HENRY, ROBERT, trafiquant de fourrures, homme d’affaires, juge de paix et fonctionnaire, né vers 1778 à Albany, New York, fils de Robert Henry et neveu d’Alexander Henry* l’aîné ; le 2 novembre 1817, il épousa Christine Farrand, née Bethune, et ils eurent deux filles ; décédé le 10 mai 1859 à Cobourg, Haut-Canada.

Le père de Robert Henry était un marchand d’Albany qui, durant la Révolution américaine, avait fourni l’armée continentale en approvisionnements provenant de la province de Québec. Il se procurait ceux-ci contre paiement en espèces et, comme il n’obtint pas un remboursement intégral, il se retrouva acculé à la ruine. Après la guerre, la famille Henry vint se fixer à Montréal où Robert fit ses études. En 1806, il entra à la North West Company à titre de commis et, plus tard, travailla à la rivière aux Anglais (fleuve Churchill), sous les ordres de Donald McTavish* et de John Duncan Campbell. Henry s’associa à la compagnie en 1810, époque à laquelle il faisait du commerce le long du fleuve Churchill. De 1810 à 1815, il travailla dans le département de l’Athabasca et, à son retour à Montréal, en 1815, il fut élu au Beaver Club.

Au printemps de 1816, Henry retourna dans le Nord-Ouest où il joua un rôle de second plan dans la défense des intérêts de la North West Company, alors que la tension montait entre cette dernière, d’une part, et la Hudson’s Bay Company et la colonie de la Rivière-Rouge, d’autre part [V. Thomas Douglas*]. En juin, on lui demanda de conduire un groupe d’Indiens du fort William (Thunder Bay, Ontario) à la rivière Rouge pour y faire une démonstration de force ; à la fin de 1816, il participa au harcèlement des hommes de la Hudson’s Bay Company qui avaient construit le fort Wedderburn, sur le lac Athabasca [V. John Clarke]. La tension que Henry subit durant cette période d’hostilité l’incita à noter en août 1816 qu’il avait « très envie de quitter pour toujours ce pays de gredins ». À cause du fléchissement de la traite, la compagnie avait besoin de tous ses hommes sur le terrain, et son oncle Alexander Henry le persuada de rester un autre hiver.

Henry abandonna la traite des fourrures en 1817 et s’installa à Hamilton (Cobourg, Ontario). Avec James Gray Bethune*, frère d’Angus Bethune, il acheta une propriété dans cette localité en septembre de la même année et y construisit un moulin. Il en fit le principal moulin du district de Newcastle. Deux mois après avoir acheté sa propriété, Henry épousa Christine Bethune, sœur d’Angus, associé de la North West Company, ainsi que d’Alexander Neil*, qui devint rector de l’Église d’Angleterre à Cobourg en 1827.

Après avoir vendu son moulin pour £6 000 en 1831, Henry exploita une banque privée dans sa maison de Cobourg et, en 1832, il était devenu le représentant de la Commercial Bank of the Midland District dans cette ville. En dépit des efforts que firent ultérieurement d’autres personnes pour qu’on accorde une charte à une banque de Cobourg, celle de Henry demeura le seul établissement bancaire de la ville. Cette entreprise fit de lui une cible de la célèbre « conspiration de Cobourg », l’une des incursions frontalières inspirées par les patriotes et lancées à partir des États-Unis à la suite de la rébellion de 1837–1838. À la fin de juillet 1839, un groupe de dissidents conduits depuis New York par Benjamin Lett et Samuel Peters Hart complotèrent de voler et de tuer Henry, et d’attaquer d’autres résidents de la région, dont George Strange Boulton* et son neveu, D’Arcy Edward Boulton (deux tories de Cobourg très en vue), Maurice Jaynes (un riche fermier) et Sheppard McCormick (qui avait participé en 1837 à la capture du Caroline, navire d’approvisionnement des patriotes). Cette attaque était vraisemblablement destinée à déclencher à la fois une invasion étrangère et un soulèvement dans une région où plusieurs associations de frères-chasseurs, créées pour transformer le Canada en une république, avaient fait leur apparition. Pendant que les conspirateurs ourdissaient ce complot, l’un des leurs, Henry J. Moon, s’inquiéta vivement des intentions meurtrières de la bande et révéla le plan à l’un de ceux qu’on avait choisis comme victimes, D’Arcy Edward Boulton. Une troupe armée fut mise sur pied, et les conspirateurs furent arrêtés avant d’avoir pu lancer leurs attaques. Pendant le procès qui suivit, où Boulton représenta la défense, les conspirateurs et deux sympathisants de la région furent déclarés coupables. L’accusation décrivit Henry comme l’un « des habitants les plus respectables et les plus inoffensifs » de Cobourg.

Henry remplit la charge de juge de paix de 1818 à la fin des années 1830 et celle de premier trésorier de la localité de Cobourg en 1837, avant l’érection de celle-ci en municipalité. Il occupa un rang social équivalent à celui de l’oligarchie de Cobourg, composée de dirigeants politiques, d’hommes d’affaires originaires des États-Unis et d’officiers britanniques à la demi-solde, mais il joua un rôle moins actif que beaucoup d’autres dans la vie sociale et politique locale ; de plus, il ne fit pas d’investissements dans les projets d’amélioration de Cobourg. Il préférait probablement faire des placements de tout repos, comme des obligations et des valeurs mobilières, et le piètre succès d’entreprises locales comme la Cobourg Peterborough Rail-way justifia sa prudence.

À sa mort, Robert Henry n’était pas un homme exceptionnellement riche, même si ses affaires avaient été prospères ; sa succession se monta à 28 000 $. Il est possible qu’il ait perdu de l’argent en remboursant quelques-unes des dettes de James Gray Bethune qui avait fait faillite en 1834. Néanmoins, Henry connut une vieillesse tranquille ; entouré par un certain nombre d’anciens trafiquants de fourrures de la North West Company et de la Hudson’s Bay Company, tels que Jacob Corrigal, William Nourse et John Dugald Cameron, qui avaient eux aussi choisi la région de Cobourg pour y jouir de leur retraite.

Peter Ennals

AO, RG 22, sér. 191, Robert Henry.— APC, MG 19, B3 : 55, 95 ; E1, sér. 1, 6 : 2378 ; 22 : 8729–8732 (transcriptions) ; MG 23, B3, CC 41/4 : 33–38 ; RG 1, L3, 231 : H14/2 ; RG 4, B46, 1 : 434 ; RG 68, General index, 1651–1841 : 431, 502.— ÉÉC-T, Church of St Peter (Cobourg, Ontario), reg. of baptisms, burials, and marriages, 1819–1837 (mfm aux AO).— West Northumberland Land Registry Office (Cobourg), Abstract index to deeds, Cobourg : 216 (mfm aux AO, GS 4172).— Docs. relating to NWC (Wallace).— Frances Stewart, Our forest home, being extracts from the correspondence of the late Frances Stewart, E. S. Dunlop, édit. (2e éd., Montréal, 1902), 18–19, 23–24, 52, 64–65, 70, 72, 128.— Valley of the Trent (Guillet), xliii, 49, 59.— Cobourg Star, 18 sept. 1839.— Montreal Herald, 15 nov. 1817.— Armstrong, Handbook of Upper Canadian chronology, 201.— Guillet, Lives and times of Patriots, chap. 17.— D. E. Wattie, « Cobourg, 1784–1867 » (2 vol., thèse de m.a., Univ. of Toronto, 1949).— Jennifer Brown, « Ultimate respectability : fur-trade children in the « civilized world », Beaver, outfit 308 (printemps 1978) : 53.— A. H. Young, « The Bethunes », OH, 27 (1931) : 559.

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Peter Ennals, « HENRY, ROBERT », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 11 oct. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/henry_robert_8F.html.

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Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1985
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