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HENRY, WILLIAM ALEXANDER, avocat, homme politique et juge, né le 30 décembre 1816 à Halifax, fils de Robert Nesbit Henry, marchand d’origine irlandaise, et de Margaret Forrestall, née Hendricken ; en 1841, il épousa Sophia Caroline McDonald, qui mourut en 1845, laissant un fils en bas âge, puis, en 1850, Christianna McDonald, et de ce mariage naquirent sept enfants ; décédé le 3 mai 1888 à Ottawa.
Après la guerre de 1812, le père de William Alexander Henry quitta Halifax pour aller s’établir à Antigonish, Nouvelle-Écosse, où il exploita une entreprise et un magasin de bois de construction. C’est là que le jeune William Alexander fit ses études avec le révérend Thomas Trotter*. À la fin des années 1830, il étudia le droit avec Alexander McDougall et fut inscrit au barreau comme attorney en 1840, puis comme barrister en 1841. Il s’occupa activement de politique et, aux élections de 1840, il se présenta contre McDougall, remportant la victoire comme député du comté de Sydney (Antigonish) à l’Assemblée. Il entrait ainsi à la chambre au moment où le conseil du lieutenant-gouverneur Falkland [Cary], dirigé par James William Johnston* et Joseph Howe*, essayait à &rand-peine de former un gouvernement de coalition. À l’Assemblée, on considérait Henry comme un opportuniste, un orateur ennuyeux et verbeux qui prononçait un discours tel « un garçon fatigué qui fait tourner une meule ». Il était cependant populaire, « très liant avec tout le monde », sportif admiré, et avait la réputation de s’occuper des intérêts de ses électeurs.
Défait en 1843, après l’effondrement de la coalition, Henry fut réélu en 1847 grâce à l’appui accordé aux réformistes qui prônaient un gouvernement responsable. Ceux-ci détenaient une majorité de sept sièges à la nouvelle Assemblée et, le 26 janvier 1848, Henry appuya le vote de défiance de James Boyle Uniacke* qui forçait Johnston à démissionner et entraînait la formation du premier gouvernement responsable, sous la direction d’Uniacke et de Howe. Réélu en 1851, Henry devint ministre sans portefeuille en avril 1852, à l’époque où des libéraux éminents comme Thomas Killam* critiquaient le gouvernement d’avoir donné son aval au projet de Howe de construire un chemin de fer de Halifax à Windsor, Nouvelle-Écosse, qui serait financé par des fonds publics. Lorsque William Young remplaça Uniacke à titre de chef du gouvernement libéral en avril 1854, il choisit Henry pour succéder à McDougall au poste de solliciteur général.
En août 1856, Henry changea de ministère pour devenir secrétaire de la province mais, le 9 février 1857, il démissionna du cabinet expliquant qu’il ne pouvait accepter que ses collègues destituent William Condon de son poste de jaugeur au port de Halifax. Condon, catholique et président de la Charitable Irish Society, avait révélé que Howe avait mené une campagne illégale en vue de recruter des Américains pour l’armée britannique en Crimée ; Condon avait également pris part à une assemblée publique à Halifax, au cours de laquelle, de l’avis de Howe et d’autres, on avait fait des déclarations déloyales, et il fut mêlé à une polémique dans un journal où il sortit des limites de la conduite qui convient à un fonctionnaire. L’affaire Condon-Howe se déroula à une époque où les catholiques et les protestants de la Nouvelle-Écosse nourrissaient des sentiments amers les uns envers les autres et elle entraîna la défection massive des catholiques du parti libéral. Henry, presbytérien dont certains des parents étaient catholiques, représentait une circonscription à prédominance catholique et prétendit à l’Assemblée que le renvoi de Condon constituait de la persécution pour des motifs religieux.
Dix jours après la démission de Henry du cabinet, le gouvernement de Young fut défait lors d’un vote de défiance des conservateurs appuyé par tous les députés catholiques et deux libéraux protestants, John Chipman Wade et Henry. Le passage de Henry du parti libéral au parti conservateur n’affecta pas sa popularité, car il fut réélu en mai 1859, un mois après s’être joint au gouvernement de Johnston en tant que solliciteur général. Bien que les libéraux eussent obtenu la majorité aux élections de 1859, les conservateurs ne démissionnèrent pas, parce que Johnston et Henry soutenaient que certains libéraux élus étaient, en vertu de la loi, frappés de l’incapacité de siéger. Les légistes britanniques ne furent pas d’accord et, le 7 février 1860, le gouvernement de Johnston céda la place aux libéraux. Au moment où les conservateurs reprirent le pouvoir en 1863, Henry fut de nouveau solliciteur général et, le 11 mai 1864, il devint procureur général dans le gouvernement de Charles Tupper*, successeur de Johnston au titre de chef conservateur. Henry appuya fermement le programme législatif, présenté par Tupper en 1864 et 1865, favorisant l’école gratuite et s’opposa aux efforts d’Isaac LeVesconte* en vue de l’établissement d’écoles « séparées » catholiques reconnues par la loi ; comme Tupper, il croyait que la représentation des catholiques au conseil de l’Instruction publique, tel qu’il était constitué par le cabinet, protégerait les intérêts des catholiques.
Rien n’indique que Henry se soit intéressé à l’union des colonies de l’Amérique du Nord britannique avant la conférence de Charlottetown tenue en septembre 1864, à laquelle il participa en qualité de procureur général de la Nouvelle-Écosse. À titre de délégué à la conférence de Québec le mois suivant, il prit une part active à ses délibérations aussi bien qu’à ses réunions mondaines. Il préconisait des pouvoirs fédéraux vastes et indéfinis et des champs de juridiction provinciaux définis et limités, ainsi que l’institution d’une cour suprême qui jugerait les questions de partage de juridiction. Il exprima de nouveau la conviction que le peuple de la Nouvelle-Écosse tirerait avantage de l’union sur le plan commercial, particulièrement après qu’il eut effectué un voyage à Washington en 1866 comme l’un des délégués de l’Amérique du Nord britannique qui tentèrent sans succès de convaincre les Américains de ne pas abroger le traité de réciprocité de 1854. Henry fit aussi ressortir la nécessité pour les provinces de l’Amérique du Nord britannique de s’unir pour se défendre et celle de terminer l’Intercolonial entre Halifax et Québec. Il poursuivit sa campagne en faveur de la confédération malgré l’hostilité croissante qu’entretenaient Howe et William Annand à l’égard du plan élaboré à la conférence de Québec.
Henry fut l’un des délégués à la conférence de Londres, en décembre 1866, au cours de laquelle on choisit la forme définitive de la confédération ; il fut aussi l’un des procureurs généraux qui aidèrent à préciser la terminologie utilisée dans l’Acte de l’Amérique du Nord britannique. C’est là probablement la source de cette tradition non fondée qui veut qu’il l’ait rédigé. Les délégués de la Nouvelle-Écosse à Londres approuvèrent les résolutions de Québec, mais Henry s’opposa à ce qu’il y ait un nombre limité de sièges au sénat, craignant qu’ainsi ses membres ne contrecarrent impunément l’adoption de mesures populaires. Il appuya aussi les efforts infructueux de l’archevêque Thomas Louis Connolly* pour que l’existence des écoles séparées catholiques de la Nouvelle-Écosse fût garantie par l’Acte, comme l’était celle des écoles séparées des minorités confessionnelles de l’Ontario et du Québec. Aux élections fédérales du 18 septembre 1867, où la Nouvelle-Écosse élut un seul député partisan de la Confédération, Henry fut défait dans le comté d’Antigonish par Hugh McDonald, un de ses anciens élèves en droit et l’un des principaux adversaires de la Confédération. Après cet échec, son premier en 24 ans, et après une autre défaite subie lors d’une élection partielle fédérale à Richmond en avril 1869, Henry reprit l’exercice du droit, pour lequel il était hautement qualifié. En 1870, il fut élu maire de Halifax et, en 1873 et 1874, président de la Charitable Irish Society.
Conservateur de nom, Henry eut cependant plus d’affinités avec le parti libéral fédéral dirigé par Alexander Mackenzie* qu’avec le parti libéral-conservateur de sir John Alexander Macdonald*. Il s’était brouillé avec Macdonald, qui avait récompensé d’autres chefs partisans de la Confédération en les nommant au sénat ou en les faisant entrer dans la magistrature, mais gardait ses distances à l’égard du gouvernement néo-écossais Annand, hostile à la Confédération. Défait encore une fois lors d’une élection partielle à Antigonish, en 1873, Henry quitta le parti conservateur pour se joindre au parti libéral, sous prétexte que le premier était impliqué dans le scandale du Pacifique mais, en réalité, parce qu’il était profondément irrité de la nomination de son rival Hugh McDonald à un poste de juge d’une cour de comté. En octobre 1875, deux ans après l’arrivée au pouvoir des libéraux fédéraux, le ministre de la Justice Edward Blake* nomma Henry à l’un des postes de juge de la nouvelle Cour suprême du Canada. On avait le sentiment qu’à titre d’un des Pères de la Confédération, il connaissait les desseins des auteurs de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique, particulièrement en ce qui concernait le partage des pouvoirs entre les législatures fédérale et provinciales.
Pendant ses dix premières années d’existence, la Cour suprême, ayant à sa tête le juge William Buell Richards, fut assaillie de problèmes sérieux relativement à sa crédibilité et à son importance. Blake désirait qu’on mît un terme aux appels interjetés devant le comité judiciaire du Conseil privé, mais cela n’était pas acceptable politiquement aux yeux du parti conservateur ni du gouvernement britannique qui voulaient tous deux, en autorisant ces appels, conserver un lien entre la métropole et sa colonie. On passait souvent outre à l’autorité de la Cour suprême quand on faisait appel directement devant le comité judiciaire du Conseil privé à partir des tribunaux provinciaux statuant en dernier ressort, et les lords juristes anglais renversaient souvent les jugements de la Cour suprême. Au parlement, la cour essuya plusieurs critiques concernant son fonctionnement. Henry siégeait à la cour avec assiduité, différait souvent d’opinion avec les autres juges de la cour, et ses jugements étaient fréquemment maintenus par le comité judiciaire du Conseil privé. Mais sir Robert Laird Borden* devait le qualifier de juriste « compétent » plutôt que « brillant » et, en 1880, les juges John Wellington Gwynne* et Samuel Henry Strong* se plaignirent auprès de sir John A. Macdonald de ce que les jugements de Henry étaient « longs, ampoulés, surabondants de verbiage incohérent, parsemés d’expressions non conformes à la grammaire, d’argot et des plus parfaites platitudes juridiques appliquées d’une façon inappropriée ». Henry continua de remplir ses fonctions jusqu’à sa mort et collabora aux réformes administratives qui firent que la Cour suprême inspira un plus grand respect et joua un rôle plus utile. L’activité que Henry déploya sur la scène politique de sa province natale pendant plus de 20 ans éclipsa cependant les 13 années qu’il passa dans la magistrature ; une notice nécrologique le représenta, ainsi que Tupper, comme les hommes qui avaient mené la Nouvelle-Écosse « par le bout du nez [pour la faire entrer] dans la Confédération ».
AO, MU 159–162.— PANS,
Phyllis R. Blakeley, « HENRY, WILLIAM ALEXANDER », dans Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11, Université Laval/University of Toronto, 2003– , consulté le 2 oct. 2024, https://www.biographi.ca/fr/bio/henry_william_alexander_11F.html.
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Auteur de l'article: | Phyllis R. Blakeley |
Titre de l'article: | HENRY, WILLIAM ALEXANDER |
Titre de la publication: | Dictionnaire biographique du Canada, vol. 11 |
Éditeur: | Université Laval/University of Toronto |
Année de la publication: | 1982 |
Année de la révision: | 1982 |
Date de consultation: | 2 oct. 2024 |