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Titre original :  Allan Studholme. Toronto Daily Star, 28 July 1919, page 2.

Provenance : Lien

STUDHOLME, ALLAN, monteur de poêles, représentant d’une maison d’édition, chef syndical et homme politique, né le 8 décembre 1846 à Drakes Cross, Angleterre, fils de John Studholme et d’une prénommée Hannah ; le 27 avril 1874, il épousa à Dundas, Ontario, Priscilla Steam, et ils eurent trois fils et une fille ; décédé le 28 juillet 1919 à Hamilton, Ontario.

Allan Studholme grandit en Angleterre, dans les Midlands, où il fit son apprentissage chez un fermier. Jeune homme, il s’engagea dans le mouvement de syndicalisation des ouvriers agricoles, fondé par Joseph Arch, qui influença sûrement ses positions politiques. Après avoir occupé divers emplois, Studholme immigra au Canada en 1870 ; il trouva du travail à Dundas, d’abord à la fonderie Gartshore, puis à la fabrique de formes à chaussures Young. En 1872, à Hamilton, non loin de Dundas, il assista à l’immense manifestation ouvrière en faveur de la journée de travail de neuf heures [V. James A. Ryan*]. L’année suivante, il s’installa à Toronto et apprit à assembler des poêles de fonte à la E. and C. Gurney and Company [V. Edward Gurney*]. Il exerça ce métier à Hamilton, mais dut l’abandonner au cours de la crise économique des années 1870. Ensuite, il fut représentant, dans le comté de Haldimand, d’une maison d’édition de Guelph.

D’abord favorable à la politique libre-échangiste des libéraux, Studholme, comme beaucoup de travailleurs canadiens, en vint à éprouver du mécontentement à l’égard des partis traditionnels parce qu’ils négligeaient les préoccupations de la classe ouvrière. De retour à Hamilton au début des années 1880, il s’inscrivit aux Chevaliers du travail, nouvelle organisation qui gagnait des adeptes dans toute l’Amérique du Nord. Il fut « maître ouvrier » d’une section d’ouvriers métallurgistes, l’assemblée locale no 2225, et, au sein de la Hamilton Labor Political Association, formée en octobre 1883, participa au lancement des premières campagnes électorales menées par des travailleurs indépendants. Inscrit sur une liste noire à cause de cette activité et parce qu’il avait dirigé une grève de monteurs de poêles en 1883, il devint directeur du magasin coopératif des Chevaliers du travail. Un accident survenu en 1886 le força à garder le lit durant plus de un an. En 1887, sur l’avis d’un médecin, il s’embarqua pour l’Australie, où il fut représentant de la maison d’édition pour laquelle il avait travaillé à Guelph.

Revenu à Hamilton en 1892, Studholme trouva un emploi de monteur de poêles à la fonderie de la Burrow, Stewart and Milne et s’engagea à nouveau dans le mouvement ouvrier. Élu vice-président du Stove-mounters’ and Steel Range Workers’ International Union en 1901 et en 1902, puis président en 1903 et en 1904, il resterait au comité de direction de ce syndicat jusqu’en 1912. En même temps, il figura parmi les dirigeants de la section hamiltonienne de ce syndicat et, jusqu’à la Première Guerre mondiale, fut délégué au Trades and Labor Council de Hamilton et au Congrès des métiers et du travail du Canada. Grâce à sa notoriété, il obtint une place au conseil d’arbitrage formé à l’automne de 1906 pour régler un différend entre la Hamilton Street Railway Company et ses employés, dirigés par John Wesley Theaker. La compagnie s’étant dérobée à la recommandation sur les hausses de salaire, une grève tumultueuse éclata en novembre ; ce fut l’un des épisodes les plus dramatiques de l’histoire des conflits de classe à Hamilton.

Après le décès, en septembre, du député de Hamilton East à l’Assemblée législative, Henry Carscallen, la politique locale prit une tournure inattendue. En partie parce que le Congrès des métiers et du travail du Canada avait résolu en même temps de former un parti ouvrier canadien, des membres des syndicats de métier locaux, réunis en assemblée, choisirent Studholme comme candidat ouvrier indépendant à l’élection partielle provinciale qui devait se tenir le 4 décembre. Pris au dépourvu et divisés par des querelles internes, les conservateurs eurent du mal à trouver un nouvel aspirant ; finalement, un riche avocat, John Jackson Scott, décida de se présenter. Les libéraux choisirent de ne pas présenter de candidat, estimant que leurs intérêts et ceux du mouvement ouvrier étaient « identiques dans [cette] élection ». Le Times (Hamilton), libéral, le Hamilton Herald, à tendance libérale, et les travailleurs d’élection libéraux soutenaient tous Studholme. Néanmoins, ce furent des chefs syndicaux qui dirigèrent sa campagne. Son programme se résumait à la déclaration de principes adoptée à l’assemblée du Congrès des métiers et du travail du Canada en 1898 et reprise par le nouveau Parti travailliste du Canada en septembre 1906. Toutefois, sur les tribunes, Studholme passa le plus clair de son temps à pourfendre le gouvernement conservateur de James Pliny Whitney, et notamment à dénoncer deux décisions manifestement impopulaires : celle d’adjuger un contrat, à Hamilton, à des détenus sous-payés, en « concurrence directe avec la main-d’œuvre libre », et celle de fermer l’école normale locale.

Le facteur déterminant de l’élection fut la grève des tramways. Dans un contexte où les foules de militants faisaient face à des soldats et à des policiers, il n’était pas étonnant que les partisans et les travailleurs d’élection du mouvement ouvrier brandissent « le vieil épouvantail du capital ennemi de la main-d’œuvre », pour reprendre les termes du journal proconservateur Hamilton Spectator, et traitent Scott de « capitaliste bouffi et [d’]avocat à la solde de certains monopoles, y compris l’abominable Cataract Power Company », propriétaire de la compagnie de tramways [V. John Patterson]. Toutefois, le jour même du scrutin, ce mécontentement massif ne se traduisit pas par une majorité écrasante en faveur du candidat ouvrier. Studholme récolta 853 voix de plus que son adversaire. Certes, ce résultat suffit pour provoquer des ondes de choc dans toute la province, mais en fait, à Hamilton, la participation au scrutin s’avéra inférieure d’un tiers à ce qu’elle avait été aux élections générales de 1905. Même si la grève avait détourné des vieux partis un grand nombre de travailleurs de Hamilton, ces derniers n’avaient pas pour autant embrassé la cause de Studholme, à savoir une politique ouvrière indépendante. À l’approche des élections de 1908, les conservateurs sentirent que, sans le problème de grève comme la dernière fois, ils pouvaient battre Studholme, d’autant plus qu’un libéral et un socialiste se présentaient aussi. Studholme l’emporta quand même par 75 voix sur John Jackson Scott. Ses victoires furent plus décisives en 1911 et en 1914.

Les succès électoraux de Studholme étaient dus en partie au travail d’organisation du Parti ouvrier indépendant, formé à Hamilton en novembre 1907, et à l’appui du Herald, journal très lu, mais ils découlaient bien davantage de la manière dont le « petit monteur de poêles » remplissait sa fonction à Queen’s Park. Jusqu’en 1919, Studholme serait le seul député ouvrier à l’Assemblée législative de l’Ontario. Ce métallurgiste trapu à favoris blancs ne semblait pas vraiment fait pour le rôle d’unique porte-parole des travailleurs. Les comptes rendus de ses discours révèlent rarement de l’éloquence ou une pensée originale. Ses interventions décousues mettaient souvent à l’épreuve la patience de la Chambre, quoique les journalistes aient noté en 1913 une amélioration de son style. Il ne publia à peu près rien. En outre, même s’il était très connu et si on l’invitait à prendre la parole dans toute la province, il ne manifestait aucune des qualités de chef grâce auxquelles son influence dans les cercles ouvriers de l’Ontario aurait pu s’étendre. Pourtant, Studholme était probablement beaucoup plus représentatif des syndicats de métiers que certains de ses distingués contemporains du mouvement ouvrier canadien tels Arthur W. Puttee*, de Winnipeg, et James Simpson*, de Toronto. Il avait gardé un bon nombre des plus belles qualités de l’artisan issu de l’atelier : une honnêteté parfaite, de la compassion, du bon sens et une chatouilleuse fierté de sa classe.

Jamais, dans sa carrière de député, Studholme ne pactisa avec les libéraux ou les conservateurs. Ainsi, en 1908, il expliqua à l’ancien sous-ministre du Travail William Lyon Mackenzie King*, qui lui demandait de soutenir sa campagne électorale dans Waterloo North : « Les ouvriers ont perdu toute confiance dans les hommes de parti et sont déterminés à placer des membres de leur classe à la Chambre afin d’avoir leur mot à dire dans la conception des lois sous lesquelles ils doivent vivre. » Studholme, qui avait la conviction d’incarner le « Parti ouvrier » à l’Assemblée, portait pendant les sessions un petit chapeau noir qui rappelait la casquette du chef travailliste britannique James Keir Hardie. En 1909, reconnaissant sa position particulière, Whitney lui fit quitter l’arrière-ban et lui offrit un siège dans la première rangée. Néanmoins, Studholme subissait de la discrimination à cause de son indépendance : on fixait ses discours à des heures tardives et l’assistance était clairsemée.

Au cours de ses 13 années de solitude à l’Assemblée, Studholme remporta peu de victoires concrètes. Pourtant, la pugnacité avec laquelle il représentait la classe ouvrière embarrassa souvent le gouvernement conservateur au point de l’obliger à justifier son inactivité en matière de politique sociale et industrielle. En plus, elle fut l’un des facteurs qui poussèrent l’opposition libérale à se doter d’un programme plus réformiste. À la faveur du débat sur le budget, au début de chaque session, Studholme dénonçait l’indifférence du gouvernement à l’égard des ouvriers et annonçait les problèmes qu’il voulait soulever : c’était là sa tactique favorite. Il préconisa avec constance l’amélioration des conditions de travail. Il appartint au comité spécial de 1907 sur le travail des enfants, qui se contenta de recommander quelques restrictions ; mais de sa propre initiative cependant, il dénonçait régulièrement en Chambre le travail des enfants. En 1917, il ferait pression en faveur de l’augmentation des pouvoirs des inspecteurs d’usine. À la suite d’une grève déclenchée en 1907 par les téléphonistes de Toronto, il parraina un projet de loi visant à réduire leurs heures à cinq par quart de travail. En 1911 et en 1912, il s’en prit à une loi insuffisante sur les opérateurs de machines à vapeur et réussit à empêcher la mise au rancart d’un projet de loi visant à améliorer la sécurité sur les chantiers de construction. En 1912, comme le gouvernement Whitney tardait à légiférer pour accorder la journée de huit heures aux mineurs, il protesta que ce gouvernement « fai[sait] le jeu des propriétaires miniers ». De même, il défendit haut et fort la loi de 1914 sur l’indemnisation des accidentés du travail, que les milieux d’affaires, croyait-il, tentaient d’éroder. Sa préoccupation la plus constante avant la guerre fut l’immigration de travailleurs agricoles et de domestiques, surtout ceux parrainés par l’Armée du salut. En restant dans les villes, faisait-il valoir, ces immigrants venus avec l’aide du gouvernement inondaient le marché du travail et provoquaient une baisse des salaires. Sa plus célèbre manœuvre législative en vue d’améliorer les conditions de travail fut probablement le projet de loi qu’il présenta à chaque session de 1910 à 1914, projet accordant la journée de huit heures et un salaire minimum de 0,20 $ l’heure aux ouvriers non agricoles. Ni les conservateurs ni les libéraux ne soutenaient cette mesure ; en 1913, personne en Chambre n’appuya sa proposition.

Studholme s’efforça aussi de préserver l’épargne des ménages ouvriers. Il exprimait régulièrement des préoccupations quant à la hausse du coût de la vie et, tout au long de la guerre, il dénonça le moindre indice de profits excessifs sur la nourriture. Pendant la crise économique de 1913–1915, il accusa le gouvernement d’être insensible à la misère des chômeurs et réclama sans succès des lois plus sévères afin que les travailleurs ne perdent pas leurs maisons pour défaut de paiement des hypothèques. S’inspirant probablement de son expérience au sein du mouvement des ouvriers agricoles en Angleterre, il pressa le gouvernement de William Howard Hearst* d’appuyer des projets de colonisation dans le nord de l’Ontario. Aussi fut-il ravi lorsque, en 1917, le gouvernement intégra des projets de ce genre à son programme de réinstallation des soldats. Studholme rappelait souvent à l’Assemblée les besoins des anciens combattants, envers qui, d’après lui, les ouvriers éprouvaient une sympathie particulière. En 1918, il aida le sergent William Varley, candidat « soldat-ouvrier » dans une élection partielle provinciale, à faire campagne. Conscient que les maisons à faible coût étaient très en demande après la guerre, il pressa le gouvernement, en 1919, de rendre plus généreuses les dispositions de la nouvelle loi sur l’habitation.

L’analyse sociale et économique que Studholme faisait des problèmes ouvriers était davantage celle d’un libéral conscientisé de la classe laborieuse, dans la tradition du radicalisme de la fin du xixe siècle, que celle d’un socialiste convaincu. D’ailleurs, il fustigeait souvent les socialistes qu’il rencontrait dans le mouvement ouvrier. Apparemment, ses interventions aux assemblées du Congrès des métiers et du travail du Canada ne visaient pas des individus en particulier, mais les « idéologues » qui dominèrent le mouvement socialiste en Colombie-Britannique dans la première décennie du xxe siècle. Pendant la Première Guerre mondiale, sentant l’approche d’une crise sociale parce que, selon son diagnostic, le niveau de vie de la classe ouvrière baissait et que les conflits de travail s’intensifiaient, il fit à l’occasion des envolées oratoires en faveur d’un vague socialisme ; mais, fondamentalement, sa vision de la politique et de la société n’avait pas changé. Démocrate pur et dur, Studholme croyait que les travailleurs devaient prendre leurs affaires en main en regroupant dans des organisations fondées sur la classe, des syndicats surtout, et il était hostile aux privilèges. Pour lui, les riches capitalistes étaient des « aristocrates » ou des membres de la « gentry », et la fortune acquise par héritage était méprisable. À l’Assemblée, il s’opposait à ce que l’État serve à consacrer des distinctions ou des prérogatives de classe, dont le recrutement de domestiques et les exemptions fiscales consenties à des installations récréatives fréquentées par la haute bourgeoisie, notamment les terrains de cricket de la Hamilton Amateur Athletic Association. Abstème et prohibitionniste toute sa vie – choix étayés par sa foi méthodiste –, il se hérissa devant la possibilité que la proposition formulée en 1912 par le chef libéral Newton Wesley Rowell* en faveur de l’abolition des bars ne s’applique pas aux clubs de la classe supérieure.

Dans ses emportements rhétoriques contre les maux de l’industrie moderne, Studholme remettait rarement en question l’exploitation économique ou la propriété de l’industrie comme telle. Ses opinions s’étaient façonnées à un stade antérieur du capitalisme, celui des entrepreneurs, c’est-à-dire à l’époque où les manufacturiers, tels les artisans, pouvaient être considérés comme des producteurs. Selon lui, « tous [avaient] droit à un pourcentage équitable du profit – à la fois le capitaliste et le travailleur ». Les ouvriers voulaient seulement « un arrangement honnête », déclara-t-il en 1910. Il avait davantage foi en la capacité des ouvriers de réaliser des gains économiques par l’entremise de leurs syndicats qu’en tout programme étatique de sécurité sociale. Malgré sa reconnaissance du capitalisme, il ne tolérait pas les spéculateurs fonciers ni les magnats des services publics. À cause des premiers, il avait adhéré très tôt à la doctrine de l’impôt unique sur les valeurs foncières, conçue par Henry George, et il devint en 1910 vice-président d’une nouvelle société pour l’impôt unique. « La réforme fiscale est à la racine de la réforme sociale », affirma-t-il à l’Assemblée en 1914, et il appuya des projets de loi privés visant à taxer la spéculation foncière. En même temps, il prônait l’étatisation des chemins de fer, des richesses naturelles et des services publics, particulièrement les installations hydroélectriques. En 1917, il dénonça le refus, par la province, d’autoriser toute forme de concurrence dans la production de nickel. Sa critique des privilèges économiques faisait de lui un adversaire acharné du protectionnisme tarifaire – position de plus en plus impopulaire parmi nombre d’ouvriers de Hamilton qui travaillaient dans des usines dont le sort était lié aux tarifs.

En tant que libéral de la classe ouvrière, Studholme était attaché à un idéal de démocratie et de dévouement à la chose publique. Depuis son élection à l’Assemblée en 1907, il avait résisté aux mesures visant à augmenter le salaire des députés ; il faisait valoir que, comme ceux-ci étaient des employés de l’État, cette question pouvait être tranchée par référendum. En 1911, lorsque les salaires passèrent de 1 000 $ à 1 400 $, il versa 400 $ à des œuvres de charité de Hamilton. Périodiquement, il dénonça le cens électoral au niveau municipal. Sans nul doute, sa principale contribution à l’extension de la démocratie fut son parrainage du suffrage féminin. Chaque printemps, de 1910 à 1914, avec l’appui de militantes bien connues telle Flora Macdonald Denison [Merrill*], il présenta un projet de loi visant à accorder aux femmes de l’Ontario les mêmes droits de vote et d’éligibilité qu’aux hommes. À cause de cette initiative, un important débat l’opposa, dans la presse hamiltonienne, à la principale adversaire du suffrage féminin à Hamilton, Clementina Fessenden [Trenholme]. En 1917, lorsque l’Assemblée décida d’accorder le droit de vote aux femmes, il déclara n’avoir « jamais été aussi fier de [sa] vie ». La foi de Studholme en la démocratie explique aussi son appui à l’effort de guerre ; favorable au recrutement de volontaires, il se prononça contre la conscription.

Aux privilèges, Studholme opposait des notions de méritocratie, tirées de son expérience de salarié, et de fraternité chrétienne, issues de son méthodisme. Il promut passionnément l’instruction publique, les écoles techniques surtout, et insista, particulièrement en 1919, pour que les enfants soient tenus de fréquenter l’école jusqu’à 16 ans, et non jusqu’à 14 ans. Ses principes religieux tenaient une place importante dans ses positions politiques, et son vocabulaire était tissé d’imagerie chrétienne. Tout en étant pratiquant, il reprochait souvent aux Églises d’être insensibles aux préoccupations des ouvriers. Néanmoins, il trouvait utiles les coalitions avec les leaders religieux sympathiques aux travailleurs et fut élu en 1910 à l’une des vice-présidences d’une alliance de groupes religieux et ouvriers, le Moral and Social Reform Council of Canada. La façon dont il se conduisit, malgré son isolement, dans un monde politique où les opportunistes n’avaient qu’à tendre la main pour cueillir des récompenses, révèle la discipline et le sens du devoir que sa foi méthodiste lui avait inculqués. Pendant l’été de 1914, la rumeur voulut qu’il puisse être nommé à la nouvelle Commission des accidents du travail ; il nia avec indignation être intéressé par ce poste. Il se voyait comme un délégué au service de ses électeurs de la classe ouvrière d’abord et avant tout. « Je n’ai jamais manqué une séance et je ne me suis jamais dérobé à un vote, leur rappela-t-il au cours de ce même été ; aucun intérêt partisan n’a pu m’empêcher d’examiner le fond de chaque question, du point de vue du travailleur, et j’ai tenté honnêtement, tant à la Chambre qu’en comité, de donner mon opinion sur toutes les questions de ce point de vue. »

Studholme manifestait une exemplaire solidarité de classe, mais, en raison de son isolement et de son impuissance politiques, bon nombre des ambiguïtés et des faiblesses de ses positions ouvrières passèrent inaperçues. Il échappa ainsi au sort des députés ouvriers, dont Walter Ritchie Rollo, de Hamilton West, qui firent l’expérience de l’exercice réel du pouvoir au sein du gouvernement des Fermiers unis de l’Ontario en 1919. Certains éléments de la pensée politique de Studholme, surtout sur la tempérance et le libre-échange, étaient désuets ; ils ne seraient pas repris par la génération montante des chefs ouvriers de Hamilton. Néanmoins, Studholme était loin d’être un cas unique dans le milieu ouvrier de cette région. Pour l’essentiel, ses positions à l’Assemblée reflétaient les principaux courants d’idées auxquels adhéraient les artisans syndiqués de la ville.

À compter de 1914, Allan Studholme monta souvent sur les tribunes, un peu partout en Ontario, afin de promouvoir des organisations du Parti ouvrier indépendant. À Hamilton même, cependant, il fut de plus en plus éclipsé par les jeunes partisans du Parti ouvrier qui, pendant la guerre, commencèrent à se faire élire au conseil municipal. Malade à partir de 1915, il insista pour continuer de siéger à l’Assemblée et honora ses nombreux engagements de conférencier. Une crise d’apoplexie l’emporta en juillet 1919. Ses obsèques attirèrent des centaines de personnes ; toutes les couches de la population hamiltonienne lui rendirent un vibrant hommage, comme la presse. En 1923, le mouvement ouvrier local honora sa mémoire en se réunissant pour inaugurer l’Allan Studholme Memorial Labor Temple.

Craig Heron

AN, MG 26, J1, 11 :9558.— AO, F5.— HPL, Hamilton Recruiting League, minutes, 19151916 ; Hamilton Trades and Labor Council, minutes, 19101914.— Globe, 19071919.— Hamilton Herald, 19101919.— Hamilton Spectator, 19061919.— Industrial Banner (London, Ontario, et Toronto), 19061919.— Labour News (Hamilton, Ontario), 19121919.— New Democracy (Hamilton), 7 juin 1923.— C. L. Cleverdon, The woman suffrage movement in Canada (Toronto, 1950).— Congrès des métiers et du travail du Canada, Délibérations de la session annuelle ([Ottawa]), 18 (1902)30 (1914).— G. S. Kealey et B. D. Palmer, Dreaming of what might be : the Knights of Labor in Ontario, 1880–1900 (Cambridge, Angleterre, et New York, 1982).— Ontario, Chief election officer, Return from the records of the general election to the Legislative Assembly (Toronto), 1906, 1908, 1911, 1914.— Stove Mounters’ and Range Workers’ Journal (Detroit), 19011912.

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Craig Heron, « STUDHOLME, ALLAN », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 19 mars 2024, http://www.biographi.ca/fr/bio/studholme_allan_14F.html.

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Auteur de l'article:    Craig Heron
Titre de l'article:    STUDHOLME, ALLAN
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 14
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1998
Année de la révision:    1998
Date de consultation:    19 mars 2024