GILDERSLEEVE (Gilderslieve), HENRY, capitaine de navire, homme d’affaires et juge de paix, né le 8 novembre 1785 à Gildersleeve (Portland, Connecticut), fils de Philip Gildersleeve et de Temperance Gibbs ; le 28 janvier 1824, il épousa Sarah Finkle, et ils eurent cinq fils, dont deux moururent en bas âge, et trois filles ; décédé le 1er octobre 1851 à Kingston, Haut-Canada.

Henry Gildersleeve était issu d’une famille de constructeurs de navires : son père ainsi que son grand-père, Obadiah Gildersleeve, étaient charpentiers de navires. Henry apprit ce métier dans un chantier naval de Gildersleeve, avant d’immigrer dans le Haut-Canada en 1816. Il trouva du travail à Bath, au chantier dirigé par Lucretia Finkle, veuve de Henry Finkle, loyaliste et fondateur de l’entreprise. Au chantier Finkle, Gildersleeve participa à la construction du Frontenac, dirigée par Henry Teabout et James Chapman, de Sackets Harbor, dans l’état de New York, où Gildersleeve est censé avoir travaillé en qualité de charpentier de navires vers 1815. Lancé en septembre 1816 par un groupe de marchands de Kingston et d’York (Toronto), le Frontenac fut le premier bateau à vapeur construit dans les Canadas à naviguer sur le lac Ontario. Il commença à faire la navette entre Kingston et Niagara (Niagara-on-the-Lake) le 5 juin 1817. Un vapeur américain, l’Ontario, construit à Sackets Harbor, avait commencé à sillonner le lac Ontario au début de 1817 [V. Samuel Crane]. Le premier bateau à vapeur construit dans les Canadas, l’Accommodation, avait été mis en chantier à Montréal en 1809 pour le compte de John Molson*.

Maître de chantier lors de la construction du Charlotte, second vapeur à sortir du chantier Finkle, Gildersleeve en était aussi copropriétaire, mais il ne faisait pas partie du comité qui en commanditait la construction. Il fit fonction de commissaire de bord sur ce bateau, tout en se qualifiant pour son brevet de capitaine ; en 1821, il en devint le capitaine. De 1818 à 1827, le Charlotte fit la navette entre Prescott, sur le Saint-Laurent, et Carrying Place, dans la baie de Quinte. Le Sir James Kempt, qui remplaça le Charlotte sur ce parcours en 1828, fut construit sous la surveillance de Gildersleeve. Il était actionnaire de ce bâtiment dont il fut capitaine pendant plusieurs années avant d’en devenir l’agent. Le fait que Gildersleeve a été associé à ces bateaux à vapeur et à d’autres qui feraient plus tard le même parcours valut à Gildersleeve d’être qualifié par Edwin Ernest Horsey, historien de Kingston, de « père de la navigation à vapeur dans la baie de Quinte et sur le haut Saint-Laurent ».

Au cours des années, à titre d’actionnaire et en société avec d’autres hommes d’affaires (de Kingston surtout), et parfois en qualité de surveillant des travaux, Gildersleeve fut mêlé à la construction et à l’exploitation d’une série de navires à vapeur, tels le William the Fourth (Gananoque, 1831), le Commodore Barrie (Kingston, 1834), le Henry Gildersleeve (Kingston, 1840), le Prince of Wales (Kingston, 1841) et le New Era (Kingston, 1848). Le Prince of Wales ne fit du service que dans la baie de Quinte, tandis que les autres naviguèrent dans cette baie, sur le lac Ontario ou sur le Saint-Laurent. Gildersleeve possédait aussi des intérêts dans d’autres bateaux à vapeur. En compagnie de Robert Drummond*, de Donald Béthune* et d’autres, il avait fait partie du comité créé pour construire le John By, navire qui était destiné au transport sur le canal Rideau, mais qui navigua sur le lac Ontario. Gildersleeve devint actionnaire du Kingston, construit par John G. Parker en 1833, et, plus tard, l’agent de ce bâtiment. En 1847, il acheta le City of Kingston qui avait été construit en 1841 à l’île Garden sous le nom de Prince Edward par Dileno Dexter Calvin*, John Counter* et d’autres. Enfin, il se peut que Gildersleeve ait projeté de mettre en chantier le Bay of Quinte, mais ce navire fut construit sous la direction de son fils Overton Smith* en 1852.

La concurrence se fit de plus en plus vive entre les armateurs des bateaux à vapeur, à mesure que ces bâtiments se multiplièrent. Il y eut un échange de lettres acerbes dans le Kingston Chronicle en mai 1830 entre Gildersleeve et Archibald McDonell, dont le navire Toronto avait commencé à faire du service dans la baie de Quinte. C’est aussi dans cette baie que le Britannia de Donald Béthune faisait concurrence aux bâtiments de Gildersleeve. Afin d’éliminer les conséquences d’une telle rivalité, les armateurs entreprirent de coordonner leurs horaires et de mettre sur pied des opérations conjointes. Par exemple, en 1835, Gildersleeve prit les dispositions nécessaires pour coordonner les itinéraires de son Commodore Barrie avec ceux du vapeur américain Oswego. En diverses occasions, il fréta à l’intention de John Hamilton*, de Kingston, le Commodore Barrie, le Henry Gildersleeve et le New Era, afin que celui-ci les mette en service sur ses lignes de navigation.

Gildersleeve avait épousé en 1824 la fille de Henry et de Lucretia Finkle et, en 1826, il s’était déjà établi avec sa femme à Kingston où il avait construit en 1825–1826 une grande maison en pierre. Il devint un citoyen en vue, connu non seulement comme constructeur de navires, mais aussi en raison de son activité dans plusieurs entreprises ainsi que dans les affaires publiques. Il était actionnaire de l’Ottawa and Rideau Forwarding Company qui transportait des passagers et du fret entre Kingston, Bytown (Ottawa) et Montréal, via le canal Rideau. De concert avec d’autres hommes d’affaires, notamment John Counter, il se fit le promoteur de la Kingston Marine Railway Company, fondée en 1836 et constituée juridiquement deux ans plus tard, et il fut l’un de ses premiers actionnaires. Pendant plusieurs années, Gildersleeve fut membre du conseil d’administration et président de cette société qui construisit et répara toutes sortes de navires à son chantier naval et ferroviaire situé sur les quais de Kingston. Il fut administrateur et, plus tard, trésorier de la Kingston Gas Light Company et promoteur de la Kingston Waterworks. En outre, Gildersleeve fut cofondateur et vice-président de la Kingston Provident and Savings Bank, président pendant plusieurs années de la Kingston Building Society, ainsi que vice-président de la Kingston Fire and Marine Insurance Company. Comme investisseur, il détenait des actions dans la Commercial Bank of the Midland District et dans la Bank of Upper Canada.

En réponse aux premiers projets d’exploitation de chemins de fer dans le Haut-Canada, projets qui menaçaient la situation de Kingston en tant que centre de transbordement, Gildersleeve et d’autres hommes d’affaires entreprenants eurent l’idée de faire de la ville un centre ferroviaire reliant Toronto, Kingston et, via l’île Wolfe au sud de Kingston, Cape Vincent, dans l’état de New York, où devait se faire la liaison avec les chemins de fer américains. La Wolfe Island, Kingston and Toronto Rail-road Company fut constituée juridiquement en 1846, mais le chemin de fer ne fut jamais construit. Une tentative pour faire revivre le projet en y ajoutant un canal qui traverserait l’île Wolfe, amena, en 1851, la constitution juridique de la Wolfe Island Rail-way and Canal Company, dont Gildersleeve fut nommé membre du conseil d’administration. Toutefois, il ne vécut pas assez longtemps pour assister à l’échec de ce projet, car il mourut le premier jour d’octobre de cette année-là.

Gildersleeve participa à divers autres aspects de la vie communautaire à Kingston. Il fit partie pendant plusieurs années du jury d’accusation aux audiences du district de Midland et devint juge de paix en 1842. L’année précédente, il avait siégé au comité créé par le bureau de commerce de Kingston afin d’évaluer les ressources en logement pouvant être mises à la disposition du gouvernement canadien, une fois que ce dernier aurait transféré son siège dans cette ville. Sur le plan religieux, il fut un membre actif de l’église anglicane St George.

En 1828, le Kingston Chronicle disait de Henry Gildersleeve qu’il était « bien connu pour la courtoisie de ses manières ». Homme affable, volontaire et d’une scrupuleuse probité, Gildersleeve était avant tout un homme d’affaires habile et clairvoyant et un audacieux pionnier de la construction navale dans le Haut-Canada. À sa mort, il laissa à son fils Overton Smith un gros héritage consistant en navires à vapeur, en propriétés immobilières et en espèces. Un autre de ses fils, Charles Fuller, et un petit-fils, Henry Herchmer Gildersleeve acquirent une certaine notoriété comme directeurs d’importantes compagnies dont l’activité se déroula sur les Grands Lacs et le Saint-Laurent.

Ruth McKenzie

AO, MS 78, Henry Gildersleeve à John Macaulay, 24 mai 1837, 28 févr. 1843 ; MU 610, n° 61 (livre de caisse du vapeur Sir James Kempt, 1836).— APC, MG 24, D24 : 236–244, 280–286 ; RG 5, A1 : 20075–20078 ; RG 42, sér. I, 205 : 71.— ÉÉC-O, St George’s Cathedral (Kingston, Ontario), reg. of marriages, 1824.— Kingston Public Library (Kingston), E. E. Horsey, « The Gildersleeves of Kingston – their activities, 1816–1930 » (copie dactylographiée, Kingston, 1942 ; copies aux QUA).— Canada, prov. du, Assemblée législative, App. des journaux, 1857, app. 11, nos 7–8 ; Statuts, 1846, chap. 108 ; 1848, chap. 13 ; 1849, chap. 158 ; 1850, chap. 139 ; 1851, chap. 149.— H.-C., Statutes, 1837–1838, chap. 30.— British Whig, 13 mai 1834–25 mars 1848.— Chronicle & Gazette, 27 juill. 1833–10 mai 1845.— Daily British Whig, 1er oct. 1851.— Daily News (Kingston), 8 oct. 1851.— Kingston Chronicle, 1er juin 1827–26 nov. 1831.— Kingston Gazette, 14 sept. 1816–8 juin 1818.— Weekly British Whig, 6 juill. 1849, 29 mars, 5 avril 1850, 30 juill. 1852.— Canada directory, 1851 : 119–129.— Cyclopædia of Canadian biog. (Rose et Charlesworth), 1 : 586–587.— W. H. Gildersleeve, Gildersleeves of Gildersleeve, Conn., and the descendants of Philip Gildersleeve (Meriden, Conn., (1914).— Héritage Kingston, J. D. Stewart et I. E. Wilson, édit. (Kingston, 1973), 155, 164–165, 170.— Pioneer life on the Bay of Quinte, including genealogies of old families and biographical sketches of representative citizens (Toronto, 1904 ; réimpr., Belleville, Ontario, 1972), 332, 339.— Canada and its prov. (Shortt et Doughty), 10 : 493–502, 506–514, 536–540.— E. E. Horsey, Kingston, a century ago ; issued to commemorate the centennial of Kingston’s incorporation (Kingston, 1938).— To preserve & defend : essays on Kingston in the nineteenth century, G. [J. J.] Tulchinsky, édit. (Montréal et Londres, 1976), 1–14 (introd. de l’éditeur), et J. K. Johnson, « John A. Macdonald and thé Kingston business community », 141–155.— A. G. Young, Great Lakes saga ; the influence of one family on the development of Canadian shipping on the Great Lakes, 1816–1931 (Owen Sound, Ontario, 1965).— Dorothy Geiger, « A history of the Kingston waterfront and water lots », Historic Kingston, n° 19 (1971) : 3–16.— A. L. Johnson, « The transportation revolution on Lake Ontario, 1817–1867 : Kingston and Ogdensburg », OH, 67 (1975) 199–209.— Duncan McDowall, « Roads and railways Kingston’s mid-century search for a hinterland, 1846 1854 », Historic Kingston, n° 23 (1975) : 52–69.— R. A. Preston, « The history of the port of Kingston », OH, 46 (1954) : 201–211 ; 47 (1955) : 23–38.

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Ruth McKenzie, « GILDERSLEEVE (Gilderslieve), HENRY », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 5 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/gildersleeve_henry_8F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1985
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