LONGMOOR, ROBERT, trafiquant de fourrures, né probablement dans la paroisse de West Church, à Édimbourg, fils de William Longmoor ; circa 1771–1812.

Robert Longmoor entra à la Hudson’s Bay Company en 1771 comme marin ; en 1774, il remonta la rivière Saskatchewan avec Samuel Hearne* et l’aida à établir le poste de Cumberland House (Saskatchewan). L’année suivante, on l’envoya hiverner chez les Indiens, avec Charles Thomas Isham, sur l’embranchement sud de la Saskatchewan. Considéré par Humphrey Marten*, agent principal à York Factory (Manitoba), comme le meilleur canotier au service de la compagnie, on l’affecta à la traite à l’extérieur des forts. En juin 1776, se dirigeant au nord de Cumberland House, vers la rivière Grass (Manitoba), à la recherche des Athapascans, il fut arrêté en chemin par Alexander Henry*, Joseph et Thomas Frobisher, trafiquants indépendants de Montréal ; il réussit néanmoins à faire une bonne traite et rentra à Cumberland House avant la fin du mois.

La même année, Longmoor reçut l’ordre de retourner en Angleterre, mais Marten, impressionné par son habileté et par son animosité envers les trafiquants de Montréal, le renvoya à Cumberland House. Au cours des deux années qui suivirent, Longmoor fit plusieurs expéditions de traite, à partir de Cumberland House. Il séjourna parmi les Indiens dans une région aussi éloignée, à l’ouest, que les collines Eagle (Saskatchewan) ; pendant les étés de 1777 et de 1778, il redescendit à York Factory. Encouragé par la Hudson’s Bay Company à établir un poste dans le pays des bisons, il quitta Cumberland House pour l’ouest, le 27 septembre 1778, à la tête d’un groupe dont faisaient partie Malchom Ross*, Isaac Batt* et Isham. Des conditions adverses les forcèrent à s’arrêter à un établissement de trafiquants indépendants, près de ce qui est aujourd’hui Silver Grove, en Saskatchewan, où Longmoor accepta l’offre qu’on lui fit d’une maison pour l’hiver, laquelle appartenait à des trafiquants canadiens. À l’époque, cet établissement fut considéré comme le plus éloigné de tous ceux où la Hudson’s Bay Company faisait la traite. En mars, il fut rejoint par Philip Turnor* ; partis à la fin d’avril, ils descendirent ensemble à York Factory. Longmoor fit impression sur Turnor, qui le jugea « peu ou pas inférieur à un bon Indien ».

À York Factory, Longmoor se porta volontaire pour implanter la traite de la compagnie dans la région de l’Athabasca ; mais on était tout tourné encore vers la Saskatchewan. En 1779, accompagné de William Tomison*, agent principal à Cumberland House, il construisit la première Hudson House (qui, plus tard, fut parfois appelée Lower Hudson House), et il y resta pour en assumer le commandement. Ce poste était situé à environ 14 milles en aval de l’établissement où Longmoor avait passé l’hiver précédent, lequel fut plus tard appelé Upper Hudson House. À court d’articles de traite, Longmoor réussit néanmoins à acheter huit canots indiens et il en construisit deux lui-même. En 1780, il prit le commandement du convoi d’été jusqu’à York Factory ; en septembre, il était de nouveau envoyé à Hudson House avec, sous ses ordres, 21 hommes. L’hiver fut dur pour Longmoor. Les Indiens avaient brûlé la prairie pour en chasser les bisons et faire en sorte que les trafiquants dépendissent entièrement d’eux pour leur alimentation en viande ; les articles de traite vinrent à manquer, et il ne fut pas facile de maintenir la discipline. Quinze de ses hommes jurèrent, dans une lettre à Tomison, qu’ils ne serviraient plus jamais sous les ordres de Longmoor, tandis que Longmoor lui-même, de son côté, protestait contre l’indifférence et l’ignorance de ses supérieurs à la baie d’Hudson. Malgré les rigueurs de l’hiver de 1780–1781, Longmoor ramena ses hommes sains et saufs à York Factory l’été suivant.

À l’automne, on envoya Longmoor faire obstacle aux trafiquants indépendants de la région du lac Athabasca, en prévision d’une forte poussée de la Hudson’s Bay Company dans cette direction, en 1782. Mais ce fut un hiver de grande misère ; les Indiens furent frappés d’une désastreuse épidémie de petite vérole, et Longmoor reçut l’ordre d’hiverner dans la plaine. À l’été de 1782, les convois de l’intérieur des terres étaient déjà sur le chemin du retour quand les Français, sous les ordres de Jean-François de Galaup*, comte de Lapérouse, s’emparèrent d’York Factory et le détruisirent, le 24 août. Le printemps suivant, Tomison, qui avait désormais la responsabilité de l’intérieur, laissa Longmoor à la direction de Hudson House, puis descendit à York Factory, qu’il décrivit comme un « amas de ruines ». Il attendit aussi longtemps qu’il put le bateau d’Angleterre, pour enfin partir vers l’intérieur des terres, triste et sans ravitaillement. Les postes de la Saskatchewan se maintinrent, toutefois, et Longmoor continua de trafiquer, de son poste de Hudson House. En 1785, le comité de Londres lui donna l’ordre d’explorer le fleuve Churchill afin d’étudier la possibilité de l’emprunter pour atteindre la région de l’Athabasca ; mais Samuel Hearne, devenu agent principal à Churchill (Manitoba), accorda la priorité à la Saskatchewan et, l’année suivante, envoya Longmoor, en compagnie du jeune David Thompson*, construire Manchester House (près de Standard Hill, Saskatchewan), en vue de rivaliser avec les Canadiens qui faisaient à la Hudson’s Bay Company une forte opposition.

De l’automne de 1787 à son retour en Angleterre, en 1792, Longmoor fut commandant en second à Churchill. En 1791, il avait reçu l’ordre d’accompagner le capitaine Charles Duncan* qui devait essayer de trouver une route terrestre vers le Pacifique ; mais son opposition à cette entreprise et les difficultés qui surgirent entre lui et Duncan empêchèrent l’expédition de se mettre en route. Il fut néanmoins réengagé en 1793, à titre de surintendant (un poste non défini), à York Factory, et il prit en charge, l’année suivante, l’expédition des marchandises. En 1796, il demanda à retourner à l’intérieur des terres ; on l’envoya à Red Deer River House (près du lac Red Deer, Manitoba). À court de marchandises, il dut passer l’hiver à Carlton flouse (près de Kamsack, Saskatchewan), faisant concurrence aux hommes de la Hudson’s Bay Company venus du fort Albany (Ontario) aussi bien qu’aux Canadiens. Même si les revenus de la traite étaient décevants, il y resta jusqu’en 1800, servant comme chef de poste du district de la rivière Swan (dont la juridiction comprenait la rivière Red Deer) ; il construisit un nouveau poste sur la Swan. Mais l’obsession de Tomison, préoccupé uniquement de la Saskatchewan, amena le détournement de marchandises qui étaient destinées à l’expansion de la traite à la rivière Red Deer.

Au cours de cette période, York Factory abandonna au fort Albany ses prétentions sur la traite dans la région du lac Winnipeg. En 1800, ayant refusé de retourner une fois encore à l’intérieur des terres avant que le navire de la Hudson’s Bay Company fût arrivé d’Angleterre, Longmoor abandonna Swan River House et remit Carlton House aux hommes du fort Albany. Puis il descendit à York Factory, pour être renvoyé une fois de plus à la Saskatchewan ; à partir de 1804, il fut chef de poste adjoint à Island House (près de Lake Eliza, Alberta). Toujours plus remarquable par son habileté à manier les canots que par ses talents d’écrivain ou d’administrateur, il resta en haut de la Saskatchewan, vivant dans une obscurité relative, jusqu’à ce qu’il fût de nouveau employé à York Factory en 1807 pour une période d’un an. Il se retrouva à Island House de 1808 à 1810, puis descendit pour la dernière fois à York Factory avec sa famille en 1810. Le 18 mai de cette année-là, Alexander Henry écrivait au sujet de Longmoor qu’il était « déterminé à quitter immédiatement la rivière et le pays, et à se retirer pour jouir du fruit de ses travaux, car il va[lait] quelque £1 800, cours de Halifax, produit de près de 40 ans de service, en ce pays, pour la Hudson’s Bay Company ».

Robert Longmoor, à ce qu’il semble, prit au sérieux ses responsabilités familiales. Il envoyait annuellement six guinées à son père, qui vivait encore à Édimbourg en 1787. Un fils de Longmoor (on sait qu’il en eut un qui se prénommait Robert) demeurait en Grande-Bretagne en 1808 et 1809, peut-être pour faire ses études, et son père lui payait chambre et pension. Longmoor lui-même alla en Grande-Bretagne en 1810, mais il en revint peu de temps après. En février 1812, il avait acheté une ferme près de Montréal, où il gardait des chevaux, des bœufs et des vaches. Le 5 juillet 1814, un trafiquant de la Hudson’s Bay Company notait dans son journal : « entrai dans le lac des Deux Montagnes et passai devant la maison où habite la famille de feu M. Longmore ».

Edwin Ernest Rich

APC, MG 19, A13, 2 : 935 (transcription).— PAM, HBCA, A.5/2 : ff.132, 170 ; A.16/33 : f.130 ; A.16/34 : f.159d ; B.3/a/117b : f.17d ; B.135/a/102 : f.17d ; C.1/423 ; D.13/8 : f.122.— Cumberland House journals and inland journal, 1775–82, E. E. Rich et A. M. Johnson, édit. (2 vol., Londres, 1951–1952).— Docs. relating to NWC (Wallace).— Journals of Hearne and Turnor (Tyrrell).— Saskatchewan journals and correspondence : Edmonton House, 1795–1800 ; Chesterfield House, 1800–1802, A. M. Johnson, édit. (Londres, 1967).— Rich, Hist. of HBC.

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Edwin Ernest Rich, « LONGMOOR, ROBERT », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 3 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/longmoor_robert_5F.html.

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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1983
Année de la révision:    1983
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