Titre original :  The Hon. William Anderson Black, P.C., M.P. 
Source:  National Liberal-Conservative Convention held at Winnipeg, Manitoba, October 10th to 12th, 1927 : a review / [compiled] by John R. MacNicol.Toronto : Southam Press, 1930. From the Library of Parliament: https://lop.parl.ca/sites/ParlInfo/default/en_CA/People/Profile?personId=10512

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BLACK, WILLIAM ANDERSON, homme d’affaires et homme politique, né le 9 octobre 1847 à Windsor, Nouvelle-Écosse, aîné des enfants et seul fils de Samuel Gay Black et de Sophia Wright, arrière-petit-fils de William Black* et de Benjamin Etter*, petit-neveu de Martin Gay Black* ; le 14 janvier 1875, il épousa à Halifax Anne Bell (1848–1924), petite-fille de Hugh Bell*, et ils eurent deux fils et trois filles, parmi lesquels un fils et deux filles atteignirent l’âge adulte ; décédé le 1er septembre 1934 à Windsor.

Bien que né et élevé à Windsor, William Anderson Black descendait de la ploutocratie marchande méthodiste de Halifax. On lui donna le même nom que son grand-père William Anderson Black qui, comme ses frères Martin Gay et Samuel, était un important homme d’affaires de l’endroit. Après avoir reçu son éducation primaire à l’école publique de Windsor, William Anderson poursuivit ses études à l’Acacia Villa School [V. sir Robert Laird Borden] de Lower Horton, établissement élitaire préparatoire à l’université, qui offrait, selon l’historien Arthur Wentworth Hamilton Eaton, « une formation commerciale pratique à ceux qui le désiraient ». Black fréquenta ensuite la Mount Allison Wesleyan Academy à Sackville, au Nouveau-Brunswick, puis retourna à Windsor, où il passa deux ans à la King’s Collegiate School.

Vers 1865, Black reçut de son grand-père paternel, riche comme Crésus, un legs qui lui permit de s’installer à Halifax, centre des activités commerciales de la famille depuis plus de 50 ans. Selon la coutume, il parcourut à pied les 40 milles séparant Windsor de la capitale, où il devint commis chez Black Brothers and Company, magasin de quincaillerie et d’équipement de bateau cofondé par son homonyme. « À l’époque, rappellerait-il, seules trois entreprises combinaient les fournitures de bateaux et la quincaillerie à Halifax, soit Stairs, Son, and Morrow [V. William James Stairs*], Edward Albro and Company et Black Brothers and Company. »

La demande toujours croissante de fournitures et d’équipements par l’industrie du transport maritime aida ce type d’entreprises à se relever après la dépression des années 1870. Le 1er juillet 1875, tandis qu’il dirigeait le département d’équipement de bateau de la Black Brothers and Company, Black s’associa avec Robert Pickford, dont le magasin de fournitures de bateaux, à Halifax, fut alors renommé Pickford and Black. À partir des années 1880, la société diversifia ses activités. Outre la vente de matériel naval, elle finit par posséder et exploiter une flotte de bateaux qui transportaient des passagers, des marchandises et du courrier entre les ports de la côte est du Canada, et desservaient ceux de Terre-Neuve et des Antilles britanniques. L’entreprise agissait également à plusieurs autres titres : agent maritime, assureur maritime, agent des douanes et courtier maritime. Parmi ses clients figuraient la Lloyd’s of London et la Thomas Cook and Son. Constamment en expansion et en diversification, la société appliquait l’intégration verticale pour s’adapter rapidement aux changements dans le contexte économique et la technologie maritime, particulièrement le passage de la voile à la vapeur. Même si Black, cadet de sept ans de Pickford, était le plus jeune associé, sa vision et son énergie dominaient et conduisaient la firme. Pickford and Black devint une entreprise et une marque emblématiques ; son drapeau, avec les initiales « P & B » insérées dans un diamant blanc sur fond noir, se reconnaissait instantanément.

Black avait la tradition conservatrice dans le sang. Dans les années 1890, il réalisa la première de ses deux incursions dans la vie publique. N’ayant aucune expérience en politique et détestant prononcer des discours, sa décision de se présenter aux élections provinciales de 1894 s’explique difficilement. Les libéraux occupaient le pouvoir depuis 12 ans sous la direction de William Thomas Pipes* et de son successeur William Stevens Fielding*. Leur situation ne semblait nullement compromise dans Halifax County, circonscription dotée de trois sièges, solidement libérale, que Black disputait même si Fielding, ami de longue date, y détenait un siège. Les libéraux remportèrent la victoire dans la province à nouveau le 15 mars 1894, mais les conservateurs gagnèrent trois sièges ; l’un d’entre eux se trouvait dans Halifax County, où Fielding fut réélu avec une majorité réduite et Black évinça le président de la Chambre, le catholique Michael Joseph Power*. Selon le politicologue James Murray Beck*, si Black jouissait d’un « respect général », il devait sa victoire surtout à une réaction contre l’intervention de l’archevêque catholique Cornelius O’Brien* dans la politique d’éducation de Halifax. Apparemment, l’électorat choisit Black, fervent méthodiste, à titre de défenseur des protestants, pour résister à cette prétendue agression papale. Son élection constitua sa principale réalisation ; il parla peu à la Chambre d’assemblée et ne se représenta pas en 1897, année où les libéraux reprirent son siège.

Black et son entreprise prospérèrent à la fin des années 1890. Selon Winthrop Pickard Bell, historien de la famille et neveu par alliance de Black, ce dernier et sa famille vécurent un temps à Vancouver durant la ruée vers l’or du Klondike. Black y dirigea la flotte de bateaux à vapeur de Pickford and Black, expédiée de la côte est en passant par le cap Horn, pour faire la navette entre la Colombie-Britannique et l’Alaska. En mars 1900, la firme conclut une entente avec le gouvernement du premier ministre sir Wilfrid Laurier* pour inaugurer un service de vapeur entre le Canada et les Antilles britanniques. On désignerait cette ligne, établie par charte fédérale, par le nom de Pickford and Black Steamship Company Limited. Quand la commission royale d’enquête sur les relations commerciales entre le Canada et les Antilles britanniques se rendit à Halifax en octobre 1909, Black compta parmi ceux qui témoignèrent longuement.

À cette époque, Black figurait en bonne place dans l’élite commerciale de l’est du Canada. Il était président à la fois du Bureau de commerce de Halifax et de celui des provinces Maritimes, de même que président, puis président du conseil d’administration de l’Eastern Trust Company (société fondée en 1893 par son ami et associé John Fitzwilliam Stairs*). Son centre d’activités restait Pickford and Black, dont il devint président du conseil et président en 1911, quand son associé prit sa retraite et que l’on constitua l’entreprise en société par actions, la Pickford and Black Limited. Dans cette étape de sa carrière, Black s’engagea principalement dans les services financiers. En 1921, il adhéra au club très exclusif des directeurs de la Banque royale du Canada en succédant à Tecumseh Sherman Rogers, avocat d’élite de Halifax, au conseil d’administration. L’année suivante, il contribua à fonder la Maritime Life Assurance Company, première société d’assurance-vie moderne de la Nouvelle-Écosse, où il accéda également à la présidence. En 1924, il prit la succession de Samuel Manners Brookfield* comme président de l’Eastern Canada Savings and Loan Company.

En décembre 1921, Black faillit devenir lieutenant-gouverneur de la Nouvelle-Écosse. Cependant, le premier ministre conservateur Arthur Meighen*, qui espérait gagner les élections générales du 6 décembre, concéda la victoire aux libéraux sous la direction de William Lyon Mackenzie King*, et ne put procéder à la nomination planifiée de Black après la campagne. En novembre 1923, Black retourna à la vie politique après une absence de 26 ans, lorsque la démission d’Alexander Kenneth Maclean*, doyen des députés libéraux dans Halifax, entraîna une élection partielle. À la réunion de l’association conservatrice locale, le 14 novembre, Black refusa l’investiture, puis, en l’absence de volontaires, se ravisa. Même si certains conservateurs influents doutaient du bien-fondé de présenter un candidat, Meighen insista pour que l’on tienne l’élection partielle. Pour les libéraux, Halifax constituait une circonscription sûre ; l’année précédente, à l’élection partielle tenue pour l’autre siège, les conservateurs avaient perdu par presque 4 000 voix. Le 5 décembre 1923, Black, après avoir puisé dans ses propres ressources pour la campagne, récolta une surprenante majorité de près de 2 000 voix sur son rival libéral, le marchand George Alfred Redmond. Cette victoire fit la une des journaux ; elle alimenta les éditoriaux dans tout le pays et on en parla même à Londres. Le premier ministre King, qui s’était rendu à Halifax pour prononcer un discours en appui à Redmond, exprima sa déception devant ce camouflet infligé à son parti, qui avait remporté tous les sièges de la Nouvelle-Écosse à peine deux années auparavant.

Le résultat de l’élection partielle s’explique facilement par le choix des candidats : un faible pour les libéraux et un solide pour les conservateurs. Même si l’on considère généralement que la clé de la victoire de Black résida dans le mécontentement régional et la vague de protestations, le mouvement de défense des droits des Maritimes, alors en plein essor, avait peu sinon rien à voir avec le dénouement, qui représentait plus un triomphe personnel de Black qu’un succès partisan des conservateurs. En fait, Black jouissait d’une telle renommée dans la ville qu’il aurait gagné sous n’importe quelle étiquette.

Le 18 mars 1924, le premier discours de Black à la Chambre des communes fit sensation. Se présentant comme un député des Maritimes, il affirma qu’il s’opposerait aux politiques de son propre chef et de son propre parti si celles-ci menaçaient le bien-être économique de la région. Il participait activement à la vie parlementaire. Les questions d’économie politique étaient à l’ordre du jour et un homme tel que lui, ayant passé plus d’un demi-siècle dans le monde des affaires, trouvait là un terrain familier à occuper. Outre, peut-être, sir Robert Laird Borden, aucun député conservateur n’avait conquis aussi profondément les cœurs et les esprits des électeurs de Halifax, qui le réélurent aux élections générales de 1925 (par une majorité de presque 8 000 voix), 1926 et 1930.

En juin 1926, les libéraux essuyèrent une défaite à la Chambre autour d’un scandale au ministère des Douanes et de l’Accise [V. Jacques Bureau] ; après que le gouverneur général lord Byng eut refusé la demande de King d’anticiper la dissolution du Parlement, celui-ci démissionna brusquement de son poste de premier ministre. Meighen forma un gouvernement en toute hâte le 29 juin, et Black, en toute prévisibilité, devint l’un des six ministres intérimaires, avec Hugh Guthrie, sir George Halsey Perley, sir Henry Lumley Drayton*, Robert James Manion* et Henry Herbert Stevens*. Représentant de la Nouvelle-Écosse, Black reçut initialement le ministère de la Marine et des Pêcheries, puis passa le 13 juillet au poste permanent des Chemins de fer et Canaux. Il s’attendait à conserver le ministère de la Marine et des Pêcheries, domaine qu’il connaissait le mieux et où il comptait le plus d’expérience, mais cette responsabilité échut à Esioff-Léon Patenaude*. Cependant, Black se rendit compte de l’importance de sa charge pour les Chemins de fer et Canaux ; avant lui, le dernier député des Maritimes nommé à cette fonction à temps complet, Henry Robert Emmerson*, l’avait exercée de 1904 à 1907. Black préférait Halifax à Saint-Jean comme terminus est du chemin de fer canadien du Pacifique et entretenait d’excellentes relations avec le président, sir Edward Wentworth Beatty*. Il ne demeura toutefois pas en poste assez longtemps pour se distinguer dans ce nouveau portefeuille. Les conservateurs furent défaits aux élections générales du 14 septembre 1926 et Meighen, qui y perdit son siège, renonça peu après à la direction du parti.

Black devint une figure de premier plan de l’opposition et intervint souvent, particulièrement au sujet des chemins de fer. Quand les tories reprirent le pouvoir en 1930, le nouveau premier ministre, Richard Bedford Bennett*, ne confia pas de poste au cabinet à Black, alors âgé de 82 ans. Edgar Nelson Rhodes* devint le représentant de la Nouvelle-Écosse au cabinet, et l’ancien portefeuille de Black, les Chemins de fer et Canaux, revint à Manion. Il tardait à Black, sans poste ministériel, d’accéder au Sénat, mais ses démarches auprès de Bennett restèrent sans suite. Même si un accident vasculaire cérébral l’empêcha d’assister à la session parlementaire de 1934, sa constitution de fer lui permit de survivre jusqu’au 1er septembre, à peine un mois avant son quatre-vingt-septième anniversaire. Au moment de sa victoire, en 1923, il était la personne la plus âgée élue à la Chambre des communes pour la première fois et, en 1934, le député en poste le plus âgé de toute l’histoire parlementaire canadienne, record qu’il détiendrait encore au début du xxie siècle.

Malgré un franc succès électoral – il remporta un siège au fédéral quatre fois en moins d’une décennie – Black était un homme politique improbable en raison de sa neutralité. Conservateur par tradition familiale plutôt que par principe, il se souciait davantage des conséquences économiques des politiques gouvernementales que du parti qui formait le gouvernement. Grâce à près de 70 années d’expérience en affaires, pendant lesquelles il observa activement la transition graduelle du capitalisme marchand au capitalisme industriel, puis au capitalisme d’entreprise, il bénéficiait d’une perspective aussi étendue que large et profonde. Après ses débuts de détaillant, Black était devenu entrepreneur et avait terminé sa carrière comme financier. Malheureusement, la Pickford and Black Limited, qui avait dépassé la plupart de ses concurrents régionaux et leur avait survécu, échappa à la famille Black moins de deux ans après sa mort. Son fils Walter Allan, qui lui succéda à la présidence, mourut prématurément en 1936, et l’administration de la société passa à un consortium dirigé par l’industriel Ralph Pickard Bell*, neveu d’Anne Black. La F. K. Warren Limited acquit finalement l’entreprise ; l’agence maritime menait encore certaines de ses activités sous le nom de Pickford and Black dans les premières années du xxie siècle.

Le « grand vieil homme de la Nouvelle-Écosse », comme on surnommait affectueusement et respectueusement William Anderson Black, laissa un héritage d’une valeur juste au-dessous de 500 000 $, principalement sous forme de titres. Winthrop Pickard Bell rédigea un charmant portrait de son « oncle Will », qui avait « manifesté un intérêt actif pour la politique […] C’était un homme d’une grande énergie qui aimait faire toutes choses à sa façon, mais il était d’un naturel avenant et pouvait être un excellent hôte. C’était un homme solidement bâti, et le fait d’avoir un bras et une main atrophiés, ou partiellement atrophiés, n’avait jamais sérieusement nui à ses activités ». Bell, professeur de philosophie, aurait apprécié le fait que Black, dont l’ombre n’avait jamais obscurci la porte des universités, non seulement siégea au conseil d’administration de la Dalhousie University du mois d’août 1920 jusqu’à sa mort, mais aussi dota la William A. Black Chair in Commerce, « avec une référence spéciale au commerce maritime ». Depuis, cet acte philanthropique offre à des étudiants en commerce des possibilités de formation autrement inaccessibles. Voilà le legs le plus tangible de Black.

Barry Cahill

Le portrait de William Anderson Black, peint en 1923 par l’aquarelliste britannique Phyllis Ethel Chipperfield, se trouve à l’Art Gallery of N.S., à Halifax. Les NSA conservent dans le William Anderson Black fonds (MG 1, vol. 138 ; mfm. 10,081) des photocopies et des copies sur microfilm des quelques papiers personnels de Black qui subsistent ; elles possèdent également le Pickford & Black Ltd. fonds (MG 3, vol. 1561–1718 ; MG 7, vol. 43–55).

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Comment écrire la référence bibliographique de cette biographie

Barry Cahill, « BLACK, WILLIAM ANDERSON », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 4 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/black_william_anderson_16F.html.

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Auteur de l'article:    Barry Cahill
Titre de l'article:    BLACK, WILLIAM ANDERSON
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2022
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Date de consultation:    4 nov. 2024