HOLMES, BENJAMIN, homme d’affaires, homme politique et fonctionnaire, né le 23 avril 1794 à Dublin (République d’Irlande), fils de Thomas Holmes et de Susanna Scott ; il épousa à Montréal, le 5 juin 1819. Élisabeth, fille du docteur Daniel Arnoldi* et d’Élisabeth Franchère, et ils eurent plusieurs enfants ; décédé le 23 mai 1865 à Montréal.

En 1797, Thomas Holmes, sa femme et son fils Benjamin s’embarquèrent pour le Canada. Durant la traversée, une frégate française captura leur bateau et l’amena à Cadix, Espagne. Les Holmes, y compris le jeune Andrew Fernando*, né pendant la captivité en Espagne, finirent par atteindre le Canada en 1801. On sait peu de chose sur les débuts de leur séjour à Montréal, mais il est certain que la famille jouissait d’une certaine aisance. À l’âge de 18 ans, Benjamin se joignit à la firme Henderson, Armour and Company à titre de commis et, peu de temps après, il obtint un emploi similaire chez Horatio Gates and Company. La guerre de 1812, cependant, devait interrompre son apprentissage commercial chez Horatio Gates*. Influencé probablement par l’exemple de son père, qui avait eu une carrière militaire, Benjamin s’enrôla dans les Canadian Light Dragoons et reçut le 30 janvier 1813 une commission de lieutenant.

Au cours de cette année, le jeune Holmes participa à la campagne du Niagara. Ses activités militaires prirent brusquement fin le 3 octobre 1813 alors qu’il fut fait prisonnier par l’armée américaine. Holmes resta en captivité à Frankfort, Kentucky, apparemment jusqu’en juillet 1814, bénéficiant alors de l’échange général de prisonniers de guerre. Il reçut, le 8 août 1814, une nouvelle commission d’enseigne dans le régiment des Canadian Fencibles.

Avec le retour de la paix en 1815, Holmes s’associa quelque temps avec Benjamin Delisle à Perth, Haut-Canada, pour faire du commerce. Puis, en novembre 1817, il devint préposé aux escomptes à la nouvelle Banque de Montréal, commençant ainsi « une des carrières les plus intéressantes et les plus influentes dans les annales des banques canadiennes ». En 1827, Holmes s’élevait au poste de caissier (directeur général). Au cours des quelque 20 années qui suivirent, il dirigea les affaires quotidiennes de la banque, contribuant ainsi peut-être plus que quiconque au développement initial de cet établissement. L’habileté avec laquelle Holmes, souvent arbitraire et intransigeant dans ses façons de faire, défendait ses prises de position amenait invariablement ses opposants à lui céder. Le fait de rester en dehors de toute cabale politique et de toute controverse lui procurait un atout précieux à la fin des années 20 et au cours des années 30, alors qu’une grande partie des milieux d’affaires locaux était ouvertement hostile au parti patriote en pleine progression. Lorsque éclatèrent les troubles de 1837–1838, Holmes, en sa qualité de lieutenant-colonel de la Montreal Light Infantry, participa activement à la répression de la rébellion, ce qui fit monter de beaucoup sa cote de popularité au sein de la communauté anglophone de Montréal.

Durant la période qui suivit la rébellion, Holmes accepta des fonctions publiques, se faisant élire le 8 avril 1841 par la ville de Montréal pour siéger, avec son collègue tory George Moffatt, au premier parlement du Canada-Uni. Pendant la première session, il chercha surtout à obtenir l’adoption de lois financières avantageuses, en particulier le renouvellement de la charte de la Banque de Montréal, qui lui avait accordé un congé. Malgré sa réputation d’homme indépendant, aux manières peu orthodoxes, l’appui inconditionnel qu’il accorda publiquement le 19 septembre 1842 au gouvernement remanié et fortement réformiste de Louis-Hippolyte La Fontaine et de Robert Baldwin* fut tout à fait inattendu. « Nullement porté aux grands mots », Holmes expliqua crûment sa conversion : « Il [...] était entré au parlement imbu de préjugés – mais depuis lors ses yeux s’étaient ouverts et il se sentait prêt à collaborer cordialement avec les gentilshommes d’origine française. »

La presse tory de Montréal avait beau dénoncer froidement la « traîtrise » de Holmes, les réformistes de leur côté louèrent son libéralisme. Lors des élections municipales à Montréal le 1er décembre 1842, les premières depuis le renouvellement de la charte de la ville en 1840, Holmes fut élu conseiller du quartier Ouest et, plus tard, siégeant au conseil, il fut élu échevin. Dans les deux cas, il obtint l’appui enthousiaste de l’organisation réformiste locale. Son mandat d’échevin expira en mars 1846.

La portée de l’engagement politique de Holmes diminua à la suite de la démission du ministère La Fontaine-Baldwin en novembre 1843 ; son absence ayant nui à la Banque de Montréal, il démissionna de l’Assemblée le 1er février 1844. Comme homme politique, Holmes n’avait prêté à peu près aucune attention aux éditoriaux acérés qui paraissaient de temps à autre dans les journaux tories à son sujet et, de retour à Montréal, il s’efforça de s’acquitter de façon routinière de ses responsabilités d’administrateur principal de la banque. Mais il ne devait pas tarder à se retrouver au centre d’une controverse : à l’automne de 1845, il ordonna de suspendre les paiements prévus dans le budget du bureau des Travaux publics qui était apparemment au bord de la faillite, et ce geste fut interprété comme une décision politique par le gouvernement conservateur. De crainte d’exposer la banque au blâme du gouvernement et de se voir personnellement insulté par la presse tory, Holmes démissionna le 21 février 1846 de son poste de directeur général.

Nullement ébranlé en apparence, Holmes s’associa le 31 août 1846 avec John Young* pour promouvoir le commerce de produits finis et le développement des chemins de fer. Dans cette position politiquement moins névralgique, il était plus facilement accepté par les milieux d’affaires locaux et, par conséquent, exerça une influence considérable au sein des cercles réformistes. Aux élections de janvier 1848, Holmes fut réélu à l’Assemblée en même temps que le chef du parti, Louis-Hippolyte La Fontaine, par la ville de Montréal. Bien que déçu de ne pas avoir été invité à faire partie du cabinet réformiste, il l’appuya sans réserve lors de l’agitation provoquée par le projet de loi pour l’indemnisation des pertes subies pendant la rébellion, puis il rompit avec le parti en 1849 à propos de la question d’annexion. À l’instar de ses collègues libéraux, Luther Hamilton Holton* et Jacob De Witt*, hommes d’affaires montréalais, Holmes était plus enclin à être « rouge » que réformiste. Il signa le Manifeste annexionniste et, le 12 décembre 1849, il aida à la formation de l’Association d’annexion de Montréal dont il fut élu premier vice-président. Lors des tumultueuses élections municipales de mars 1850, Holmes remporta de justesse le quartier Ouest pour les annexionnistes mais, une fois au conseil, il ne réussit pas à se faire élire maire.

À l’exception des élections pour la mairie de Montréal en 1860 (il perdit par 24 voix contre le maire sortant Charles-Séraphin Rodier*), Holmes s’était presque entièrement retiré de la vie politique active depuis le milieu des années 50. À cause de ses activités annexionnistes, il ne réussit pas à renouveler son contrat d’association commerciale avec John Young qui avait expiré en décembre 1849, bien que sa position dans les milieux d’affaires se fût renforcée. Un des premiers promoteurs et vice-président du chemin à lisses du Saint-Laurent et de l’Atlantique, Holmes devint vice-président du Grand Tronc en juillet 1853, à la suite de la fusion des deux compagnies (il démissionnera de ce poste en 1858) ; par une curieuse coïncidence, en novembre 1853 il devint également administrateur de la Banque de Montréal, poste qu’il garda jusqu’à sa mort en 1865. En reconnaissance tardive de ses services, le gouvernement de John Sandfield Macdonald* et d’Antoine-Aimé Dorion* le nomma, le 23 décembre 1863, percepteur des douanes à Montréal. Au moment de sa mort, l’amertume qui avait autrefois empoisonné sa vie publique était depuis longtemps oubliée.

Lorne Ste. Croix

APC, MG 30, D62, 16, pp.1–45.— Debates of the Legislative Assembly of United Canada (Gibbs et al.), II : 101.— Hincks, Reminiscences.— La Minerve, 27 mai 1865.— Montreal Gazette, 21 juill. 1814, 24 sept. 1842, 3 févr. 1844, 4 mars, 14 sept. 1846, 13 mars 1850, 19 juill. 1853, 24 mai 1865.— Montreal Herald, 24 mai 1865.— Montreal Transcript, 11 nov. 1841, 24, 27 sept., 3 déc. 1842, 23 févr., 1er avril 1843.— F.-J. Audet, Les députés de Montréal, 245s.— Chapais, Hist. du Canada, V.— Denison, Canada’s first bank, I : 103, 266, 294, 393 ; II : 3, 22–31, 420.— Dent, Last forty years.— Hist. de la corporation de la cité de Montréal (J.-C. Lamothe et al.).— Monet, Last cannon shot.— William Weir, Sixty years in Canada (Montréal, 1903), 44.

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Lorne Ste. Croix, « HOLMES, BENJAMIN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 9, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 8 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/holmes_benjamin_9F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 9
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1977
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