JESSUP, EDWARD, officier, spéculateur foncier, juge et fonctionnaire, né le 4 ou le 24 décembre 1735 dans la paroisse de Stamford, Connecticut, fils de Joseph Jessup et d’Abigail James ; en 1760, il épousa Abigail Dibble, et ils eurent deux enfants ; décédé le 3 février 1816 à Prescott, Haut-Canada.
Bien que les Jessup eussent vécu dans le Connecticut pendant plusieurs générations, Joseph Jessup alla installer sa famille en 1744 à l’« Upper Nine Partners Patent », dans le comté de Dutchess, situé dans la colonie de New York. Edward Jessup leva une compagnie et servit à titre de capitaine lors de la campagne d’Amherst* dans la région du lac Champlain, en 1759. Il se rendit probablement compte, à cette époque, des possibilités qu’offrait le nord de la colonie de New York. Vers 1764, Edward et son frère Ebenezer allèrent s’installer à Albany. Ils s’y associèrent et, pendant toute la décennie qui suivit, ils firent de la spéculation foncière sur une grande échelle dans les régions du haut Hudson et du lac George. Leurs spéculations étaient sans doute facilitées par les rapports étroits qu’ils entretenaient avec sir William Johnson* et John Butler*. Les deux frères établirent par la suite une communauté, avec des moulins et un traversier, à dix milles environ en amont de Glen Falls, sur le fleuve Hudson. Cet établissement, connu par la suite sous le nom de Jessup’s Landing, fut un foyer loyaliste durant les années qui précédèrent immédiatement la Révolution américaine. Lorsque sir Guy Carleton réussit à chasser les forces américaines de la province de Québec, à l’été de 1776, les Jessup menèrent, pour se joindre à lui, une troupe de 80 Loyalistes à Crown Point, dans la colonie de New York.
La troupe des Jessup fut d’abord attachée au King’s Royal Régiment of New York de sir John Johnson* ; mais, le 7 juin 1777, on créa, à titre d’essai, le corps des King’s Loyal Americans, avec Ebenezer comme lieutenant-colonel et Edward comme capitaine. Bien que leur unité ne fût pas entièrement formée, les frères Jessup participèrent à la campagne de John Burgoyne*, Edward commandant le service des bateaux sur le fleuve Hudson. Faits prisonniers durant la campagne de Saratoga, ils furent libérés sur parole et autorisés à se rendre dans la province de Québec.
Comme de nombreux membres des King’s Loyal Americans avaient été dispersés au cours de la campagne de Burgoyne qui se solda par un fiasco, l’unité n’atteignit jamais son plein effectif et demeura, pendant les quatre années suivantes, une sorte d’annexe semi-indépendante au régiment de Johnson. On l’employait surtout à construire et à réparer les fortifications aux environs de Montréal, de Sorel et de la partie sud du lac Champlain, ou à y tenir garnison ; elle participa, néanmoins, à plusieurs raids dans la colonie de New York. Edward Jessup prit part à de tels raids, en octobre 1780 et, de nouveau, à l’automne suivant. Ce sont probablement les services ainsi rendus, de même que sa compétence administrative, qui amenèrent le gouverneur Haldimand à le choisir, plutôt qu’Ebenezer, comme commandant-major du nouveau corps des Loyal Rangers, créé le 12 novembre 1781 à partir d’un certain nombre de formations militaires plus petites, dont les King’s Loyal Americans. La nouvelle unité fut bientôt connue sous le nom de Jessup’s Rangers. Jusqu’à leur licenciement, le 24 décembre 1783, les Jessup’s Rangers furent employés au même genre de tâches que l’avaient précédemment été les King’s Loyal Americans. Habituellement stationnés à Sorel ou à Verchères, ils fournissaient leurs garnisons aux postes de Yamaska, de Rivière-aux-Chiens, de l’île aux Noix et de Dutchman’s Point (près d’Alburg, Vermont).
La guerre perdue, Jessup commença, à l’été de 1783, à faire des plans pour l’installation des membres de son unité sur des terres. Il fut de ceux qui suggérèrent, à cette fin, les régions de la rivière des Outaouais et du haut Saint-Laurent. Si on rejeta sa proposition visant à créer des établissements organisés et fondés sur le grade qu’avaient auparavant les colons dans l’armée, Haldimand retint néanmoins un certain nombre d’autres idées de Jessup dans le plan qui fut finalement adopté. Selon ce plan, les Jessup’s Rangers se voyaient allouer les cantons n° 6 (canton d’Edwardsburg) et n° 7 (canton d’Augusta), de même qu’une partie du canton n° 8 (canton d’Elizabethtown), tous sur le Saint-Laurent, et le canton n° 2 (canton d’Ernestown) à l’ouest de Cataraqui (Kingston). Jessup passa l’été de 1784 à diriger l’installation de ses hommes sur leurs nouvelles terres ; puis, à l’automne de la même année, il se rendit présenter à Londres une réclamation pour les pertes qu’il avait subies pendant la Révolution américaine. Il revint dans la province de Québec en 1788 et prit possession de sa concession de 1 200 acres dans le canton d’Augusta, située juste en face du fort Oswegatchie (Ogdensburg, New York), sur le Saint-Laurent, et voisine des lots accordés à son fils, le lieutenant Edward Jessup.
Pendant les années de l’après-guerre, Jessup reprit sa carrière de spéculateur foncier. À titre de loyaliste et de major, il avait droit à de grandes quantités de terre, outre les 1 200 acres déjà reçues. Il demanda bientôt et obtint 3 800 acres d’une seule venue sur la rivière South Nation (Ontario) ; il avait apparemment l’intention de coloniser et de mettre cette étendue de terre en valeur, mais rien n’indique qu’il réussit à le faire. Il acquit aussi une assez grande superficie de terre dans la seigneurie de Sorel, où sa famille vécut au moins jusqu’à la fin des années 1780, et peut-être plus longtemps encore. Il semble avoir joui d’une certaine considération tant auprès de Haldimand qu’auprès de Carleton (devenu lord Dorchester). Elle n’était pas suffisante cependant pour convaincre le gouvernement de placer £6 000 dans un projet destiné à fournir des bestiaux aux colons loyalistes, en retour de douves en chêne, ou pour obtenir que fût approuvé un plan visant à coloniser un canton, qu’il avait préparé en collaboration avec trois entrepreneurs américains qui, affirma-t-il à Dorchester, étaient « loyalistes de cœur ». Haldimand le fit toutefois juge de paix ; et Dorchester, en plus de le recommander comme membre du Conseil exécutif du Haut-Canada, le nomma juge de la Cour des plaids communs et lieutenant-colonel de la milice des cantons d’Edwardsburg, d’Augusta et d’Elizabethtown.
Jessup ne réussit pas à conserver son influence après la création de la nouvelle colonie du Haut-Canada, en 1791. Dans une lutte pour obtenir un poste à York (Toronto), ce furent Ephraim Jones et Solomon Jones* qui l’emportèrent ; le lieutenant-gouverneur Simcoe ne prit pas en considération la recommandation qu’avait faite lord Dorchester de nommer Jessup au Conseil exécutif. Peut-être, à cette étape de sa carrière, l’âge avait-il rendu Jessup moins dynamique ; on pourrait le croire, d’autant que son fils Edward réussissait à percer quelque peu. Ce dernier siégea comme député de Grenville, lors de la deuxième session de la législature du Haut-Canada, succéda à son père comme lieutenant-colonel de la milice locale en 1795, puis fut nommé greffier de la paix du district de Johnstown en 1800 et greffier de la Cour des plaids communs en 1802.
En 1810, Edward Jessup et son fils tracèrent les limites de la ville de Prescott, du nom du gouverneur général Robert Prescott, sur le front de leurs terres donnant sur le Saint-Laurent, mais, deux ans plus tard seulement, l’emplacement de leurs propres maisons fut exproprié par l’armée en vue d’y construire le fort Wellington. Au demeurant, la carrière active de Jessup était dès lors terminée. En 1812, il était devenu incapable de diriger ses propres affaires et, lorsqu’il mourut, en février 1816, il était cloué au lit et «affligé de paralysie» depuis plusieurs années. Il ne pouvait même pas signer son nom.
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Reginald Arthur Bowler, « JESSUP, EDWARD », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 2 oct. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/jessup_edward_5F.html.
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Auteur de l'article: | Reginald Arthur Bowler |
Titre de l'article: | JESSUP, EDWARD |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1983 |
Année de la révision: | 1983 |
Date de consultation: | 2 oct. 2024 |