MERRILL, FLORA MacDONALD (Denison), couturière, écrivaine, aubergiste, réformatrice sociale, féministe et spiritualiste, née le 20 février 1867 près de Bridgewater (Actinolite, Ontario), fille de George A. Merrill et d’Elizabeth MacTavish Thompson ; le 12 août 1892, elle épousa à Detroit Howard Denison, et ils eurent un fils, Merrill* ; décédée le 23 mai 1921 à Toronto.

Flora MacDonald Merrill Denison mena deux existences, l’une conventionnelle, l’autre pas. Sous la signature de Flora MacDonald (nom de sa grand-mère maternelle qu’elle utilisait souvent dans ses textes), elle écrivit un jour : « J’ai habité avec intérêt le corps de Mme Denison et, par moments, nos raisonnements et nos conclusions diffèrent tellement que j’en suis venue à croire qu’elle et moi avons deux personnalités distinctes. » Mme Denison était, semble-t-il, « quelqu’un d’extérieur à [elle] ». Ces deux existences, elle les vécut selon cette profonde croyance mystique. Aussi est-il difficile de reconstituer sa biographie matérielle et spirituelle, et surtout ses années de jeune fille.

Du côté des Merrill, on trouve parmi les ancêtres de Flora MacDonald aussi bien de respectables loyalistes que des universalistes aux idées religieuses hétérodoxes. Son père oscillait entre universalisme et spiritualisme. Sa mère, institutrice, se déclarait tantôt catholique, tantôt méthodiste. George A. Merrill, maître d’école qui réussissait bien mais était insatisfait, tenta sa chance dans la prospection et l’exploitation minières, en association avec Billa Flint*, dans les coins reculés du comté de Hastings, où naquit Flora MacDonald. L’aventure se solda par un désastre financier. Les Merrill s’installèrent ensuite à Belleville, où George A. continua sans doute à rêver d’un riche filon, mais ne dénicha jamais d’emploi stable. Sa fille l’a dépeint comme un intellectuel de village, un spiritualiste qui s’engageait dans des controverses sur la religion et la science et essayait de créer le mouvement perpétuel. Peut-être avait-il un problème d’alcool. Apparemment, Mme Merrill subvenait aux besoins de la famille. Sixième de huit enfants, Flora MacDonald fréquenta l’école à Belleville, puis à Picton ; à l’âge de 15 ans, elle décrocha. Après avoir enseigné un petit moment – expérience qu’elle qualifierait d’« à peine plus attrayante pour [elle] que d’être mise en réclusion » –, elle pourrait avoir étudié dans une école commerciale de Belleville et pratiqué encore un peu le métier d’institutrice. Elle travailla ensuite à Montréal, puis eut un emploi éphémère dans une agence d’assurances de Toronto.

Flora MacDonald Merrill subit un choc à la mort de l’aînée de ses sœurs, Mary Edwards, en 1880. Elle relaterait une expérience psychique survenue vers 1885 au cours d’une dépression et qui transforma sa vie : sa sœur se matérialisa et lui redonna foi en l’avenir. En 1900, elle lui consacrerait un livre, Mary Melville, the psychic. Non seulement cet ouvrage décrit-il les étonnants pouvoirs psychiques de Mary Edwards et son génie précoce pour les mathématiques et les langues, mais il révèle beaucoup de choses sur l’hétérodoxie religieuse dans laquelle Flora MacDonald avait grandi et qui l’avait menée à rejeter le christianisme traditionnel, et principalement la doctrine de la dépravation totale. Les évangélistes Dwight Lyman Moody et Ira David Sankey figurent dans le livre, tout comme le colonel Robert Green Ingersoll, populaire libre-penseur américain et ami de Walt Whitman. C’est à l’occasion d’un discours d’Ingersoll en 1892 que Flora MacDonald fut initiée à l’œuvre de Whitman (quoiqu’elle ait peut-être entendu parler d’Ingersoll plus tôt, quand il avait pris la parole à Belleville en 1880). On trouve aussi, dans Mary Melville, des discussions sur l’authenticité de la Bible, sur la validité de certaines doctrines théologiques – le châtiment éternel et la transcendance de Dieu, par exemple – ainsi que sur la signification du darwinisme. Mary Edwards, son père et, bien sûr, l’auteure penchaient en faveur d’une religion qui alliait critique sociale et spiritualisme. Après la mort de Mary Edwards, un des médecins qui l’avait traitée déclara : « Elle a fait davantage pour m’amener à croire en une existence hors du corps que tous les sermons que j’ai entendus […] Elle m’a si souvent dit : “[…] la pauvreté ne devrait être le lot de personne tant qu’il y a de la prospérité pour quiconque. La caste est le plus grand fléau de la civilisation.” » Le révérend Benjamin Fish Austin*, éminent pasteur méthodiste expulsé de son Église peu de temps auparavant pour avoir défendu la réalité des phénomènes psychiques, publia Mary Melville. (Austin avait fréquenté l’Albert College de Belleville en même temps que Mary Edwards et avait partagé la tribune avec Flora MacDonald à Lily Dale, camp d’été pour spiritualistes dans l’État de New York.) Le livre, disait Austin, était « sous tous ses aspects essentiels […] le récit authentique d’une vie réelle et merveilleuse ». Quelle que soit la part de fiction contenue dans Mary Melville (des spiritualistes et des rationalistes se produisaient à Belleville au xixe siècle et la plupart des détails de la vie de Mary Melville ont été attestés), les idées religieuses et sociales exprimées dans ce livre faisaient bien partie de celles qui guidèrent Flora MacDonald tout au long de sa carrière.

Vers 1885, Flora MacDonald Merrill s’établit à Detroit, où elle avait de la parenté. Elle y trouva probablement un emploi dans un bureau et se mit peut-être à écrire. En août 1892, elle contracta une forme de mariage avec Howard Denison. Voyageur de commerce dans le secteur du vêtement, il était déjà marié. Flora l’appelait son mari. Il est possible que leur union ait été légalisée après la mort de la femme de Howard en 1904. Le rôle de cet homme dans la vie de Flora MacDonald reste nébuleux. Leur relation prendrait fin en 1914. Le 23 juin 1893, après l’installation du couple à Toronto, Merrill vit le jour à Detroit. Flora MacDonald était allée accoucher dans cette ville afin que son enfant bénéficie de la liberté personnelle et politique qu’elle associait avec les États-Unis. Merrill deviendrait son plus grand réconfort et son compagnon intellectuel. Une amitié indéfectible les lierait. Comme Flora MacDonald était pacifiste, elle éprouverait beaucoup de chagrin en 1916 au moment de l’enrôlement de Merrill dans le United States Army Ambulance Corps, mais son service en France raffermirait, selon les mots de Merrill, « l’ordre sacré de la Mère et du Fils ».

Inspirée par son mariage non conformiste et par l’attrait grandissant qu’exerçaient sur elle la liberté sexuelle et les idéaux démocratiques célébrés par Whitman dans sa poésie, Flora MacDonald Merrill Denison écrirait en 1905 « Flora MacDam’s karma or outside of Eden » (en collaboration avec Hazel Sheppard Wagner, la fille d’Edmund Ernest Sheppard). Ce roman resté inédit condamne le mariage – « autre vieille superstition inventée par l’Église [pour s’assurer des] revenus et aussi pour maintenir le peuple sous le joug de ses dogmes » – et défend l’amour libre. On peut y lire la déclaration suivante : « Illégitime ! […] Aucun enfant né sous les règles les plus sages de la nature, le désir mutuel d’accouplement, ne devrait être stigmatisé par ce mot, le plus infamant de notre vocabulaire. » Du vivant de Flora MacDonald Merrill Denison, cette vision radicale du mariage comptait peu d’adeptes au Canada, même parmi les féministes.

À Toronto, Mme Denison adopta le métier de couturière. Jusqu’à la fin de ses jours, elle aurait une ou plusieurs activités rémunérées et assurerait sa propre subsistance, celle de son fils et peut-être même celle de son mari. Elle pratiquait donc ce qu’elle prêcherait souvent : la véritable égalité repose sur l’indépendance financière des femmes. En août 1898, elle fut nommée chef du rayon des vêtements sur mesure à la Robert Simpson Company. À ce titre, elle dessinait et confectionnait « les robes chic pour le bal du Yacht Club ». C’est en pensant à des toilettes de ce genre qu’elle exigerait des « vêtements plus sensés pour les femmes ». De surcroît, son travail lui permettait sans doute d’observer l’oppression subie par la main-d’œuvre majoritairement féminine de l’industrie du vêtement. Elle aborderait bientôt la question dans ses articles du Saturday Night, où elle critiquerait « le système de concurrence […] [dans lequel] des centaines s’enfoncent afin que quelques-uns puissent surnager ». En 1910, elle appuierait la grève des ouvrières de la manufacture de vêtements de la T. E. Braime and Company à Toronto. En 1905, elle quitta la maison Simpson pour lancer la Denison Costumer. Le succès de cette entreprise de confection lui permettrait de soutenir financièrement le mouvement des femmes, qui prenait de l’ampleur et dans lequel elle militait de plus en plus.

Sans être un roman explicitement féministe, Mary Melville mettait en vedette une jeune femme qui avait « connaissance d’un plan supérieur ». Peut-être Flora MacDonald Merrill Denison avait-elle commencé à lire les ouvrages féministes qu’elle citerait par la suite : Women and economics […] (Boston, 1898) et The home […] (New York, 1903) de Charlotte Perkins Gilman ainsi que Women and labor (New York, [1911]) d’Olive Schreiner. En outre, elle connaissait bien les critiques formulées par Edward Carpenter et Herbert George Wells contre le mariage traditionnel et la famille. On doit mentionner aussi les relations qu’elle établit avec les leaders du mouvement des femmes à Toronto, en particulier trois médecins, initiatrices de la campagne en faveur du suffrage féminin, soit Emily Howard Stowe [Jennings*], la fille de celle-ci, Ann Augusta Stowe* Gullen, et Margaret Blair Gordon. En 1906, Mme Denison devint secrétaire de la Dominion Women’s Enfranchisement Association, bientôt rebaptisée Canadian Suffrage Association. Pendant un temps, sa maison, rue Carlton, serait le quartier général de l’association, dont elle fut présidente de 1911 à 1914. Elle assista à deux des congrès internationaux annuels du suffrage des femmes, celui de Copenhague en 1906 et celui de Budapest en 1913. Elle connaissait et admirait beaucoup Emmeline Pankhurst, leader britannique du mouvement en faveur du suffrage féminin, qui séjourna chez elle pendant ses tournées au Canada en 1909 et 1911. En 1913, en visite au Royaume-Uni, Mme Denison adhéra à la Women’s Social and Political Union et participa à l’assemblée de protestation au London Pavilion, où Mme Pankhurst fut arrêtée. Carrie Chapman Catt, présidente de la National American Woman Suffrage Association, engagerait Mme Denison en qualité de conférencière à plein temps, avec rémunération, au cours de la fructueuse campagne pour le droit de vote menée en 1917 dans l’État de New York.

En 1906, Flora MacDonald Merrill Denison commença à tenir une chronique dans le World de Toronto, dirigé par William Findlay Maclean, ce qui assurait une large diffusion à ses idées féministes. Cette chronique s’intitula d’abord « Under the Pines », puis « The Open Road towards Democracy » et enfin, à compter de 1913, « Stray Leaves from a Suffragette’s Notebook ». Mme Denison se faisait une championne des plus passionnées des droits des femmes. Elle résumait ainsi sa revendication d’égalité : « Le devoir d’une femme, la place d’une femme est là où la mènent ses aptitudes et les occasions qui s’offrent à elle – et pas ailleurs. » Une fois l’égalité acquise, les femmes seraient les partenaires des hommes et non leurs adversaires. « Les hommes ont besoin des femmes en politique ; les femmes ont besoin des hommes au foyer », affirmait-elle.

En revendiquant l’égalité économique et politique comme un droit, Mme Denison se démarquait du courant majoritaire chez les féministes, pour qui la mission de la femme était avant tout d’être mère et qui préconisait l’égalité du suffrage principalement pour défendre le foyer et les valeurs de la famille contre les menaces de la société urbaine et industrielle. En tant que présidente de la Canadian Suffrage Association, Mme Denison était membre d’office du comité directeur du National Council of Women of Canada. Elle reprochait souvent à cet organisme d’être trop modéré et de rechercher le compromis. En 1912, elle s’opposa ouvertement au conseil à propos de l’imposition de la peine du fouet aux « proxénètes ». D’après elle, la prostitution était un problème socioéconomique plutôt que moral. La réforme sociale, et non le châtiment physique, mènerait à l’abolition de « la traite des Blanches ». À cause de sa position sur cette question, de sa critique de la tyrannie du foyer, de son appui au divorce et à la régulation des naissances et surtout de sa défense pourtant tiède des tactiques militantes de la Women’s Social and Political Union, il y eut d’abord scission à la Canadian Suffrage Association (en 1912, les modérées formèrent l’Equal Franchise League), puis elle-même dut démissionner en 1914. Mme Denison n’abandonna pas la lutte pour autant. En 1917, elle célébra les récentes victoires des partisans du vote des femmes et fit sienne l’affirmation optimiste de Charlotte Perkins Gilman : « dans l’immédiat, les femmes sont l’espoir du monde ».

Les activités de Flora MacDonald Merrill Denison en faveur de la réforme ne se limitèrent jamais à la cause du suffrage. Elle sympathisait avec les ouvrières et, inquiète de leurs enfants négligés, suggérait un salaire pour les femmes afin qu’elles restent au foyer. Selon elle, l’État devait intervenir pour la construction d’« une grande maison qui garantirait à tous travail et confort à l’intérieur de ses murs ». En 1907, elle écrivait : « La caste [est] le plus grand fléau de ce monde […] son abolition [serait] le plus grand bienfait, et quand j’emploie le mot “caste”, je le fais à dessein, car il englobe les mille et un maux de l’État, de l’Église et des conditions sociales en général. » Elle soutint la campagne menée par la Canadian Rational Sunday League pour la circulation des tramways le dimanche et contre l’interdiction de faire du toboggan ce jour-là. Afin de discuter d’« idées nouvelles, [de] questions scientifiques et psychiques », elle adhéra au Progressive Thought Club. « Il y avait, notait-elle, des exposés sur toutes les théories visant l’amélioration de la société, et l’on pouvait entendre des partisans de l’impôt unique, du socialisme, du spiritualisme, de la théosophie, du christianisme tous les samedis soirs au Forum Hall. » Elle approuvait les méthodes parallèles employées par ses amies féministes médecins – imposition des mains, hydrothérapie, électrothérapie, etc. Lorsque la guerre éclata, en août 1914, elle invita les femmes à s’y opposer en affirmant que, « si [elles] s’étaient tenues aux côtés des hommes pour réfléchir aux problèmes du monde, cette guerre n’aurait jamais eu lieu ». Plus tard au cours du conflit, elle soutint la campagne pour la prohibition de l’alcool [V. Francis Stephens Spence*].

Mme Denison passa les premières années de la guerre à Napanee à travailler comme couturière afin de payer les études de son fils et de redresser sa propre situation financière. Cependant, dès 1916, son centre d’intérêt était la Bon Echo Inn au lac Mazinaw (lac Massanoga), achetée par elle-même et son mari en 1910. « Désormais, écrivait-elle, je consacrerai ma vie à la propagation des Idéaux de Whitman, à partir de ce magnifique lieu qu’est Bon Echo. » L’auberge rustique, construite par un chirurgien dentiste de Cleveland pour se retirer dans la nature loin des villes industrielles, aurait deux fonctions. La location des chambres et des chalets (dont l’un fut nommé en l’honneur de Charlotte Perkins Gilman après une visite en 1911) rapporterait des revenus. Surtout, Bon Echo serait un lieu voué à la mémoire du « grand poète gris », le centre de la Whitman Fellowship of Canada et une « Institution du tendre amour des camarades », expression qui décrit la philosophie assez vague – à la fois démocratique, communautaire et spirituelle – que Mme Denison et d’autres tenaient du poète américain. « Walt Whitman, de l’avis de ses adeptes, a été la grande force de spiritualisation positive ; il a réfuté catégoriquement les conclusions de la science matérialiste en en absorbant toutes les découvertes et en leur insufflant la divine flamme d’une âme immortelle. »

En mars 1916, Flora MacDonald Merrill Denison commença à publier le Sunset of Bon Echo (en mai 1920, le total des numéros parus s’élèverait à six). Ce magazine faisait à la fois la promotion des objectifs commerciaux et whitmaniens du lieu de villégiature, où elle employait des Amérindiens et revêtait parfois sa propre version du costume autochtone. « Sunset, expliquait-elle, […] était un chef indien. Notre amitié date de l’époque où Mme Denison – alors Flora Merrill – enseignait dans les bois. » Le chef pratiquait « aussi bien la guérison mentale que magnétique ». Parmi les visiteurs de Bon Echo, il y eut John Wilson Bengough, caricaturiste et partisan de l’impôt unique, Albert Ernest Stafford Smythe*, fondateur de la Toronto Theosophical Society, le peintre Frederic Marlett Bell-Smith et James Laughlin Hughes*, réformateur de l’éducation.

Les réunions annuelles de Bon Echo culminèrent en août 1919 par la célébration du centenaire de la naissance de Whitman. Le gigantesque rocher – le « Gibraltar du Canada » – qui surplombe le lac Mazinaw fut alors consacré à sa mémoire. L’inscription suivante y serait gravée : OLD WALT, 1819–1919 : dedicated to the democratic ideals of Walt Whitman by Horace Traubel and Flora MacDonald. Bien qu’âgé et souffrant, Traubel, biographe et fidèle collaborateur de Whitman, était venu de New York pour l’occasion. Il rendit le dernier soupir deux semaines plus tard, convaincu que l’esprit du Vieux Walt était à son chevet. Mme Denison raconta la suite en détail. À grand peine, on transporta la dépouille vers le sud jusqu’au chemin de fer à Kaladar (Merrill Denison agissant comme entrepreneur des pompes funèbres), puis jusqu’à New York pour l’embaumement. Au cours des funérailles, tenues dans cette ville, l’église prit feu. Enfin, Traubel fut inhumé à Camden, dans le New Jersey (où repose Whitman).

Une fois la Grande Guerre terminée, Mme Denison continua de jouer le rôle de spiritualiste et de réformatrice qu’elle s’était forgé dans les deux premières décennies du siècle. Souvent, dans ses lettres à son fils, elle rapportait des communications avec sa sœur Mary Edwards ou le Vieux Walt et parlait de sa participation à l’Association for Psychical Research of Canada. En février 1919, au domicile torontois du docteur Albert Durrant Watson, auteur de The twentieth plane […] (Toronto, 1918), elle put voir le médium Louis Benjamin à l’œuvre durant trois heures. « J’ai pris part à des centaines de séances, écrivait-elle, souvent avec les médiums les plus extraordinaires de tous les temps, mais aucune d’entre elles ne s’est aussi manifestement déroulée sous le signe de l’Amour. » Pour attester le génie de Walt Whitman, on évoqua Lincoln, Ingersoll, Emerson, William Cullen Bryant et le docteur Richard Maurice Bucke*.

De même, Mme Denison assista à des réunions de la Theosophical Society pour entendre George Herbert Locke*, directeur de la Toronto Public Library, et à des rencontres du People’s Forum pour écouter Robert Henry Halbert, président des Fermiers unis de l’Ontario. Cofondatrice de l’aile ontarienne du Parti travailliste du Canada, elle fit campagne pour celle-ci. Malgré son pessimisme quant à l’avenir des mouvements de réforme dans le monde d’après-guerre, elle entendait mettre encore ses immenses talents d’oratrice au service de la cause. Elle était loin d’être un penseur original, mais elle prônait des réformes concrètes tout en ayant une vision mystico-utopiste, « conception supérieure de la nature humaine et de la fraternité de l’homme » que l’on retrouve chez bien des régénérateurs canadiens-anglais de la fin de l’époque victorienne.

À l’automne de 1919, Flora MacDonald Merrill Denison fut atteinte par la grippe espagnole. Pas tout à fait remise, elle visita Bon Echo au cours du printemps anormalement froid et humide de 1921. Elle attrapa une pneumonie et mourut le 23 mai. Comme son mentor féministe, la docteure Emily Howard Stowe (« Je ne vois encore aucune femme [qui soit] presque à sa hauteur »), elle fut incinérée à Buffalo, sans doute pour affirmer la supériorité de la vie spirituelle sur la vie temporelle et le triomphe de Flora MacDonald sur Mme Denison.

Ramsay Cook et Michèle Lacombe

L’ouvrage de Flora MacDonald [Merrill] (Denison) intitulé Mary Melville, the psychic a été publié à Toronto en 1900.

QUA, Merrill Denison fonds.— Univ. of Toronto Library, Thomas Fisher Rare Book Library, ms coll. 51 (Flora MacDonald Denison papers).— World (Toronto), 1906–1913.— C. L. Bacchi, Liberation deferred ? The ideas of the English-Canadian suffragists, 1877–1918 (Toronto, 1983).— Ann Braude, Radical spirits : spiritualism and women’s rights in nineteenth-century America (Boston, 1989).— Ramsay Cook, The regenerators : social criticism in late Victorian English Canada (Toronto, 1985).— Deborah Gorham, « Flora MacDonald Denison : Canadian feminist », dans A not unreasonable claim : women and reform in Canada, 1880s–1920s, Linda Kealey, édit. (Toronto, 1979), 47–70.— Michèle Lacombe, « Songs of the open road : Bon Echo, urban utopians and the cult of nature », Rev. d’études canadiennes (Peterborough, Ontario), 33 (1998–1999), nº 2 : 152–167 ; « Theosophy and the Canadian idealist tradition : a preliminary exploration », Rev. d’études canadiennes, 17 (1982–1983), nº 2 : 100–118.— Alex Owen, The darkened room : women, power, and spiritualism in late nineteenth century England (Londres, 1989).— Robert Stacey et Stan McMullin, Massanoga : the art of Bon Echo (s.l., 1998).— Sunset of Bon Echo (Toronto), 1 (mars 1916–avril–mai 1920), nos 1–6.

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Ramsay Cook et Michèle Lacombe, « MERRILL, FLORA MacDONALD (Denison) », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 2 oct. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/merrill_flora_macdonald_15F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 15
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    2005
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