CAMERON, ÆNEAS, trafiquant de fourrures, né vers 1757 dans la paroisse de Kirkmichael (région de Grampian, Écosse) ; décédé le 8 septembre 1822 à Montréal.
Le père d’Æneas Cameron, Alexander, exploitait une petite ferme, appelée Inverchabet ; sa mère, Grace Grant, était originaire de Glen Lochy, situé tout près de là. Ses oncles maternels, John et Francis Grant, étaient de riches planteurs de la Jamaïque. En outre, par sa grand-mère maternelle, Cameron était apparenté au marchand et trafiquant de fourrures William Grant*, de Trois-Rivières.
Grâce à l’appui de Richard Dobie*, Cameron quitta Québec pour se rendre à Kingston, à la Jamaïque. En décembre 1786, à peine arrivé dans l’île, il écrivit à son oncle Francis, qui habitait Montego Bay, pour lui faire part de ses projets d’avenir. On ignore en quoi consistaient ces projets, mais l’oncle ne les approuva guère et il proposa à Cameron d’envisager « une carrière de planteur » chez lui. Qu’il ait accepté ou non, Cameron fut sans doute insatisfait de sa situation car, au printemps de 1788, il était de retour dans la province de Québec et Dobie l’embauchait à titre de commis au fort Abitibi (près de La Sarre, Québec). C’est probablement aux Grant que Cameron doit d’être entré dans le milieu de la traite des fourrures. Un an plus tôt, Dobie, marchand en vue et important trafiquant de fourrures montréalais, avait acquis les postes du Témiscamingue en société avec James Grant* qui, comme William Grant, était né dans la paroisse de Kirkmichael ; rien ne prouve cependant que ces deux hommes aient été parents. William Grant et Dobie, quant à eux, étaient amis et associés depuis longtemps et avaient peut-être un certain lien de parenté, car le gendre de Dobie, John Grant, ancien associé au Témiscamingue, était presque certainement apparenté aux oncles de Cameron, les Grant de la Jamaïque. Ces liens, de même que l’instruction poussée et les habitudes de travail de Cameron (dont font état ses lettres et papiers), expliqueraient les conditions avantageuses que lui offrit alors Dobie : si Cameron décidait de rester au pays des fourrures et si James Grant était d’accord, Dobie lui remettrait une fraction de la part qu’il possédait dans les postes de traite.
Cameron passa plusieurs années au fort Abitibi, mais ses espoirs d’obtenir une participation dans l’affaire s’estompèrent en 1791 ; cette année-là, Dobie et Grant vendirent les postes du Témiscamingue à la Grant, Campion and Company, dont l’associé principal était William Grant. Vers 1792, Cameron prit la direction du poste de Grand-Lac (Grand-Lac-Victoria) et, à l’automne de 1793, de celui du fort Témiscamingue (près de Ville-Marie), James Grant n’étant plus en assez bonne santé pour y passer un autre hiver. L’été suivant, Cameron s’associa à l’entreprise. En 1795, les postes furent vendus de nouveau, cette fois à la McTavish, Frobisher and Company, représentante de la North West Company ; en offrant à Cameron un généreux salaire pour les administrer, Simon McTavish* lui promit qu’il aurait dès que possible une part dans la nouvelle convention, qui devait entrer en vigueur en 1799. Toutefois, pendant les trois années qui suivirent, Cameron se trouva en désaccord avec ses employeurs au sujet de son salaire et de son éventuelle association, à cause d’un malentendu semble-t-il. Finalement, il signa la convention en octobre 1798.
En 1800, dans l’espoir de concurrencer la Hudson’s Bay Company, la North West Company confia à Alexander McDougall la direction d’une expédition terrestre qui devait ouvrir des postes de traite à la baie James. À titre de responsable des postes du Témiscamingue, Cameron participa à l’élaboration de ce projet ; mais son manque d’enthousiasme était évident. À l’été de 1805, il se rendit dans la baie par voie de terre pour y évaluer la position de la compagnie. L’été suivant, il y retourna en bateau et ordonna de fermer tous les postes, apparemment parce qu’ils n’étaient pas rentables et qu’ils n’avaient pas atteint leur objectif, qui était de forcer la Hudson’s Bay Company à conclure un accord avec la North West Company. On rapporte que les associés de la North West Company au fort William (Thunder Bay, Ontario) auraient ensuite blâmé Cameron d’avoir abandonné le poste de Moose Factory (Ontario), mais il ne fait pas de doute que sa décision était bonne.
Même si Cameron semble avoir quitté le fort Témiscamingue en 1804, il ne se retira probablement à Montréal qu’en 1806, après son retour de la baie James. En 1807, il devint membre du Beaver Club et, jusqu’en 1812, il travailla pour la McTavish, McGillivrays and Company, sans toutefois en être actionnaire ; il s’occupait probablement de la comptabilité et du ravitaillement des postes du Témiscamingue. Durant la guerre de 1812, il fut capitaine et officier payeur du Corps of Canadian Voyageurs, levé par les Nor’Westers. En 1815, il vendit aux représentants de la North West Company, pour la somme de £11 000, sa part d’associé retraité (1/100) et tous les intérêts qu’il possédait dans la compagnie. Il ne s’était jamais marié officiellement, mais il avait vécu avec au moins une Indienne au fort Témiscamingue. Il semble que Margaret Cameron, qui allait devenir la femme de l’agent principal Allan McDonell*, soit sa fille.
Cameron passa ses dernières années dans une pension tenue par Thomas Holmes, père de Benjamin* et d’Andrew Fernando* Holmes. Membre de la congrégation presbytérienne St Gabriel Street, il fut inhumé le 10 septembre 1822 dans le cimetière attenant à l’église. Dans son testament, rédigé le 24 juin 1818, il fit de nombreux dons mais légua la majeure partie de ses biens à son neveu Angus Cameron*, du Témiscamingue, qui était un ancien associé de la North West Company.
Æneas Cameron laissa le souvenir d’un Highlander fier et probe, attaché à sa famille, aimé et apprécié de ses amis de Montréal. C’était aussi un excellent trafiquant de fourrures et un homme d’affaires habile et minutieux. Sous son administration, le Témiscamingue, qui avait été longtemps exploité à perte, était presque devenu un des départements les plus rentables de la North West Company ; il le demeura d’ailleurs pendant près de 40 ans après la fusion avec la Hudson’s Bay Company.
PAM, HBCA, E.41/1–3 (mfm aux AO).— Docs. relating to NWC (Wallace).— E. A. Mitchell, Fort Timiskaming and the fur trade (Toronto et Buffalo, N. Y., 1977).— W. S. Wallace, The pedlars from Quebec and other papers on the Nor’Westers (Toronto, 1954).
Elaine Allan Mitchell, « CAMERON, ÆNEAS », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 11 oct. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/cameron_aeneas_6F.html.
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Auteur de l'article: | Elaine Allan Mitchell |
Titre de l'article: | CAMERON, ÆNEAS |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 6 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1987 |
Année de la révision: | 1987 |
Date de consultation: | 11 oct. 2024 |