MacBETH, RODERICK GEORGE, avocat, ministre presbytérien, auteur, historien et conférencier, né le 21 décembre 1858 à Kildonan (Winnipeg), colonie de la Rivière-Rouge (Manitoba), fils de Robert McBeath*, fermier et membre du Conseil d’Assiniboia, et de Mary McLean ; le 21 août 1886, il épousa à Kildonan Christina Ellen (Minnie) Sutherland, et ils eurent un fils, puis le 3 juin 1896, à Oakville, Ontario, Elizabeth (Libbie) Patterson, et de ce second mariage naquirent trois filles ; décédé le 28 février 1934 à Vancouver.

Roderick George MacBeth était le fils d’immigrants écossais emmenés à la colonie de la Rivière-Rouge en 1815 par lord Selkirk [Douglas*]. Sa famille comptait parmi les premières générations de colons à s’établir dans ce qui deviendrait l’Ouest canadien. Les années que MacBeth passerait à la colonie lui donneraient un point de vue inestimable sur l’évolution de la région. Il étudia dans des écoles paroissiales locales, puis fréquenta l’université de Manitoba, où il obtint une licence ès arts en 1882 et une maîtrise ès arts en 1885. Bien qu’admis au barreau en 1886, il abandonna vite le droit pour se consacrer à la religion. Il obtint son diplôme du Princeton Theological Seminary en 1891 et fut ordonné ministre presbytérien la même année. Au cours de la décennie suivante, il desservit des congrégations au Manitoba, d’abord à Carman, puis à Winnipeg, à l’église presbytérienne Augustine. En 1900, il partit vivre à Vancouver, où il prit en charge l’église First Presbyterian. De 1904 à 1914, il demeura à Paris, en Ontario, et retourna ensuite à Vancouver pour accepter une nomination à l’église presbytérienne St Paul, où il resterait jusqu’à sa retraite en 1932.

Connu pour son sens aigu de l’observation et son excellente mémoire, MacBeth affichait une personnalité forte et énergique, tempérée par un « naturel cordial et généreux », comme l’écrirait le synode de Colombie-Britannique dans sa notice nécrologique. Selon la même source, qui évoquait quelques-unes de ses forces en tant que ministre, il prononçait de « splendides sermons » et effectuait des visites attentives. Partisan du Social Gospel, il fit campagne contre la criminalité, en hausse à l’époque, le matérialisme endémique et certains comportements répréhensibles comme le fait de jurer ou de s’adonner au jeu, tout en faisant la promotion de la tempérance et de la restriction des activités commerciales le dimanche. Il prépara des rapports pour le conseil des missions canadiennes de l’Église presbytérienne sur les tâches que celle-ci devait accomplir dans des lieux reculés tels que la région minière récemment ouverte près de Cobalt, dans le nord de l’Ontario, ainsi que dans l’Ouest canadien. Certains de ses rapports seraient publiés pour une plus grande diffusion sous les titres Our task in Canada et Empire of the north, tous deux parus à Toronto en 1912. MacBeth pensait que sans spiritualité et sans le soutien des Églises, le pays périrait ; par conséquent, assimiler de nouveaux immigrants à la société canadienne et leur inculquer de bonnes valeurs et croyances représentaient un défi qui l’inquiétait. En tant que fier Écossais qui défendait l’indépendance et la liberté, il se montra favorable à une Église presbytérienne autonome durant des discussions sur l’union des principales confessions protestantes au Canada. Après le regroupement de certaines congrégations presbytériennes au sein de l’Église unie du Canada en 1925 [V. Clarence Dunlop Mackinnon], il écrivit The burning bush in Canada, paru à Toronto, probablement en 1926, afin de fournir des conseils et des encouragements pour la continuation d’une Église calviniste séparée selon la tradition écossaise [V. Ephraim Scott].

Marchant consciemment sur les pas de notables comme Alexander Ross*, Donald Gunn* et Alexander Begg* (1839–1897), qui avaient tous décrit l’histoire de la colonie de la Rivière-Rouge et de la traite des fourrures, MacBeth raconta ses souvenirs de la région où il avait grandi. Cependant, contrairement à ceux de ses prédécesseurs, ses écrits couvraient l’histoire au delà du xixe siècle et adoptaient une perspective pancanadienne. Glorifiant l’évolution pacifique du pays, dont la tradition remontait à ses racines coloniales, il écrivait tant en sa qualité de pionnier que de ministre du culte, tout en complétant ses renseignements de première main au moyen de recherches historiques. Son but, comme indiqué dans The romance of western Canada, publié à Toronto en 1918, n’était pas de créer « une encyclopédie aride, mais plutôt une histoire vivante et évocatrice du peuple ». Son style était empreint d’une tradition libérale et nationale de l’héroïsme ; dans The romance of the Canadian Pacific Railway, paru à Toronto en 1924, il expliqua que « la future génération ne [devait] pas manquer le pouvoir tonifiant que procure la connaissance des grandes réalisations accomplies au cours de la vie d’une nation ».

L’étendue des expériences personnelles racontées dans les ouvrages de MacBeth est remarquable. Il avait 11 ans à l’époque de la rébellion de la Rivière-Rouge et se souvenait du chef du mouvement, Louis Riel*. John Christian Schultz*, l’homme à la tête du « parti canadien », qui demandait l’annexion de la colonie au Canada, échappa aux forces de Riel et alla se réfugier chez les MacBeth à Kildonan, en janvier 1870. Étudiant en droit au moment de la rébellion du Nord-Ouest de 1885, MacBeth servit à titre de lieutenant au sein du Winnipeg Light Infantry Battalion sous le commandement de William Osborne Smith*. À son retour à Winnipeg, il assista à l’audition de l’appel qui remettait en question la compétence du tribunal de Regina, où le procès de Riel avait eu lieu. Plus tard cette année-là, il se trouva parmi les personnes qui se précipitèrent à Saint-Boniface (Winnipeg) pour empêcher toute perturbation pendant l’enterrement de Riel. En 1886, MacBeth écouta le premier ministre sir John Alexander Macdonald* prononcer un discours à l’occasion de sa première visite dans l’Ouest. Sir Donald Alexander Smith*, gouverneur de la Hudson’s Bay Company et haut-commissaire à Londres, était un ami de la famille et écrivit l’introduction du livre de MacBeth intitulé The Selkirk settlers in real life, publié à Toronto en 1897. Quand les premiers doukhobors arrivèrent à Winnipeg en 1899 [V. Peter Vasil’evich Verigin*], MacBeth les rencontra et leur posa des questions avec l’aide d’un interprète. Il visita la région minière du nord de l’Ontario et suivit le chemin emprunté par l’explorateur Alexander Mackenzie* en 1793 durant son voyage vers l’océan Pacifique.

Dans ses ouvrages, MacBeth interprétait les événements. Dans sa manière de traiter des preuves souvent controversées, il pesait cependant le pour et le contre, et ne portait pas de jugement. « Laissons le lecteur suivre l’histoire et parvenir à établir son propre verdict », conseillait-il dans The romance of western Canada. Il mettait l’accent sur l’histoire sociale de la colonie de la Rivière-Rouge, et accordait une attention particulière à la religion et à l’éducation. Il désapprouvait les rébellions de Riel de 1869 et de 1885, tout en reconnaissant la légitimité des revendications et les erreurs des deux camps. Il critiquait surtout les personnes qui occupaient des postes de commandement, à cause de leur manque de connaissance sur la situation dans l’Ouest et de leur échec quant à la communication de leurs intentions. MacBeth traita de façon aussi mesurée les conflits en matière de langue et d’éducation, comme la question des écoles du Manitoba [V. Thomas Greenway*] et la question des écoles des Territoires du Nord-Ouest [V. Adélard Langevin*], mais il était fortement en faveur de l’adoption d’un système d’enseignement public unique et non confessionnel. Il montra cependant moins de retenue dans son portrait de Selkirk, décrivant ce dernier comme « un ange sauveur » pour les Écossais dépossédés, qui gardaient en mémoire le « souvenir sacré » de son nom. MacBeth devint également un orateur public populaire ; les thèmes qu’il aborda dans ses publications fournirent de la matière pour de nombreuses conférences. En outre, il fit des exposés devant des auditoires sur la vie d’Abraham Lincoln et de William Ewart Gladstone, ainsi que sur d’autres sujets historiques.

Dans les années 1920, Roderick George MacBeth ajouta à ses écrits l’histoire du chemin de fer canadien du Pacifique et celle de la Gendarmerie royale à cheval du Nord-Ouest (et de sa transformation en Gendarmerie royale à cheval du Canada), complétant ainsi son évocation de la contribution des Prairies à l’édification d’une nation. L’attention particulière qu’il donna à la colonie de la Rivière-Rouge, à Riel, au chemin de fer canadien du Pacifique et à la police à cheval demeure un élément central de l’historiographie du Canada. Toutefois, contrairement à beaucoup d’autres personnes qui raconteraient l’histoire du chemin de fer canadien du Pacifique, MacBeth fit en plus la chronique de projets réalisés à son époque : la construction de tunnels en spirale, de barrages, d’aqueducs et d’aménagements immobiliers urbains. Espérant que son histoire de la police à cheval « inspire[rait] chez tous les hommes sincères un respect pour l’autorité dans une période d’agitation », il attribua à la police le mérite d’avoir empêché les Prairies de sombrer dans l’anarchie. Encore une fois, comme il l’avait fait dans ses ouvrages précédents, il présenta une histoire non enrobée de romantisme qu’il agrémenta de nombreuses courtes descriptions d’événements historiques. Ses livres lui valurent un doctorat honorifique en droit de l’université de Manitoba en 1929. À ses funérailles en 1934, à Vancouver, la présence d’une garde d’honneur formée de 12 membres en tunique rouge de la Gendarmerie royale à cheval du Canada, ainsi que de cornemuseurs des Seaforth Highlanders et d’un contingent de policiers municipaux, fut un autre témoignage du respect que le public vouait à l’homme et à ses écrits.

Clarence Karr

Un grand nombre d’ouvrages de Roderick George MacBeth se trouvent dans la banque de données de la Univ. of Alberta Libraries intitulée « Peel’s prairie provinces » ; ils peuvent être consultés en ligne à : www.peel.library.ualberta.ca. D’autres titres sont répertoriés dans le catalogue de BAC.

AO, RG 80-5-0-234, no 5078.— BCA, GR-2951, no 1934-09-489349.— Manitoba, Ministère du Tourisme, de la Culture, du Patrimoine, du Sport et de la Protection du consommateur, Bureau de l’état civil (Winnipeg), no 1886-001923.— J. M. Bumsted, Dictionary of Manitoba biography (Winnipeg, 1999).— Canadian men and women of the time (Morgan ; 1898 et 1912).— Presbyterian Church in Canada, Synod of B.C., Acts and proc. (New Westminster, C.-B.), 1934 : 270–271.— « Rev. R. G. MacBeth, d.d., ll.d. : further tributes », Presbyterian Record (Toronto), 59 (1934) : 143–144.— W. S. Wallace, Macmillan dict.

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Clarence Karr, « MacBETH, RODERICK GEORGE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 6 nov. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/macbeth_roderick_george_16F.html.

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Auteur de l'article:    Clarence Karr
Titre de l'article:    MacBETH, RODERICK GEORGE
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 16
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2015
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