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MACLEAN, DUNCAN, marchand, fermier, homme politique et rédacteur en chef, né entre le 15 avril et le 8 août 1799, probablement en Écosse ; décédé le 15 avril 1859 à Charlottetown.

Il ne semble pas subsister de document qui indiquerait le lieu de naissance de Duncan Maclean, mais peu de temps après sa mort, un de ses contemporains, Edward Whelan*, parla de lui comme d’un « Écossais ». Bien qu’on ne dispose pas d’informations précises sur ses études, Maclean passait généralement pour avoir reçu une bonne instruction, particulièrement en mathématiques et en sciences, matières qu’il décrivait en 1843, dans une requête, comme constituant son « principal divertissement et plaisir ». Dans ce même document, il parlait de lui comme d’« un arpenteur assermenté ». On sait qu’il se maria au moins deux fois et qu’il eut au moins cinq enfants. Selon ses dires, datant aussi de 1843, il immigra dans « les colonies » vers 1818. Sa destination était apparemment les Antilles, où il se « livra exclusivement au commerce ». Il faisait partie des « Colonial Dragoons » et, à ce titre, il participa à la répression d’une révolte des esclaves à Antigua en 1831. L’année suivante, il alla s’installer à Montréal, où il reprit son occupation de marchand. Le rôle qu’il a peut-être joué dans la rébellion de 1837–1838 souleva plus tard de nombreuses protestations à l’Île-du-Prince-Édouard, et il semble, d’après ses dires et d’après le témoignage fait plusieurs années plus tard par des personnages en vue de Montréal, qu’il était du côté du gouvernement. Néanmoins, jusqu’au xxe siècle le bruit courut dans l’île qu’il avait été secrétaire de Louis-Joseph Papineau* et qu’il avait fait partie des fugitifs ; il se peut que cette histoire, comme celle qui concerne une prétendue faillite à Montréal, soit née d’une confusion entre lui et quelqu’un d’autre portant le même nom.

Maclean était déjà arrivé à l’Île-du-Prince-Édouard à la fin de 1839, et son départ de Montréal semble avoir reposé sur deux motifs. Il voulait « échanger une vie de commerçant contre une vie d’agriculteur », et il était « désireux d’habiter dans ce qu’[il] aginai[t] alors comme étant une colonie moins agitée que le Canada ». Le 1er novembre 1839, pour la somme de £100, il acheta de Charles Worrell les travaux déjà exécutés dans une ferme de 100 acres avantageusement située dans le domaine Cundall, à New London, sur le lot 20, dans le nord-ouest du comté de Queens ; l’entente comportait un bail de 1 000 ans, à un loyer annuel de £5 (cours d’Angleterre). Sa femme mourut le 30 mars 1840 à l’âge de 20 ans ; il se remaria à la fin de 1844 avec Ann Smith, de New London. Il continua à se consacrer à l’agriculture au cours des années – en 1851, il déclara avoir défriché plus de 40 acres depuis son arrivée – et occupa la même propriété jusqu’à sa mort.

En 1842, trouvant que l’agriculture n’était pas suffisante pour satisfaire son « activité habituelle », Maclean se porta candidat dans une circonscription électorale du comté de Queens qui comprenait New London, et remporta la victoire. Durant la campagne, il fit, de toute évidence, une mauvaise impression sur le lieutenant-gouverneur, sir Henry Vere Huntley*. Le 13 août 1842, en envoyant au ministère des Colonies une liste des députés à l’Assemblée, Huntley, en plus d’indiquer que Maclean était arpenteur et de reconnaître qu’on le disait « intelligent et instruit », décrivit le message électoral qu’il avait publié, ainsi que ses discours électoraux, comme « très violemment révolutionnaires ». Plus d’une fois au cours des années suivantes, Maclean exprima l’opinion que l’histoire, prétendument répandue par ses ennemis politiques, selon laquelle il avait été un rebelle et un fugitif dans le Bas-Canada, l’avait en fait aidé à se faire élire. Sa conduite durant la session de 1843, session au cours de laquelle il fit des remarques acerbes sur la sincérité du lieutenant-gouverneur, incita James Douglas Haszard*, rédacteur en chef de la Royal Gazette de Charlottetown, à ajouter au compte rendu des débats un commentaire regrettant la conduite de Maclean. Ces attaques verbales augmentèrent l’antipathie de Huntley pour Maclean ; le lieutenant-gouverneur informa Londres que ce dernier était « un nouveau député peu doué, mais infiniment rancunier ».

Tout au long des années 1830, le monde politique de l’Île-du-Prince-Édouard avait été secoué par la question des terres, en particulier par la controverse sur une solution qui avait été proposée, l’escheat ; les défenseurs de cette solution, dirigés par William Cooper*, soutenaient que l’on devrait confisquer les titres des propriétaires terriens, qui ne remplissaient pas les conditions fixées dans leurs concessions, et remettre les terres aux locataires. Les partisans de l’escheat, qui avaient remporté les élections de 1838, perdirent celles de 1842 ; cette tournure des événements plut à Huntley et au ministère des Colonies. Cependant, la lutte contre la tenure à bail se poursuivit à travers la campagne et, le 28 février 1843, une assemblée publique eut lieu à New London ; James Scott, qui était venu dans l’île avec Maclean et qui semblait habiter chez ce dernier, fit fonction de secrétaire de l’assemblée. On y adopta une proposition qui déclarait que le gouvernement de l’île était dirigé « dans l’intérêt de deux douzaines de spéculateurs fonciers, de leurs parents, protégés et parasites ». En mars, Maclean apporta le procès-verbal de cette assemblée à John Ings et à James Barrett Cooper*, deux éditeurs de journaux de Charlottetown ; tous deux refusèrent de le publier en entier, et au moins un des éditeurs remit aux autorités une copie de la résolution accusatrice. Après avoir été informé par le procureur général Robert Hodgson* et le solliciteur général James Horsfield Peters* que cette proposition était diffamatoire et que Maclean, par ses actes, était juridiquement responsable de la mise en circulation d’un écrit diffamatoire, Huntley ordonna qu’on le poursuive en justice. Même si le lieutenant-gouverneur avait voulu poursuivre d’autres personnes, Scott avait quitté l’île « très peu de temps après l’assemblée » et Maclean avait pris la précaution d’effacer le nom du président sur le procès-verbal de l’assemblée. En conséquence, bien que Maclean n’ait pas été présent, il fut accusé de diffamation à l’endroit du gouvernement.

Maclean amena un nombre considérable de partisans de la région de New London à son procès devant la Cour suprême, à Charlottetown, à la fin de juin 1843 ; ces partisans, dont le nombre fut estimé à « environ 160 » par Huntley et à un minimum de 911 par Maclean, remplirent la salle d’audience et encerclèrent le palais de justice. Dans ce qui était probablement une autre tentative de faire ressortir le caractère politique de cette cause, Maclean assura lui-même sa défense devant le président du tribunal, Edward James Jarvis, même s’il pouvait compter sur l’aide d’un avocat, Charles Young, dont il refusa les conseils. Ces tactiques ne l’empêchèrent pas d’être condamné par un jury spécial composé de personnes qui disposaient d’une quotité de propriété plus élevée que celle habituellement requise ; la liste de ce jury avait été dressée à la demande du procureur général, Hodgson, qui croyait que cete cause « nécessitait un jury d’une intelligence supérieure à celle que l’on [pouvait] trouver dans la classe habituellement choisie pour [être] membre du jury de jugement dans cette île ». Néanmoins, Maclean échappa à la sentence parce que Huntley, qui affirmait lui-même avoir entamé ces poursuites pour discréditer Maclean aux yeux de ses partisans, demanda que la sentence ne soit pas prononcée, afin d’éviter de faire de Maclean un martyr tout en donnant une leçon sur les limites légales de la liberté de parole.

Même si le jury rendit son verdict le 30 juin 1843, Maclean n’apprit la décision de Huntley qu’au moment où Hodgson l’annonça devant le tribunal, le 12 janvier 1844. Dans l’intervalle, soit le 8 août, Maclean avait écrit au secrétaire d’État aux Colonies, lord Stanley, pour solliciter le poste d’arpenteur général, qui était déjà occupé par George Wright*. Même si sa requête visait l’Île-du-Prince-Édouard, il disait aussi que, si on le lui demandait, il irait «  que l’on puisse lui commander » d’aller ; dans une lettre ultérieure, il spécifia qu’il était prêt à faire de l’arpentage dans « le cercle polaire », en Afrique ou en Australie. En transmettant la requête de Maclean, Huntley, dont la santé avait apparemment souffert du climat pendant qu’il était en fonction en Afrique occidentale, suggéra que l’on donne à Maclean un poste à cet endroit, lui qui déclarait avoir une solide constitution. À part la nature bizarre de la requête de Maclean dans les circonstances, son geste incita très probablement à penser qu’avec un encouragement suffisant, il pourrait être amené à quitter le camp réformiste. Le 8 septembre 1843, une lettre anonyme, apparemment écrite par un réformiste et publiée dans un journal conservateur, défiait Maclean d’établir la fausseté de la rumeur selon laquelle il avait « directement proposé au gouvernement [de la métropole] de laisser tomber [les réformistes] et la contestation en échange d’un poste à £200 ou £300 par année ».

Durant son premier mandat de député à l’Assemblée, Maclean vota généralement avec la minorité, et même s’il ne joua pas un rôle dominant dans les débats, son langage violent, particulièrement dans le cas de la question des terres, le conduisit à de vifs échanges avec des chefs tories tels que Joseph Pope* et Edward Palmer*. Par contre, dès 1847, à l’époque où la question du gouvernement responsable dominait la politique de l’île, il votait avec les tories lors des plus importants désaccords entre les partis. Il refusa absolument de suivre Alexander Rae et d’autres chefs réformistes quand ils décidèrent de s’allier, pour des considérations d’intérêt, à Huntley, qui s’était brouillé avec le family compact. Maclean n’avait jamais pardonné au lieutenant-gouverneur son procès en diffamation, et pas plus tard que le 8 avril 1846, il avait déclaré devant l’Assemblée qu’il « n’éprouvait [...] que de la pitié et du mépris » pour lui.

Plus tard en 1846, Maclean avait été réélu après avoir publié dans son message électoral qu’il s’engageait à appuyer le principe du gouvernement responsable en tant qu’étape vers l’abolition de la tenure à bail. Pour expliquer sa prise de position, il allégua que les chefs réformistes, en omettant d’insister sur le règlement de la question des terres comme condition indispensable de leur appui à Huntley, s’étaient montrés opportunistes : ils avaient laissé tomber les principes pour parvenir au pouvoir. En fait, même si on pouvait s’interroger sur les motifs de Maclean, qui devaient sûrement comporter un certain ressentiment du fait que Rae n’avait pas suivi ses conseils, il avait raison de trouver cette nouvelle alliance bizarre. Mais même après que Huntley eut été remplacé et que son successeur, sir Donald Campbell*, eut rompu avec les réformistes au sujet du gouvernement responsable, Maclean continua d’appuyer les chefs tories. Au cours des sessions de 1848 et de 1849, il participa très peu souvent aux débats, et il fut battu aux élections de février 1850. Sa carrière de député était terminée et, en 1853, avant les élections générales suivantes, il refusa de se porter candidat.

Au début de mars 1850, Maclean était devenu rédacteur en chef de l’Islander, journal tory dont le propriétaire était John Ings, un des éditeurs qui avaient déposé contre lui lors de son procès en diffamation. Même si Ings avait fondé l’Islander en 1842, ce n’est qu’après qu’il eut engagé Maclean que des éditoriaux sur des sujets d’intérêt régional commencèrent à être publiés régulièrement. Durant les années 1850, le rôle de Maclean dans la vie politique de l’île fut celui de principal porte-parole du parti tory dans la presse. Il publia colonne sur colonne de sévères attaques contre le triumvirat réformiste composé de George Coles*, de James Warburton et d’Edward Whelan, sous forme d’éditoriaux, de lettres ouvertes signées et de comptes rendus apocryphes de leurs faits et gestes présentés comme de la « correspondance interceptée » entre « Jarge Coals », « Jamie Wearbottom » et « Neddy ». Il déversa aussi des flots d’invectives sur les lieutenants-gouverneurs sir Alexander Bannerman* et sir Dominick Daly*, qu’il accusait de partialité ; durant leurs mandats, les libéraux furent au pouvoir presque sans interruption de 1851 à 1859.

Au grand plaisir et au grand amusement des lecteurs, Maclean mena une lutte continuelle, durant cette décennie, avec le libéral Whelan, rédacteur en chef de grand talent de l’Examiner de Charlottetown. Le poète de l’île, John LePage*, contemporain des deux hommes, écrivit : « Tous les deux entraînés au combat intellectuel ardent, ils ont écrit – comme les gladiateurs romains se sont battus – pour leur survie ! » Maclean avait collaboré au premier journal de Whelan dans l’île, le Palladium de Charlottetown, fondé en 1843, et ils avaient connu, selon les mots de Whelan, une « longue et très étroite amitié ». Mais ils finirent par se brouiller et, en plus d’être des adversaires politiques et des journalistes rivaux, ils devinrent des ennemis personnels acharnés ; Maclean traitait Whelan de « sale gueule de voyou », et Whelan qualifiait Maclean d’« âne ». Maclean gagna un procès pour diffamation contre Whelan ; cependant, le quart de penny symbolique de dommages et intérêts qu’obtint Maclean amena Whelan à crier sur les toits que c’était là la valeur que le juge accordait à la réputation du plaignant. Néanmoins, en dépit de toutes les insultes et de tous les sarcasmes qu’ils échangèrent, chacun semble avoir eu un réel respect pour l’autre, le considérant comme un antagoniste digne d’une attention sérieuse.

Même si Maclean dirigeait un journal tory pour un éditeur tory, il conserva une certaine indépendance politique. Cela fut particulièrement évident à la fin des années 1850 ; à cette époque, il refusa catégoriquement de participer à la campagne des tories en faveur de la lecture et de l’enseignement de la Bible dans les écoles. Habile à disséquer la logique des arguments, il soutint que, en dépit des intentions avouées de Palmer et de Thomas Heath Haviland*, les termes de la proposition qu’ils avaient présentée à l’Assemblée en 1857 pour mettre cette question sur le tapis, comportaient l’idée d’obligation, et que l’usage obligatoire de la Bible dans les écoles regroupant plusieurs confessions religieuses chasserait l’importante minorité catholique du système d’enseignement public, ce qui diviserait la colonie selon les religions. Cette position s’accordait avec celle qu’il avait soutenue à l’Assemblée au cours de 1845, en critiquant vivement une proposition d’introduire la Bible à la Central Academy, une grammar school de Charlottetown subventionnée par le gouvernement. À cette occasion, il avait déclaré que, « quand il était un jeune garçon à l’école, il avait été forcé, avec d’autres, de lire la Bible en tant que livre scolaire, et [que] l’effet produit sur son esprit a[vait] été une aversion pour la lecture de la Bible depuis ce temps ». En fait, Maclean était généralement considéré comme un « infidèle », terme. utilisé à l’époque dans l’île pour désigner un athée, un agnostique, un unitarien ou un apostat. Il disait lui-même : « J’étais connu pour avoir des opinions indépendantes en religion. »

La controverse sur l’introduction de la Bible dans les écoles fournit une des rares occasions, dans les années 1850, où Maclean et Whelan, catholique d’origine irlandaise, trouvèrent un terrain d’entente et s’appuyèrent mutuellement. En tant qu’« infidèle », Maclean représentait une cible de premier choix pour le Protector and Christian Witness, journal ultra-protestant de Charlottetown qui appuyait les chefs tories sur cette question. Il s’éloigna suffisamment de son parti pour qu’Ings lui interdise, pendant un certain temps, de parler de la question de la Bible dans les éditoriaux de l’Islander, ce qui le força à recourir aux lettres signées et, au moins une fois, à payer une annonce dans un autre journal conservateur. Et pourtant, après que les tories eurent remporté les élections de 1859 – grâce, principalement, à une exploitation efficace de la question de la Bible – ils décidèrent de le nommer commissaire des Terres de la couronne. En examinant cette nomination, Whelan déclara que Maclean était « tout à fait qualifié pour s’acquitter de [ces] fonctions ». Cependant, Maclean ne vécut pas assez longtemps pour assumer ce poste. En effet, pendant le trajet de New London à Charlottetown, où il se rendait pour être assermenté, il attrapa un gros rhume qui dégénéra en pleurésie et en inflammation, entraînant sa mort soudaine le 15 avril 1859, après une semaine de maladie. Sa femme, Ann, lui survécut, ainsi que deux fils et trois filles nés de leur mariage. Il mourut intestat, et, en 1860, une des deux personnes qui se portèrent garantes pour les administrateurs de sa modeste succession n’était autre que Whelan.

Durant toute sa vie publique à l’Île-du-Prince-Édouard, Maclean fut l’objet d’une controverse constante. Même sa conduite à Antigua et dans le Bas-Canada devint un sujet de discussion. Pendant des années, il accabla le ministère des Colonies de requêtes et de plaintes, quelquefois incohérentes et injurieuses, écrites dans un gribouillage pratiquement illisible. En transmettant à Londres deux des lettres de Maclean en janvier 1857, le lieutenant-gouverneur Daly déclara que ces lettres l’amenaient à croire que « les doutes qu’ [il] a[vait] souvent entendu exprimer quant à la santé mentale de leur auteur, n’ [étaient] pas sans fondement ». Il continuait en disant : « Les habitudes de l’ivrognerie, à laquelle il s’adonne depuis longtemps, sont en train de produire leurs effets ordinaires dans son cas, et il n’a pas la moindre influence dans cette société. » Il affirmait ensuite que Maclean vivait à 30 milles de Charlottetown parce que cela lui donnait « l’avantage d’une plus grande sécurité personnelle face aux conséquences qui pourraient résulter de ses attaques, calomnieuses contre la réputation personnelle ». À Londres, en 1857, Arthur Johnstone Blackwood, commis principal du ministère des Colonies, fit la remarque, au sujet d’une des lettres de Maclean, que « jamais communication plus calomnieuse et grossière n’a[vait] été adressée à ce ministère – à moins que ce ne puisse être par [Maclean] lui-même antérieurement ». Telle fut l’impression peu flatteuse qu’il créa chez de nombreux dirigeants : un polémiste extraordinairement combatif, et peut-être déséquilibré, qui allait jusqu’aux injures personnelles.

Pourtant, durant de nombreuses années, les contemporains de Maclean à l’Île-du-Prince-Édouard gardèrent de vifs souvenirs de son talent et de la force de sa logique comme écrivain, ainsi que de ses batailles épiques avec Whelan. Les écrits de Maclean dans l’Islander révèlent une curiosité des questions scientifiques en général, et de l’astronomie en particulier, sujet sur lequel il donna plusieurs conférences publiques, même s’il n’était pas un conférencier accompli. Intéressé par les sciences, sceptique quant à la religion et manifestement irrespectueux envers l’autorité, il semble avoir réuni les qualités essentielles d’un radical du xixe siècle qui était aussi un excentrique. Cependant, à l’Île-du-Prince-Édouard, il ne tarda pas à quitter le camp des radicaux et à devenir porte-parole des conservateurs. Les raisons de sa conversion – dont Whelan déclara souvent douter de la sincérité – ne sont pas parfaitement claires. Il s’agissait probablement d’un mélange de rapports personnels, de stratégie politique et de perspectives d’avenir : des conflits avec d’autres fortes personnalités du parti réformiste, des divergences de vue sur la ligne de conduite à suivre au moment où Huntley et le family compact se dissocièrent, et la prise de conscience que les tories pouvaient mieux que les réformistes lui assurer la sécurité. Comme on pouvait s’y attendre, il tenta de minimiser l’importance de son changement d’orientation – « de tout l’ancien parti libéral, seul D. Maclean n’a jamais chancelé », écrivait-il en 1850 – et de justifier sa nouvelle adhésion en évoquant les prétendues trahisons, vis-à-vis de la cause réformiste, de Coles, de Whelan et de Warburton ; il donna d’ailleurs aux membres de leur parti le nom de « Snatchers » (chipeurs), à cause de leur présumé désir de s’emparer des traitements reliés aux fonctions officielles. Les tories de l’île employèrent cette épithète pendant de nombreuses années, et Whelan répliqua avec l’étiquette « Snarlers » (grogneurs) ; il appelait Maclean « le chef du clan des grogneurs ».

Étant une énigme sur le plan idéologique, un renégat sur le plan politique et un inadapté sur le plan personnel, en plus d’être un « infidèle », Duncan Maclean, peut-être en partie pour ces raisons, est presque totalement absent des ouvrages d’histoire de l’Île-du-Prince-Édouard. Il mérite pourtant que l’on se souvienne de lui comme d’un personnage important du monde politique et une figure exceptionnelle du monde journalistique du milieu du xixe siècle, et particulièrement des années 1850, au moment où il était rédacteur en chef de l’Islander ; il soutenait d’ailleurs que ce journal, dans la deuxième moitié de cette décennie, avait le plus grand tirage de tous les journaux de la colonie. Excentrique et excessif, il faisait aussi preuve d’une force et d’un talent que l’on devait prendre en considération.

Ian Ross Robertson

Mis à part ce qu’on trouve dans W. L. Cotton, « The press in Prince Edward Island », Past and present of Prince Edward Island [...], D. A. MacKinnon et A. B. Warburton, édit. (Charlottetown, [1906]), 115 ; et I. R. Robertson, « Religion, politics, and education in Prince Edward Island from 1856 to 1877 » (thèse de m.a., McGill Univ., Montréal, 1968), chap. 1–3, et « The Bible question in Prince Edward Island from 1856 to 1860 », Acadiensis (Fredericton), 5 (1975–1976), no 2 : 13–15, 22, les renseignements essentiels sur Duncan Maclean doivent être puisés dans les sources imprimées.

On peut se renseigner sur la carrière parlementaire de Maclean en consultant Î.-P.-É., House of Assembly, Journal, 1843–1849, et les comptes rendus des débats publiés dans la Royal Gazette (Charlottetown), 1843–1849. Toutefois, pour l’année 1845, il faudrait lire également les articles parus dans l’Islander et le Palladium, deux journaux de Charlottetown. Les numéros de l’Islander, datés de 1850 à 1859, soit les années pendant lesquelles Maclean en était le rédacteur en chef, existent encore ; une note dans laquelle les typographes se plaignent de son écriture parut dans le numéro du 19 nov. 1852. La rivalité journalistique qui opposa Maclean à Edward Whelan est évoquée en vers dans l’ouvrage de John LePage, The Island minstrel, miscellaneous papers (Charlottetown, 1885), 13–17, et en prose dans l’Island Argus (Charlottetown), 21 sept. 1875. Pour ce qui est de son rôle au Palladium de Whelan, voir : Examiner (Charlottetown), 11 sept. 1848, 18 juin 1855, 31 oct. 1859 ; et PRO, CO 226/83 : 66. On trouve des notices nécrologiques dans l’Islander, 15, 22 avril 1859 ; l’Examiner, 18 avril 1859 ; et le Monitor (Charlottetown), 20 avril 1859. Un hommage poétique parut dans l’Islander, 24 juin 1859.

Au cours des ans, Maclean écrivit de nombreuses lettres ou mémoires dans lesquels il se plaint ou se justifie et dévoile un peu de sa vie personnelle. Le plus utile de ces documents se trouve au PRO, CO 226/66 : 121–122, 154–162 ; dans l’Islander, 25 janv. 1856, il fait allusion à un cas d’erreur sur la personne ; on l’aurait confondu avec un marchand homonyme de Montréal. On peut trouver au PRO, CO 226/66 : 123–124, 167–168, des déclarations signées par des Montréalais qui témoignent de la loyauté de Maclean pendant la rébellion du Bas-Canada.

Les événements et la controverse ayant trait au procès de Maclean pour diffamation en 1843 sont racontés dans l’Islander, 17 mars, 30 juin, 7 juill., 25 août, 8 sept., 3 nov. 1843, 12 janv. 1844 ; le Colonial Herald, and Prince Edward Island Advertiser (Charlottetown), 1er, 8 juill., 4, 25 nov. 1843, 13 janv. 1844 ; le Palladium, 16 nov. 1843, 7 mars 1844 ; PAPEI, RG 6, Supreme Court, minutes, 27–28, 30 juin, 1er juill., 31 oct., 2 nov. 1843, 12 janv. 1844 ; PRO, CO 226/65 : 195–235, 251, 256 ; 226/66 : 125–126, 142–147.

Les documents relatifs aux transactions de Maclean dans l’île se trouvent aux PAPEI, RG 16, Land registry records, conveyance reg., liber 47 : fo 48 ; liber 48 : fo 99 ; liber 77 : fo 188 ; liber 86 : fo 698. Les documents d’ordre administratif se rapportant aux biens de Maclean sont conservés à la Supreme Court of P.E.I. (Charlottetown), Estates Division.

Pour d’autres références à Maclean, voir : PRO, CO 226/64 : 30–31 ; 226/65 : 90 ; 226/80 : 599 ; 226/88 : 4–6, 9 ; Examiner, 11 avril, 18 juill. 1859 ; Islander, 17 mai 1850, 29 août 1851, 18 févr., 25 mars 1853 ; Protector and Christian Witness (Charlottetown), 1er avril, 15 juill. 1857 (copies aux PAPEI).  [i. r. r.]

Bibliographie générale

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Ian Ross Robertson, « MACLEAN, DUNCAN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 18 mars 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/maclean_duncan_8F.html.

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Auteur de l'article:    Ian Ross Robertson
Titre de l'article:    MACLEAN, DUNCAN
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 8
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1985
Année de la révision:    1985
Date de consultation:    18 mars 2024