Titre original :  Vénérable Marcelle Mallet | Archives de l'Archidiocèse de Québec

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MALLET (Maillet, Maillé), MARIE-ANNE-MARCELLE, professe chez les sœurs de la Charité de l’hôpital Général de Montréal, fondatrice de l’Institut des sœurs de la Charité de Québec, supérieure de cette communauté de 1849 à 1866, née à Montréal le 26 mars 1805, fille de Vital Mallet, fermier et tanneur, et de Marguerite Sarrazin, décédée à Québec le 9 avril 1871.

Marcelle Mallet eut une enfance troublée par la mort prématurée de son père, survenue le 23 avril 1810, et par les bouleversements qui en résultèrent. Dès l’âge de dix ans, elle dut s’éloigner du village de L’Assomption où vivait sa famille depuis 1806 : aux prises avec le problème de l’éducation de ses enfants, la mère se résigna à les céder à une tante et à un oncle de Lachine. Chaque année, l’adolescente quittait avec regret son frère et ses parents adoptifs pour quelques mois de pensionnat chez les sœurs de la Congrégation de Notre-Dame, probablement à Pointe-Claire.

À 16 ans, Marcelle Mallet était déjà sensibilisée au désarroi que connaissent l’enfant sans famille et le pauvre sans foyer. Elle voulut donc se joindre aux filles de mère d’Youville [Dufrost* de Lajemmerais] qui avait fondé l’Institut des sœurs de la Charité de l’hôpital Général de Montréal, première congrégation religieuse strictement canadienne. Après l’avoir reçue d’abord comme « prétendante » à cause de son jeune âge, on permit à Marcelle Mallet d’entrer au noviciat le 6 mai 1824. Professe de la communauté le 18 mai 1826, sœur Mallet fut appelée aux tâches les plus diverses, mais surtout au soin des malades. En 1846, elle inaugura l’œuvre des visites à domicile. Quand, en 1847, le typhus s’abattit sur Montréal, elle eut l’occasion de manifester ses qualités d’organisatrice autant que son zèle en assumant, à titre d’assistante, toute la responsabilité de l’hôpital.

Entre 1840 et 1850, la communauté connut une ère de fondations. Après Saint-Hyacinthe, Saint-Boniface (Man.) et Bytown (Ottawa) [V. Bruyère], ce fut Québec. Choisie comme supérieure-fondatrice de cette dernière mission, sœur Mallet quitta sa famille religieuse le 21 août 1849, avec cinq compagnes. C’était un départ sans retour, selon la règle des fondations de l’époque. Le 22 août 1849, la population québécoise recevait ses premières sœurs de la Charité. Après deux conflagrations et une terrible épidémie de choléra, Québec traversait alors une des périodes les plus douloureuses de son histoire. Dès leur arrivée, les sœurs s’installèrent à l’orphelinat-école de la rue des Glacis, aux limites de la paroisse Notre-Dame. Le 5 novembre suivant, les membres de la Société charitable des dames catholiques de Québec confièrent à mère Mallet une œuvre qu’elles avaient fondée en 1831 et entretenue depuis 18 ans. Les dames de la société demeurèrent les collaboratrices des sœurs de la Charité.

Mère Mallet qui était venue avec ses compagnes « pour le soin des malades, l’éducation des jeunes filles pauvres et autres fins », se préoccupa de répondre aux appels les plus pressants de la détresse humaine. Dès 1849, elle inaugura l’aide aux écoliers pauvres. Puis, avec les orphelines, elle reçut les dames en pension en 1855, les personnes âgées ou infirmes en 1856, et les orphelins en 1861. En 1866, elle accepta le service d’un dispensaire pour malades indigents et, durant les 17 ans qu’elle dirigea la communauté, elle établit à la campagne, dans les limites du diocèse de Québec, cinq pensionnats pour jeunes filles, compléments de « l’école du rang » et foyers de formation des maîtresses d’école.

Cette œuvre qui grandissait et se diversifiait coûtait cher à mère Mallet. Celle-ci connut l’épreuve de la solitude : ses premières compagnes moururent peu de temps après la fondation ou, profitant de l’invitation lancée par l’hôpital Général de Montréal en 1854, elles choisirent de retourner à Montréal, malgré leur engagement de 1849 ; les épidémies de typhus en 1851 et de choléra en 1854 multiplièrent ses obligations tout en diminuant ses effectifs ; le 3 mai 1854, un incendie dévasta l’orphelinat qui venait d’être édifié ; enfin, des contradictions les plus imprévues l’éprouvèrent au sein même de la communauté qu’elle avait fondée.

Dès septembre 1849, mère Mallet avait reçu quatre recrues pour son œuvre de charité. Elle avait ainsi jeté les bases d’une nouvelle famille religieuse. L’Institut des sœurs de la Charité de Québec reçut sa consécration officielle dans l’Église le 1er juillet 1866. Ce jour-là, Pie IX en approuvait les Règles et constitutions. Mère Mallet et plusieurs de ses compagnes auraient voulu rester fidèles à l’héritage spirituel sulpicien légué par mère d’Youville et l’hôpital Général de Montréal. La fondatrice avait refusé un changement de législation aussi longtemps qu’elle en avait eu la liberté. Mais en 1863 l’évêque de Québec, Mgr Charles-François Baillargeon*, lui avait imposé une nouvelle règle qui était l’œuvre du jésuite, Antoine-Nicolas Braün, et dont l’essence se réclamait de la Compagnie de Jésus.

À l’occasion de la mise en exercice de cette nouvelle règle, la communauté des sœurs de la Charité de Québec connut un moment de crise intérieure. Bien qu’il n’y eût aucun conflit de principes entre les deux règles, toutes les sœurs ne purent adhérer avec une égale liberté à la réorientation de la communauté. Pour sa part, mère Mallet, rompue à l’ancienne règle, passa difficilement de cette atmosphère large de l’école sulpicienne où sa charité avait grandi pendant 40 ans, à ce cadre ignacien, d’une qualité qui avait fait ses preuves mais où tout était plus mesuré, plus sévère et plus rigoureux. Au contraire, les jeunes religieuses formées par le père Braün, directeur spirituel de la communauté depuis 1856, s’enrôlèrent hardiment sous la bannière du robuste saint Ignace. Bientôt des courants d’idées contradictoires se révélèrent. Dans ce drame des Règles et constitutions, mère Mallet tint le rôle le plus difficile. Depuis 1863 déjà, son attitude, pourtant pacifique, était contestée par certaines de ses sœurs. Et le père Braün stimulait volontiers cette contestation. Aux élections de 1866, la fondatrice ne fut pas réélue à la tête de sa communauté ; elle n’eut pas même sa place dans l’administration.

Mère Mallet se mit alors à l’humble besogne de la sœur de la Charité, et doucement, elle lia sa gerbe. Elle mourut à l’aube de Pâques, le 9 avril 1871. Elle laissait le souvenir d’une femme d’envergure et d’énergie. Au-delà du temps et de l’espace, la vitalité de sa communauté sanctionne sa foi et justifie son œuvre. Un siècle après sa mort, la communauté des sœurs de la Charité de Québec compte près de 1 800 professes aux États-Unis, au Japon, au Paraguay, en Argentine, au Congo et, surtout, dans la province de Québec qui lui a donné sa pierre angulaire. « Sans distinction de pays, de race ou de culture », ces religieuses perpétuent la consécration que Marcelle Mallet a faite d’elle-même à l’enfance, à la vieillesse et à la maladie.

Andrée Désilets

Actes du chapitre général, première session, juillet-août 1968 (s.l., 1968).— Statistiques de la congrégation des sœurs de la Charité de Québec (s.l., 1968).— Dans le sillage de la charité (Québec, 1959).— Une fondatrice et son œuvre : mère Mallet (1805–1871) et l’Institut des sœurs de la Charité de Québec, fondé en 1849 (Québec, 1939).

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Andrée Désilets, « MALLET (Maillet, Maillé), MARIE-ANNE-MARCELLE », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 10, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 4 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/mallet_marie_anne_marcelle_10F.html.

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Auteur de l'article:    Andrée Désilets
Titre de l'article:    MALLET (Maillet, Maillé), MARIE-ANNE-MARCELLE
Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 10
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1972
Année de la révision:    1972
Date de consultation:    4 déc. 2024