, archevêque de Toronto, et d’autres prélats. Le ghetto irlandais de Hamilton, à l’ombre de la cathédrale St Mary, lui rappelait constamment combien les choses pouvaient tourner mal.
Dans l’espoir de distinguer affaires partisanes et affaires religieuses, Dowling apporta en 1889 une précision nécessaire, à savoir qu’il était « au-dessus et au delà de la sphère politique ». Bien qu’il ait peut-être été moins flamboyant que certains de ses collègues de l’épiscopat, il exerçait un pouvoir considérable en coulisse. En 1888, par l’entremise de Lynch, il demanda au premier ministre du pays, sir John Alexander Macdonald*, de veiller à ce qu’une nomination judiciaire aille au « bon » candidat. Lynch devait préciser à Macdonald qu’il y avait là une « occasion [...] de se concilier un jeune évêque dont les ouailles dét[enaient] la balance des pouvoirs dans plusieurs circonscriptions incertaines ». Dowling intervint personnellement en faveur des tories dans la circonscription de Northumberland en 1887 et dans celle de Haldimand en 1895. En outre, on le consulta sur l’Acte relatif au règlement de la question des biens des jésuites et sur la question des écoles du Manitoba. Après que les débats sur ces questions controversées eurent amené l’influent porte-parole conservateur D’Alton McCarthy* à faire cavalier seul et à diviser le parti, Macdonald demanda à Dowling d’expliquer aux catholiques que l’appareil tory ne sanctionnait pas les opinions de ce renégat. En février 1891, le premier ministre encouragea Dowling à presser ses curés de parler en chaire des dangers de la réciprocité totale, par exemple l’annexion aux États-Unis et la réduction des droits des catholiques canadiens.
Après la mort de Macdonald en juin 1891, Dowling resta affilié aux conservateurs. Il fut particulièrement heureux de les voir choisir comme chef, en 1892, John Sparrow David Thompson*, catholique et allié de John Cameron*, évêque d’Antigonish, en Nouvelle-Écosse. Il arriva même à nouer une alliance avec le successeur de Thompson, Mackenzie Bowell*, ancien grand maître de l’ordre d’Orange. Rien n’indique qu’il resta lié aux conservateurs pendant la courte période où sir Charles Tupper* fut premier ministre, mais il ne semble pas avoir appuyé pour autant le gouvernement libéral du catholique Wilfrid Laurier*. Les deux hommes entretenaient des relations de pure forme. Ce n’est que 15 ans plus tard, après la défaite de Laurier par le conservateur Robert Laird Borden*, que Dowling recommença à solliciter des postes fédéraux pour des catholiques.
Sur la scène provinciale, l’engagement politique de Dowling était moins prévisible. Dans les années 1880, il s’était associé spontanément à Lynch et à James Vincent Cleary*, évêque de Kingston, pour soutenir les libéraux d’Oliver Mowat* et s’opposer à la politique « antipapiste » des conservateurs de William Ralph Meredith. Cependant, les relations entre la hiérarchie épiscopale et les successeurs de Mowat se relâchèrent après le départ de celui-ci pour la scène fédérale en 1896. Dowling estimait qu’Arthur Sturgis Hardy* l’avait traité avec hauteur en ne passant pas le voir au cours d’une visite à Hamilton. Sous George William Ross*, les rapports se détériorèrent encore davantage : en 1900, Dowling se plaignit que les postes donnés par favoritisme dans la région de Hamilton et originellement désignés comme « catholiques » allaient à des protestants. En 1905, en grande partie à cause des scandales entourant le gouvernement Ross, Dowling et d’autres membres de la hiérarchie soutenaient les conservateurs de James Pliny Whitney*.
Comme ses collègues de l’épiscopat, Dowling défendait ardemment les écoles séparées, quoique dans une perspective plus moderne. En 1888, il soutint l’opposition de Lynch à l’instauration du scrutin secret dans les élections scolaires, mais en 1894, même si les autres évêques refusaient toujours ce changement, il en reconnut le caractère inévitable. De même, en 1916, tandis que d’autres s’opposaient à la prolongation de l’instruction séparée au delà de la cinquième année, Dowling estimait nécessaire d’offrir aux élèves catholiques les mêmes chances qu’à leurs pairs du système public et de donner une formation supplémentaire aux instituteurs catholiques. En outre, il appuyait l’instruction générale donnée par la Catholic Church Extension Society, dont le siège se trouvait à Toronto [V. Alfred Edward Burke]. Quand d’autres évêques mirent en doute l’efficacité de cet organisme, Dowling contribua à en assurer la survie par des encouragements à l’archevêque de Toronto, Neil McNeil*, et peut-être par des dons en argent.
L’évêque de Hamilton avait manifesté une certaine tolérance dans la controverse sur les écoles françaises du Manitoba. Selon lui, un compromis améliorerait la position des écoles séparées en Ontario. Cependant, il n’irait pas plus loin et refuserait en 1896 de protester, avec ses homologues de la province de Québec, contre le compromis conclu par Laurier avec le premier ministre du Manitoba, Thomas Greenway*. Par contre, dans le conflit sur le Règlement 17 adopté en 1912 par le Parlement ontarien, règlement qui limitait l’usage du français dans les écoles et qui divisa la hiérarchie, Dowling tenta de conserver ses liens avec les évêques francophones et de réduire ainsi les dissensions, mais Michael Francis Fallon*, l’évêque de London, et d’autres s’avérèrent plus puissants que lui.
Dowling demeura évêque jusqu’à son décès en 1924. On rapporte qu’il avait refusé l’archiépiscopat de Toronto trois fois ; chose certaine, en 1898, il n’avait pas voulu succéder à John Walsh*. En 1914, après 50 ans de prêtrise et 25 ans d’épiscopat, il eut l’honneur d’être nommé évêque assistant au trône pontifical et prélat domestique.
À compter de 1914, Thomas Joseph Dowling réduisit considérablement ses activités. En 1920, son mauvais état de santé ne faisait plus aucun doute : un administrateur dirigeait le diocèse et des évêques missionnaires s’acquittaient des fonctions épiscopales telle la confirmation. Lorsque Dowling mourut, à la veille du soixantième anniversaire de son ordination, il était le plus vieil évêque nord-américain encore en poste. Plus discret que certains de ses collègues, il avait été à la fois un prêtre-bâtisseur et, jusqu’à ce que sa santé décline, un excellent administrateur. On lui doit surtout d’avoir compris que, à compter de l’arrivée massive d’immigrants non anglophones au début du xxe siècle, l’Église catholique du Canada anglophone, irlandaise depuis si longtemps, devait changer pour survivre.
Arch. of the Roman Catholic Archdiocese of Toronto, L (Lynch papers) ; MN (McNeil papers).— Arch. of the Roman Catholic Diocese of Hamilton, Ontario, T. J. Dowling papers ; Dowling scrapbook.— Arch. of the Roman Catholic Diocese of Peterborough, Ontario, T. J. Dowling papers.— BAC, MG 26, A, Macdonald à Dowling, 16 déc. 1887 ; Dowling à Macdonald, 28 mars 1889.— Catholic Record (London, Ontario), 1884–1924, particulièrement 16 août 1924.— Catholic Weekly Review (Toronto), 5 mai 1887.— Hamilton Spectator, 7 août 1924.— Paris Star (Paris, [Ontario]), 19 juill. 1866.— Edgar Boland, From the pioneers to the seventies : a history of the diocese of Peterborough, 1882–1975 (Peterborough, 1976).— Alex Bros, « Polish immigrant relations with the Roman Catholic Church in urban Ontario, 1896–1923 » (mémoire de m.a., Wilfrid Laurier Univ., Waterloo, Ontario, 1986).— Canadian album (Cochrane et Hopkins), 1 : 310.— Canadian men and women of the time (Morgan ; 1898).— Cyclopædia of Canadian biog. (Rose et Charlesworth), 1.— DHB, 2.— Ken Foyster, Anniversary reflections : 1856–1981 ; a history of Hamilton diocese (Hamilton, [1982]).— Marjorie Freeman Campbell, A mountain and a city : the story of Hamilton (Toronto et Montréal, 1966).— Theobald Spetz, The Catholic Church in Waterloo County [...] ([Toronto], 1916).— G. J. Stortz, « Thomas Joseph Dowling, the first “Canadian” bishop of Hamilton, 1889–1924 », SCHEC, Hist. studies, 54 (1987) : 93–107.
Gerald J. Stortz, « DOWLING, THOMAS JOSEPH », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 2 oct. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/dowling_thomas_joseph_15F.html.
Permalien: | https://www.biographi.ca/fr/bio/dowling_thomas_joseph_15F.html |
Auteur de l'article: | Gerald J. Stortz |
Titre de l'article: | DOWLING, THOMAS JOSEPH |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 2005 |
Année de la révision: | 2005 |
Date de consultation: | 2 oct. 2024 |