BURKE (Bourk, Bourke, DeBurgo), EDMUND prêtre catholique, dominicain et vicaire général de la Nouvelle-Écosse, né en Irlande, apparemment dans le comté de Tipperary ; circa 1785–1801.

Edmund Burke arriva à Terre-Neuve le 15 juin 1785 ; jeune prêtre, il avait été recommandé au premier supérieur de la mission de Terre-Neuve, le préfet apostolique James Louis O’Donel, par l’évêque de Waterford (république d’Irlande). O’Donel lui-même n’était à St John’s que depuis l’année précédente, tout comme le seul autre prêtre de l’île officiellement mandaté, Patrick Phelan, lequel résidait à Harbour Grace. Burke devint curé de Placentia, district où les catholiques étaient en grande majorité.

Les circonstances entourant la nomination de Burke révèlent les difficultés qu’éprouvait O’Donel à imposer son autorité aux prêtres errants sur le territoire relevant de sa juridiction. En 1785, un autre dominicain, le père Patrick Lonergan (Landergan), venu de France à Terre-Neuve la même année, se trouvait déjà à Placentia. « D’un caractère très violent et turbulent », Lonergan, non content d’exercer son ministère en compétition avec Burke, mit en danger la position de l’Église en se livrant à des voies de fait sur un protestant et en rassemblant « d’une façon tumultueuse » un groupe de catholiques. O’Donel l’excommunia, et des plaintes en provenance de Placentia furent déposées contre lui auprès du gouverneur John Campbell, qui ordonna son départ de Terre-Neuve la même année. Lonergan resta, mais il mourut peu après, misérablement, dans l’île Fogo.

Burke, pour sa part, obtint dès le début un grand succès à Placentia. Grâce à l’aide de la Saunders and Company, qui recueillit de l’argent auprès de ses employés catholiques, il reçut en 1785 une maison et un terrain pour une chapelle. Avec la permission du gouverneur, on commença presque immédiatement la construction de la chapelle. Entre-temps, on autorisa Burke à célébrer les offices religieux au palais de justice. Déjà, en cette première année, il convertit plusieurs membres de l’Église d’Angleterre.

Le rôle que joua Burke attira sur lui l’attention du nouveau surrogate, le prince William Henry, qui arriva à Placentia en 1786, à titre de capitaine du Pegasus. Le prince nota bientôt qu’« on fai[sait] montre envers [Burke] de plus de respect et de considération [...] qu’envers le surrogate lui-même ou que n’importe lequel des juges de paix ». Devant cette manifestation du pouvoir clérical, le prince William Henry prit des mesures immédiates pour le contrecarrer. Il ordonna aux catholiques d’être particulièrement attentifs aux magistrats et interdit aux protestants de se marier ou de faire baptiser leurs enfants devant le prêtre catholique. Il défendit que l’on utilisât le palais de justice pour les offices religieux catholiques et, de surcroît, remit en question l’autorisation qu’avait obtenue Burke d’ériger une chapelle. À la requête d’O’Donel, apparemment, le gouverneur John Elliot intervint auprès du prince William Henry pour lui demander d’être plus modéré à l’égard des catholiques, ce qui ne fit que détourner la colère du prince sur le supérieur de Burke. À son arrivée à St John’s, il menaça d’y brûler la chapelle et alla jusqu’à lancer à O’Donel une lime de fer qui le blessa légèrement. Après le départ du prince, l’affaire se résorba ; mais tout cela montrait bien sur quelle base fragile reposait le clergé catholique de Terre-Neuve.

Néanmoins, la mission de Burke progressait. En 1788, son district comptait trois chapelles, dont une « très élégante » à Placentia même, et ses paroissiens étaient au nombre de 3 000. Burke, qui s’était lancé dans l’industrie de la pêche, avait un revenu annuel estimé à £300. La même année, le ministre anglican de Placentia, John Harries, arrivé depuis peu, notait avec beaucoup d’inquiétude que le catholicisme y était fort, au point d’être effectivement « la religion établie, alors que [sa] propre Église n’y [était] que tolérée ». Des membres de l’Église d’Angleterre continuaient à se convertir. En 1791, Burke aurait fait beaucoup de conversions, même dans un endroit aussi éloigné que la baie de Fortune.

À la fin de 1791, Burke tomba malade et dut passer plusieurs mois en Angleterre pour se remettre. À partir de 1795, il semble s’être intéressé à un poste aux États-Unis, et il fit même un voyage à cette fin. Ayant finalement quitté Placentia pour Boston, probablement en 1798, il y refusa ensuite une bonne place. II préféra, l’année suivante, se rendre à Halifax, ville qu’il avait visitée à plusieurs reprises auparavant. La migration des Irlandais terre-neuviens, de Placentia à Halifax, était si forte que ces nouveaux venus représentaient dès lors la majorité des catholiques de Halifax. Le supérieur des missions dans les Maritimes, James Jones, persuadé que Burke était la personne la plus apte à se tirer d’affaire avec ces fidèles indisciplinés, lui demanda de le remplacer. Burke entra en fonction au départ de Jones, en août 1800. L’on ignorait si ce dernier reviendrait ; néanmoins, le 25 septembre, Mgr Denaut nomma officiellement Burke curé de Halifax et vicaire général de la Nouvelle-Écosse.

À peine Jones parti, Burke eut à affronter une crise majeure. Le comité des sept conseillers presbytéraux élus aux fins de l’administration temporelle de la paroisse tomba sous la coupe de John Stealing, lequel était convaincu que la paroisse avait été, à l’époque de Jones, « dominée par le clergé ». Burke avait accordé au comité l’entière responsabilité des finances, mais Stealing imposa de plus en plus son autorité. Il fit accepter au comité des règlements de sa conception pour l’administration de la paroisse, dont le congédiement du curé selon le bon plaisir du même comité et le refus de la sépulture chrétienne à ceux qui ne contribueraient pas financièrement à l’église. Ce dernier règlement provoqua un conflit ouvert avec les paroissiens qui protestèrent auprès de Mgr Denaut, considérant que le comité avait abusé de son autorité. Mgr Joseph-Octave Plessis*, coadjuteur de Mgr Denaut, estimait que Burke avait fait montre de maladresse dans ses rapports avec le comité. Burke, quant à lui, affirmait n’avoir pris connaissance des nouveaux règlements que plusieurs mois après leur adoption ; entre-temps, disait-il, il avait été aux prises avec une grave épidémie de petite vérole, en plus d’avoir subi une attaque de rhumatisme qui le cloua au lit pendant quelques mois. La querelle ne se régla que grâce à une lettre pastorale de Mgr Denaut, datée de septembre 1801, dans laquelle l’évêque censurait plusieurs des règlements adoptés par le comité. En mai 1801, après que Jones eut manifesté son intention de ne pas retourner en Nouvelle-Écosse, Burke s’était senti alors dégagé de toute obligation envers Halifax et avait demandé à Mgr Plessis de lui trouver un remplaçant, de façon à pouvoir rentrer en Europe. Il quitta Halifax à l’automne, apparemment pour l’Angleterre. On ignore tout de sa carrière par la suite. À Halifax, ce fut un prêtre séculier, également nommé Edmund Burke, qui lui succéda.

Edmund Burke savait être innovateur. À Halifax, il lisait l’épître, l’évangile et la collecte du jour en anglais, avant le sermon, de manière à mieux instruire les gens ; il faisait chanter des hymnes et des motets en langue anglaise avant et après la messe. Il instaura un enseignement catéchétique pour les enfants, comme il l’avait probablement fait à Terre-Neuve. À Placentia, ses réalisations furent impressionnantes ; à Halifax, de même, il accrut de £150 les revenus de la paroisse. Malgré ses tendances à l’alcoolisme, qu’il parvint à surmonter apparemment, Burke était bien considéré. Les événements qui marquèrent sa carrière sont un exemple des difficultés que durent affronter d’autres de ses confrères, prêtres catholiques anglophones de la première génération, au Canada.

Raymond J. Lahey

AAQ, 12 A, G : f.2 ; 210 A, III ; 30 CN, I.— Arch. of the Archdiocese of Halifax, Edmund Burke papers (mfm aux PANS).— Archivio della Propaganda Fide (Rome), Scritturi riferite nei Congressi, America Antille, 2 (1761–1789) ; 3 (1790–1819).— Nfld. Public Library Services, Provincial Reference Dept. (St John’s), Nfld., Court of Sessions and Surrogate Court, « Records of Placentia », 2 (8 août 1786–29 déc. 1803) ; 3 (5 juill. 1805–5 juill. 1806).— PANL, GN 2/1, 10.— USPG, C/CAN/Nfl., 1.— M. F. Howley, Ecclesiastical history of Newfoundland (Boston, 1888 ; réimpr., Belleville, Ontario, 1979).— Johnston, Hist. of Catholic Church in eastern N.S.

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Raymond J. Lahey, « BURKE (Bourk, Bourke, DeBurgo), EDMUND (circa 1785-1801) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 2 oct. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/burke_edmund_1785_1801_5F.html.

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Auteur de l'article:    Raymond J. Lahey
Titre de l'article:    BURKE (Bourk, Bourke, DeBurgo), EDMUND (circa 1785-1801)
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1983
Année de la révision:    1983
Date de consultation:    2 oct. 2024