DUNIÈRE, LOUIS, marchand, propriétaire foncier, officier de milice et homme politique, né le 7 mai 1723 à Québec, fils de Louis Dunière et de Marguerite Durand ; le 1er juillet 1748, il épousa au même endroit Élisabeth Trefflé, dit Rottot, et ils eurent 17 enfants ; décédé le 31 mai 1806 à Berthier (Berthier-sur-Mer, Québec).

Le père de Louis Dunière, natif de Saint-Saturnin (Saint-Cernin, France), arriva dans la colonie un peu avant 1714 et exerça à Québec la profession de marchand, notamment avec François Perrault* à compter de 1719. C’est probablement en travaillant pour son père que Dunière s’est initié à la comptabilité et aux autres rudiments du commerce, puisqu’en 1744, âgé de 21 ans, il résidait toujours chez ce dernier rue Saint-Pierre, à Québec. Au moment de son mariage, en 1748, il est négociant à Québec et possède des avoirs évalués à 14 020#.

Dunière effectue ses premières transactions foncières en faisant l’acquisition de terres à Saint-Thomas-de-la-Pointe-à-la-Caille (Montmagny) en 1754 et 1757, puis devient régisseur de la seigneurie de Bellechasse en 1762. Lors du recensement tenu cette année-là, il possède 43 têtes de bétail et une grande quantité de semences ; en outre, il emploie six domestiques. Disposant de surplus agricoles toujours croissants, il s’associe avec le marchand de Québec Henry Boone, le 20 septembre 1769, afin de faire le commerce du blé pendant trois ans.

Le 4 août 1775, peu avant l’invasion américaine [V. Benedict Arnold ; Richard Montgomery*], Dunière est nommé capitaine dans la milice canadienne de Québec ; à ce titre, il dirige une compagnie assignée à la défense du faubourg Saint-Louis. Il est cependant impossible de déterminer la nature de sa participation au siège de Québec. Quoi qu’il en soit, il continuera d’exercer la fonction de capitaine de milice jusqu’à sa mort.

Au début des années 1780, Dunière continue à gérer son entreprise de commerce si l’on en juge par les achats et les ventes qu’il réalise à cette époque. Il effectue aussi un voyage d’affaires à Londres et revient au pays en 1782 avec Henry Hamilton*, nommé lieutenant-gouverneur de la province de Québec, et quelques négociants dont Thomas Aylwin*, Adam Lymburner*, John Lees et Meredith Wills, son futur gendre. Les années qui suivent témoignent d’une diversification de l’activité de Dunière. En 1786, il obtient du lieutenant-gouverneur Henry Hope* un permis qui l’autorise à établir une entreprise de pêche sédentaire (morue et saumon) et de chasse au loup marin sur la côte du Labrador, près d’une mission des frères moraves [V. Jens Haven*] ; il est associé dans ce projet à John Antrobus, Pierre Marcoux et Jacques-Nicolas Perrault, tous marchands de Québec. Loin de délaisser le commerce du blé, Dunière se dote de nouvelles installations dans le but de faciliter ses échanges. Ainsi, le 21 octobre 1788, il achète de John Fraser, homme d’affaires londonien, un quai en bordure du Saint-Laurent, une maison et des hangars situés au pied du cap Diamant, pour la somme de £1 000. À la même époque, il se lance dans la construction de navires à Québec, mais ne pouvant se consacrer entièrement à cette activité, il loue son chantier à Patrick Beatson* en 1793.

Sur le plan politique, Dunière témoigne régulièrement de son loyalisme envers les autorités britanniques par le biais d’adresses et de pétitions. Cela ne l’empêche pas de formuler des plaintes quant à l’administration de la justice ou de proposer l’introduction de la culture du chanvre dans la colonie. À trois reprises, en 1784, 1785 et 1790, il se prononce avec d’autres (tant Canadiens que Britanniques) en faveur de l’établissement d’institutions représentatives dans la province de Québec. En 1791, ses vœux seront exaucés, et, en juin de l’année suivante, il sera élu député de Hertford à la chambre d’Assemblée du Bas-Canada. Dès l’ouverture de la première session en décembre 1792, Dunière, doyen de la chambre, propose Jean-Antoine Panet comme président. Malgré l’opposition véhémente de l’élite marchande britannique, Panet l’emporte par 28 voix contre 18. Durant son mandat, Dunière s’oppose à ce que seul le texte anglais des lois et des débats parlementaires soit légalement reconnu ; en outre, il appuie un projet de loi en vue d’affecter les biens des jésuites à l’éducation de la jeunesse. Lors de l’élection de 1796, Dunière se retire de la vie politique, et c’est son fils Louis-François qui sera élu dans la circonscription de Hertford. Suivant les traces de son père, il propose de nouveau Panet comme président de la chambre d’Assemblée l’année suivante.

Malgré son âge avancé, Dunière n’en continue pas moins de brasser des affaires importantes. En 1796, il est fournisseur de l’armée qui lui achète des marchandises pour une valeur de £428. La même année, il requiert le droit d’expédier en Angleterre des denrées entreposées dans ses magasins ; celles-ci consistent en 2 000 quarts de farine, 1 500 quintaux de biscuits, 1 200 minots de pois et 600 minots de maïs. À cette époque, il est associé à Francis Badgley*, marchand de Montréal, sous le nom de Dunière, Badgley ‘and Company. C’est en 1800 que Dunière semble délaisser le commerce pour de bon, car il vend à Pierre Brehaut, son ex-employé, le terrain, le quai et les bâtiments situés au pied du cap Diamant.

Par la suite, Dunière concentre ses investissements dans la propriété foncière, domaine dans lequel il avait manifesté de l’intérêt plus tôt. Ainsi, en 1801, il fait l’acquisition par bail emphytéotique de tous les titres de la seigneurie de Bellechasse, moyennant une rente annuelle de 1 500# et 450 minots de blé redevables aux religieuses de l’Hôpital Général de Québec. Par cette transaction, il devient notamment propriétaire d’un domaine à Berthier qui comprend une maison de pierre, quatre maisons de bois, trois moulins, un hangar et d’autres bâtiments. En 1789, il figurait parmi les fondateurs de la Société d’agriculture du district de Québec et, en 1791, il signait une pétition repoussant tout projet de transformation de la tenure seigneuriale en tenure libre.

Criblé de dettes – Louis Dunière devait notamment £1 241 aux héritiers de son beau-frère, Kenelm Chandler, et £1 556 à John Painter, marchand de Québec –, il vend en 1805 le domaine de Berthier. Il continue néanmoins d’habiter la région jusqu’à sa mort survenue le 31 mai 1806.

Stanley Bréhaut Ryerson

ANQ-Q, CE1-1, 7 mai 1723, 1er juill. 1748 ; CN1-83, 21 oct. 1788 ;CN1-178, 6 mars 1798 ;CN1-205, 20 déc. 1782 ; CN1-250, 20 sept. 1769 ; CN1-256, 31 mai 1791 ; CN1-262, 19 nov. 1800, 8 oct. 1803, 25 févr. 1805.— APC, RG 1, L3L : 39017.— « La milice canadienne-française à Québec en 1775 », BRH, 11 (1905) : 227.— « Le recensement de Québec en 1744 », ANQ Rapport, 1939–1940 : 130.— « Le recensement du gouvernement de Québec en 1762 », ANQ Rapport, 1925–1926 : 38.— La Gazette de Québec, 24 janv. 1765, 20 sept. 1766, 27 juin 1782, 30 juin 1785, 18 déc. 1788, 17 déc. 1789, 24 mars, 19 août 1791, 24 mai, 20 déc. 1792, 13 févr. 1794, 26 janv. 1797, 17 juin 1799, 29 déc. 1803.— Almanach de Québec, 1788–1805.— F.-J. Audet et Fabre Surveyer, Les députés au premier parl. du B.C., 176–185.— Ouellet, Hist. économique, 153.— Paquet et Wallot, Patronage et pouvoir dans le B.-C., 129.— Tousignant, « La genèse et l’avènement de la constitution de 1791 », 447.— Édouard Fabre Surveyer, « Les deux premiers députés du comté de Hertford (Bellechasse-Montmagny) : Pierre Marcoux et Louis Dunière », Le Canada français (Québec), 32 (1944–1945) : 404–417.— Hare, « L’Assemblée législative du B.-C. », RHAF, 27 : 371–373.— « La mission de MM. Adhémar et Delisle en Angleterre en 1783–84 », BRH, 32 (1926) : 623–625.

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Stanley Bréhaut Ryerson, « DUNIÈRE, LOUIS », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 2 déc. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/duniere_louis_5F.html.

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Auteur de l'article:    Stanley Bréhaut Ryerson
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Titre de la publication:    Dictionnaire biographique du Canada, vol. 5
Éditeur:    Université Laval/University of Toronto
Année de la publication:    1983
Année de la révision:    1983
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